Robinson Crusoe. II. Defoe Daniel
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Название: Robinson Crusoe. II

Автор: Defoe Daniel

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ sauvée, n'eût-ce été que juste de quoi l'empêcher de mourir. Mais la faim ne connaît ni ami, ni famille, ni justice, ni droit; c'est pourquoi elle est sans remords et sans compassion.

      Le chirurgien lui avait exposé que nous faisions un voyage de long cours, qui le séparerait de touts ses amis et le replongerait peut-être dans une aussi mauvaise situation que celle où nous l'avions trouvé, c'est-à-dire mourant de faim dans le monde; et il avait répondu: – «Peu m'importe où j'irai, pourvu que je sois délivré, du féroce équipage parmi lequel je suis! Le capitaine, – c'est de moi qu'il entendait parler, car il ne connaissait nullement mon neveu, – m'a sauvé la vie, je suis sûr qu'il ne voudra pas me faire de chagrin; et quant à la servante, j'ai la certitude, si elle recouvre sa raison, qu'elle sera très-reconnaissante, n'importe le lieu où vous nous emmeniez.» – Le chirurgien m'avait rapporté tout ceci d'une façon si touchante, que je n'avais pu résister, et que nous les avions pris à bord touts les deux, avec touts leurs bagages, excepté onze barriques de sucre qu'on n'avait pu remuer ou aveindre. Mais, comme le jeune homme en avait le connaissement, j'avais fait signer à son capitaine un écrit par lequel il s'obligeait dès son arrivée à Bristol à se rendre chez un M. Rogers, négociant auquel le jeune homme s'était dit allié, et à lui remettre une lettre de ma part, avec toutes les marchandises laissées à bord appartenant à la défunte veuve. Il n'en fut rien, je présume: car je n'appris jamais que ce vaisseau eût abordé à Bristol. Il se sera perdu en mer, cela est probable. Désemparé comme il était et si éloigné de toute terre, mon opinion est qu'à la première tourmente qui aura soufflé il aura dû couler bas. Déjà il faisait eau et avait sa cale avariée quand nous le rencontrâmes.

      Nous étions alors par 19 degrés 32 minutes de latitude, et nous avions eu jusque là un voyage passable comme temps, quoique les vents d'abord eussent été contraires. – Je ne vous fatiguerai pas du récit des petits incidents de vents, de temps et de courants advenus durant la traversée; mais, coupant court eu égard à ce qui va suivre, je dirai que j'arrivai à mon ancienne habitation, à mon île, le 10 avril 1695. – Ce ne fut pas sans grande difficulté que je la retrouvai. Comme autrefois venant du Brésil, je l'avais abordée par le Sud et Sud-Est, que je l'avais quittée de même, et qu'alors je cinglais entre le continent et l'île, n'ayant ni carte de la côte, ni point de repère, je ne la reconnus pas quand je la vis. Je ne savais si c'était elle ou non.

      Nous rôdâmes long-temps, et nous abordâmes à plusieurs îles dans les bouches de la grande rivière Orénoque, mais inutilement. Toutefois j'appris en côtoyant le rivage que j'avais été jadis dans une grande erreur, c'est-à-dire que le continent que j'avais cru voir de l'île où je vivais n'était réellement point la terre ferme, mais une île fort longue, ou plutôt une chaîne d'îles s'étendant d'un côté à l'autre des vastes bouches de la grande rivière; et que les Sauvages qui venaient dans mon île n'étaient pas proprement ceux qu'on appelle Caribes, mais des insulaires et autres barbares de la même espèce, qui habitaient un peu plus près de moi.

      Bref, je visitai sans résultat quantité de ces îles: j'en trouvai quelques-unes peuplées et quelques-unes désertes. Dans une entre autres je rencontrai des Espagnols, et je crus qu'ils y résidaient; mais, leur ayant parlé, j'appris qu'ils avaient un sloop mouillé dans une petite crique près de là; qu'ils venaient en ce lieu pour faire du sel et pêcher s'il était possible quelques huîtres à perle; enfin qu'ils appartenaient à l'île de la Trinité, située plus au Nord, par les 10 et 11 degrés de latitude.

      Côtoyant ainsi d'une île à l'autre, tantôt avec le navire, tantôt avec la chaloupe des Français, – nous l'avions trouvée à notre convenance, et l'avions gardée sous leur bon plaisir, – j'atteignis enfin le côté Sud de mon île, et je reconnus les lieux de prime abord. Je fis donc mettre le navire à l'ancre, en face de la petite crique où gisait mon ancienne habitation.

      Sitôt que je vins en vue de l'île j'appelai VENDREDI et je lui demandai s'il savait où il était. Il promena ses regards quelque temps, puis tout à coup il battit des mains et s'écria: – «O, oui! O, voilà! O, oui! O, voilà!» – Et montrant du doigt notre ancienne habitation, il se prit à danser et à cabrioler comme un fou, et j'eus beaucoup de peine à l'empêcher de sauter à la mer pour gagner la rive à la nage.

      – «Eh bien! VENDREDI, lui demandai-je, penses-tu que nous trouvions quelqu'un ici? penses-tu que nous revoyions ton père?» – Il demeura quelque temps muet comme une souche; mais quand je nommai son père, le pauvre et affectionné garçon parût affligé, et je vis des larmes couler en abondance sur sa face. – «Qu'est-ce, VENDREDI? lui dis-je, te fâcherait-il de revoir ton père?» – «Non, non, répondit-il en secouant la tête, non voir lui plus, non jamais plus voir encore!» – Pourquoi donc, VENDREDI, repris-je, comment sais-tu cela?» – «Oh non! oh non! s'écria-t-il; lui mort il y a long-temps; il y a long-temps lui beaucoup vieux homme.» – «Bah! bah! VENDREDI, tu n'en sais rien; mais allons-nous trouver quelqu'un autre?» – Le compagnon avait, à ce qu'il paraît, de meilleurs yeux que moi; il les jeta juste sur la colline au-dessus de mon ancienne maison, et, quoique nous en fussions à une demi-lieue, il se mit à crier: – «Moi voir! moi voir! oui, oui, moi voir beaucoup hommes là, et là, et là.»

      RETOUR DANS L'ÎLE

      Je regardai, mais je ne pus voir personne, pas même avec ma lunette d'approche, probablement parce que je la braquais mal, car mon serviteur avait raison: comme je l'appris le lendemain, il y avait là cinq ou six hommes arrêtés à regarder le navire, et ne sachant que penser de nous.

      Aussitôt que VENDREDI m'eut dit qu'il voyait du monde, je fis déployer le pavillon anglais et tirer trois coups de canon, pour donner à entendre que nous étions amis; et, un demi-quart d'heure après, nous apperçûmes une fumée s'élever du côté de la crique. J'ordonnai immédiatement de mettre la chaloupe à la mer, et, prenant VENDREDI avec moi, j'arborai le pavillon blanc ou parlementaire et je me rendis directement à terre, accompagné du jeune religieux dont il a été question. Je lui avais conté l'histoire de mon existence en cette île, le genre de vie que j'y avais mené, toutes les particularités ayant trait et à moi-même et à ceux que j'y avais laissés, et ce récit l'avait rendu extrêmement désireux de me suivre. J'avais en outre avec moi environ seize hommes très-bien armés pour le cas où nous aurions trouvé quelques nouveaux hôtes qui ne nous eussent pas connus; mais nous n'eûmes pas besoin d'armes.

      Comme nous allions à terre durant le flot, presque à marée haute, nous voguâmes droit dans la crique; et le premier homme sur lequel je fixai mes yeux fut l'Espagnol dont j'avais sauvé la vie, et que je reconnus parfaitement bien à sa figure; quant à son costume, je le décrirai plus tard. J'ordonnai d'abord que, excepté moi, personne ne mît pied à terre; mais il n'y eut pas moyen de retenir VENDREDI dans la chaloupe: car ce fils affectionné, avait découvert son père par delà les Espagnols, à une grande distance, où je ne le distinguais aucunement; si on ne l'eût pas laissé descendre au rivage, il aurait sauté à la mer. Il ne fut pas plus tôt débarqué qu'il vola vers son père comme une flèche décochée d'un arc. Malgré la plus ferme résolution, il n'est pas un homme qui eût pu se défendre de verser des larmes en voyant les transports de joie de ce pauvre garçon quand il rejoignit son père; comment il l'embrassa, le baisa, lui caressa la face, le prit dans ses bras, l'assit sur un arbre abattu et s'étendit près de lui; puis se dressa et le regarda pendant un quart d'heure comme on regarderait une peinture étrange; puis se coucha par terre, lui caressa et lui baisa les jambes; puis enfin se releva et le regarda fixement. On eût dit une fascination; mais le jour suivant un chien même aurait ri de voir les nouvelles manifestations de son affection. Dans la matinée, durant plusieurs heures il se promena avec son père çà et là le long du rivage, le tenant toujours par la main comme s'il eût été une lady; et de temps en temps venant lui chercher dans la chaloupe soit un morceau de sucre, soit un verre de liqueur, un biscuit ou quelque autre bonne chose. Dans l'après-midi ses folies se transformèrent encore: alors il asseyait le vieillard, par terre, se mettait à danser autour de lui, faisait СКАЧАТЬ