La chasse aux lions. Alfred Assollant
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Название: La chasse aux lions

Автор: Alfred Assollant

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ cents pas, s’arrêta sous un vieux chêne et me dit tout bas, comme s’il avait eu peur d’éveiller quelqu’un :

      «Dumanet, c’est fini. Allons-nous-en. Il n’y a personne.»

      Je répondis bien haut :

      «Pitou, encore un kilomètre !

      – Non.

      – Un petit kilomètre ! le plus petit de tous les kilomètres !»

      Il répliqua d’une voix ferme :

      «Pas même un décamètre, Dumanet ! Pitou n’a qu’une parole ! et Pitou Jacques a donné sa parole à Jacques Pitou de ne pas le mener plus loin que cinq cents pas.»

      Tout à coup, dans le haut du chêne, une voix cria :

      «Allah ! Allah ! Allah !

      – Allons, bon ! dit Pitou, encore une autre affaire. Voilà quelque moricaud en détresse.»

      Au même instant, nous entendîmes un bruit de feuilles froissées et de branches cassées. Un Arabe vint tomber à nos pieds.

      Il tomba, je veux dire qu’il descendit de branche en branche, mais si vite que Pitou eut à peine le temps de s’écarter : autrement il lui aurait cogné la tête.

      L’Arabe se releva et dit en montrant la forêt :

      «Il est parti !

      – Qui ? demanda Pitou.

      – Celui que vous cherchez, le brigand qui a mangé ma femme et mes deux vaches, le sidi lion enfin.»

      Je demandai :

      «Comment sais-tu qu’il est parti ?»

      L’Arabe se roula la face contre terre en s’arrachant la barbe.

      «Ah ! dit-il, je l’ai vu et je l’ai suivi pendant qu’il tenait ma pauvre femme Fatma dans ses dents. Allah ! Allah ! Comme elle criait !»

      Et il nous raconta son malheur.

      «Je revenais avec Fatma et le bourricot qui portaient chacun sa charge de bois…»

      Pitou prit la parole :

      «Et toi, qu’est-ce que tu portais ?»

      L’Arabe le regarda très étonné et répondit :

      «Moi ?… je ne portais rien.

      – Alors tu étais comme l’autre dans la chanson de Malbrouck ?

      – Malbrouck ?… connais pas… Un Roumi peut-être ?

      – Oui, un seigneur Roumi que ses amis enterrèrent dans le temps. L’un portait son grand casque, l’autre portait son grand sabre ; l’autre portait sa cuirasse et l’autre ne portait rien… Va, va toujours… Alors tu suivais Fatma et le bourricot ?

      – Je ne les suivais pas, dit l’Arabe ; je les faisais marcher devant moi.

      – Ça, dit Pitou, c’est bien différent… Alors le lion est venu, et il a emporté ta femme et ton bourricot ?

      – Oh ! ma femme seulement, parce que le bourricot a jeté sa charge de bois et s’est sauvé dans la forêt ; mais le brigand saura bien l’y retrouver demain. Pauvre bourricot ! pauvre bon bourricot ! je l’aimais tant !… Je l’avais appelé Ali, du nom du gendre du Prophète !… Ali, mon pauvre Ali, je l’avais acheté cinq douros, et il m’en rapportait deux par semaine !»

      L’Arabe pleurait et criait.

      Alors je demandai :

      «Mais toi, qu’est-ce que tu as dit, quand tu as vu qu’il emportait ta femme ?

      – Moi !… ce que j’ai dit ?… Je suis monté sur le chêne et je lui ai crié à travers tes branches : “Coquin ! scélérat ! assassin !” Et pendant que j’entendais craquer sous ses dents les os de ma pauvre Fatma, j’ai prié Allah d’accorder à son fidèle serviteur que le brigand fût étranglé par un de ces os bien-aimés… Qu’est-ce que je pouvais lui faire avec mon bâton ?

      – Ça, dit Pitou, c’est vrai. On fait ce qu’on peut, on ne fait pas ce qu’on veut… Allons, Dumanet, allons-nous-en.»

      Mais moi, je n’étais pas pressé. Pendant que l’Arabe parlait, j’avais senti, comme dit l’autre, pousser une idée sous mon képi… Les idées, vous savez, ça ne pousse pas tous les jours ; c’est comme le blé, il y a des saisons pour ça. Mais quand elles sont mûres, il faut les cueillir tout de suite. Au bout d’un mois, elles ne valent plus rien.

      Je dis donc à l’Arabe :

      «Comment t’appelles-tu ?

      – Ibrahim, de la tribu des Ouled-Ismaïl.

      – Eh bien, Ibrahim, qu’est-ce que tu vas faire, maintenant que tu as perdu ta femme et ton bourricot ?»

      L’Arabe leva les mains au ciel.

      «Est-ce que je sais, moi ?… Ce qu’Allah voudra… Pauvre Fatma ! Pauvre Ali ! Elle m’avait coûté vingt-cinq douros, et lui cinq seulement ; mais il faisait autant d’ouvrage qu’elle ; seulement, elle valait mieux pour le couscoussou.»

      Je dis encore :

      «Pitou, qu’est-ce que tu as d’argent dans ton sac ?

      – Sept francs, Dumanet.

      – Les mêmes sept francs que la mère Pitou et sa fille t’envoyèrent le mois dernier ?

      – Les mêmes, Dumanet, avec deux portraits.

      – Le sien et celui de sa fille ?

      – Mais non, Dumanet, mais non ! que tu es bête… Le portrait de Louis-Philippe sur la pièce de cinq francs et le portrait de Charles X sur la pièce de quarante sous.

      – Tu regardes donc le portrait de tes rois ?

      – Parbleu ! quand j’ai fini d’astiquer, qu’est-ce que tu veux que je fasse ?… J’observe.

      – Ah ! tu observes ! Ah ! bigre ! tu ne m’avais jamais dit ça, Pitou !

      – Parce que tu ne me l’avais jamais demandé.

      – Alors, Pitou, puisque tu es un observateur, tu dois avoir observé que j’ai quelque chose à te proposer.»

      Il secoua la tête.

      «Dumanet, Dumanet, je me méfie. Toutes les fois que tu m’as proposé quelque chose, c’était un nouveau moyen de nous casser le cou. Te rappelles-tu le jour où tu voulais faire avec moi le tour du Panthéon, à Paris, debout sur la balustrade, qui est à six cent cinquante pieds du pavé ?

      – Six cent cinquante pieds, Pitou ?

      – Ou trois СКАЧАТЬ