Borgia. Michel Zevaco
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Название: Borgia

Автор: Michel Zevaco

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ César Borgia, ces Français sont plus habiles encore dans l’art de la parole que dans l’art de l’épée… Jeune homme, vous me plaisez… Répondez-moi franchement… Qu’êtes-vous venu faire en Italie ?…

      – Je suis venu dans l’espoir d’être admis à servir sous vos ordres, monseigneur… Pauvre d’écus, riche d’espoir, j’ai pensé que le plus grand capitaine de notre époque pourrait peut-être apprécier mon épée…

      – Certes !… Eh bien, votre espoir ne sera pas trompé… Mais comment se fait-il que vous parliez si bien l’italien ?…

      – J’ai longtemps séjourné à Milan, à Pise, à Florence, d’où je viens… et puis, j’ai lu et relu Dante Alighieri… C’est dans la Di-vine Comédie que j’ai pris mes leçons.

      À ce moment, dom Garconio s’approcha de Borgia.

      – Monseigneur, dit-il, vous ne savez pas que cet homme a osé porter la main sur un homme d’Église… Songez que, sans lui, Primevère serait en votre pouvoir…

      Ragastens n’entendit pas ces mots. Mais il en devina le sens. Il comprit, à l’expression de sombre menace qui envahissait le vi-sage de Borgia, que son affaire allait peut-être prendre mauvaise tournure.

      – Monseigneur, dit-il, vous ne m’avez pas demandé où et quand je vous ai connu… Si vous le désirez, je vais vous l’apprendre…

      Le chevalier déganta rapidement sa main droite. Au petit doigt de cette main brillait un diamant enchâssé dans un anneau d’or.

      – Reconnaissez-vous ce diamant, monseigneur ?

      Borgia secoua la tête.

      – C’est mon talisman, reprit le chevalier, et il a fallu que j’y tienne pour que je ne le vende pas, même pour me présenter en une tenue décente devant vous… Voici l’histoire de ce diamant… Un soir, il y a quatre ans de cela, j’arrivais à Chinon…

      – Chinon ! s’exclama Borgia.

      – Oui, monseigneur… et j’y arrivai le soir même du jour où vous y fîtes une entrée dont on parle encore en France… Jamais on n’avait vu, et jamais sans doute on ne verra rien d’aussi ma-gnifique… Les mules de votre escorte étaient ferrées d’argent… et quant aux chevaux, ils portaient des clous d’or à leurs fers… et ces clous tenaient à peine à la corne, en sorte que mules et che-vaux semaient de l’or et de l’argent sur votre passage, et que la population se ruait pour ramasser ces bribes de votre faste…

      » Le soir, vers minuit, vous commîtes une grande impru-dence… Vous sortîtes du château… seul !… Ayant franchi la porte de la ville, vous vous dirigiez vers une certaine demeure écartée, de riche apparence, lorsque…

      – Lorsque je fus attaqué par trois ou quatre malandrins qui en voulaient sans aucun doute à mes bijoux…

      – Tout juste, monseigneur… Vous rappelez-vous la suite ?

      – Par le ciel ! Comment pourrais-je l’oublier ?… J’allais suc-comber. Tout à coup, un inconnu survint et s’escrima si bien de l’épée qu’il mit en fuite les drôles…

      – Ce fut alors, monseigneur, que vous me donnâtes ce beau diamant…

      – C’était vous ?…

      –… en me disant qu’il me servirait à me faire reconnaître de vous partout où vous seriez, dès que j’aurais besoin d’aide et de protection…

      – Jeune homme ! Touchez là… Mon aide et ma protection vous sont acquises… Dès cette heure vous êtes à mon service et malheur à qui oserait seulement vous vouloir du mal !…

      Un regard circulaire jeté autour de lui appuya ces paroles. Toute l’escorte, jusqu’à Astorre, dont le bras était bandé, jusqu’à dom Garconio, s’inclina devant le jeune Français qui, d’une façon aussi imprévue, venait de conquérir la faveur de César Borgia.

      – En route, messieurs, commanda celui-ci. Nous retournons à Rome. Quant à vous, jeune homme, je vous attends ce soir, à minuit… Minuit, ajouta-t-il avec un singulier sourire, c’est mon heure, à moi !…

      – Où vous trouverai-je, monseigneur ?

      – Au palais de ma sœur Lucrèce… Au Palais-Riant… Tout le monde, à Rome, vous l’indiquera.

      – Au Palais-Riant !… À minuit !… On y sera !…

      Le chevalier de Ragastens s’inclina.

      Quand il se redressa, il vit la troupe des seigneurs qui s’éloignait dans un nuage de poussière. Mais, si vite que s’éloignât cette troupe, le chevalier n’en distingua pas moins deux regards de haine mortelle qui lui furent jetés à la dérobée : l’un par le baron Astorre, l’autre par le moine Garconio.

      Ragastens haussa les épaules. Il acheva tranquillement son modeste déjeuner et, ayant payé son écot, se remit en selle.

      III. LE PALAIS-RIANT

      Il était environ quatre heures de l’après-midi, lorsque le chevalier de Ragastens pénétra dans la Ville Éternelle. Il avait fait au pas le reste de la route, tant pour donner du repos au brave Capitan qu’il aimait comme un bon et fidèle compagnon, que pour se livrer à l’aise à ses méditations…

      Enfant du pavé parisien, le chevalier de Ragastens avait jusqu’à cette époque vécu un peu au hasard. Il n’avait connu ni son père, ni sa mère.

      En effet, celle-ci était morte en lui donnant le jour. Et quant à son père, pauvre gentilhomme gascon, venu à Paris pour tâcher de faire fortune, il avait succombé à la misère, alors que le petit chevalier tétait encore le sein d’une nourrice.

      Cette nourrice, marchande de hardes sous un auvent placé à l’encoignure de la rue Saint-Antoine, presque en face la grande porte de la Bastille, s’était attachée au petit orphelin. Elle s’était mis en tête d’en faire son successeur dans son négoce de friperies.

      Or, étant devenue veuve, elle prit un amant pour remplacer le digne homme que l’on venait de porter en terre. Le petit cheva-lier avait alors sept ans.

      L’amant de la fripière était un clerc. Vrai savant qui lisait, écrivait, et même calculait. Toute la science du clerc passa de son cerveau à celui de l’enfant.

      À quatorze ans, celui-ci en savait presque autant qu’un abbé. La digne fripière rêvait déjà pour lui de flamboyantes destinées, lorsqu’une épidémie de petite vérole l’emporta.

      Le jeune chevalier suivit en pleurant, jusqu’au cimetière, le corps de celle qui lui avait servi de mère. Puis il revint, s’ébroua, sécha ses larmes et dans la boutique de la défunte, choisit un équipement complet dont le principal ornement était une im-mense rapière qui traînait sur le pavé dès qu’il cessait d’appuyer sur la poignée.

      Vers l’âge de dix-huit ans, c’était un fieffé spadassin, redouté dans les cabarets et tavernes, grand coureur de filles, grand vi-deur de brocs de Suresnes, un peu dépenaillé, friand de la lame, l’épée toujours à moitié hors du fourreau, courant la prétentaine, rossant le bourgeois et battant le guet : enfin, un vrai gibier de potence.

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