Cyrano de Bergerac. Edmond Rostand
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Название: Cyrano de Bergerac

Автор: Edmond Rostand

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ très original.

      LE BRET.

      Pourtant…

      CYRANO.

      C’est un auteur. Il ne peut lui déplaire

      Que l’on vienne troubler la pièce d’un confrère.

      LE BRET.

      Tu te mets sur les bras, vraiment, trop d’ennemis !

      CYRANO, attaquant son grain de raisin.

      Combien puis-je, à peu près, ce soir, m’en être mis ?

      LE BRET.

      Quarante-huit. Sans compter les femmes.

      CYRANO.

      Voyons, compte !

      LE BRET.

      Montfleury, le bourgeois, de Guiche, le vicomte,

      Baro, l’Académie…

      CYRANO.

      Assez ! tu me ravis !

      LE BRET.

      Mais où te mènera la façon dont tu vis ?

      Quel système est le tien ?

      CYRANO.

      J’errais dans un méandre ;

      J’avais trop de partis, trop compliqués, à prendre ;

      J’ai pris…

      LE BRET.

      Lequel ?

      CYRANO.

      Mais le plus simple, de beaucoup.

      J’ai décidé d’être admirable, en tout, pour tout !

      LE BRET, haussant les épaules.

      Soit ! – Mais enfin, à moi, le motif de ta haine

      Pour Montfleury, le vrai, dis-le-moi !

      CYRANO, se levant.

      Ce Silène,

      Si ventru que son doigt n’atteint pas son nombril,

      Pour les femmes encor se croit un doux péril,

      Et leur fait, cependant qu’en jouant il bredouille,

      Des yeux de carpe avec ses gros yeux de grenouille !…

      Et je le hais depuis qu’il se permit, un soir,

      De poser son regard, sur celle… Oh ! j’ai cru voir

      Glisser sur une fleur une longue limace !

      LE BRET, stupéfait.

      Hein ? Comment ? Serait-il possible ?…

      CYRANO, avec un rire amer.

      Que j’aimasse ?…

      (Changeant de ton et gravement.)

      J’aime.

      LE BRET.

      Et peut-on savoir ? tu ne m’as jamais dit ?…

      CYRANO.

      Qui j’aime ?… Réfléchis, voyons. Il m’interdit

      Le rêve d’être aimé même par une laide,

      Ce nez qui d’un quart d’heure en tous lieux me précède ;

      Alors, moi, j’aime qui ?… Mais cela va de soi !

      J’aime – mais c’est forcé ! – la plus belle qui soit !

      LE BRET.

      La plus belle ?…

      CYRANO.

      Tout simplement, qui soit au monde !

      La plus brillante, la plus fine,

      (Avec accablement.)

      la plus blonde !

      LE BRET.

      Eh ! mon Dieu, quelle est donc cette femme ?…

      CYRANO.

      Un danger

      Mortel sans le vouloir, exquis sans y songer,

      Un piège de nature, une rose muscade

      Dans laquelle l’amour se tient en embuscade !

      Qui connaît son sourire a connu le parfait.

      Elle fait de la grâce avec rien, elle fait

      Tenir tout le divin dans un geste quelconque,

      Et tu ne saurais pas, Vénus, monter en conque,

      Ni toi, Diane, marcher dans les grands bois fleuris,

      Comme elle monte en chaise et marche dans Paris !…

      LE BRET.

      Sapristi ! je comprends. C’est clair !

      CYRANO.

      C’est diaphane.

      LE BRET.

      Magdeleine Robin, ta cousine ?

      CYRANO.

      Oui, – Roxane.

      LE BRET.

      Eh bien ! mais c’est au mieux ! Tu l’aimes ? Dis-le-lui !

      Tu t’es couvert de gloire à ses yeux aujourd’hui !

      CYRANO.

      Regarde-moi, mon cher, et dis quelle espérance

      Pourrait bien me laisser cette protubérance !

      Oh ! je ne me fais pas d’illusion ! – Parbleu,

      Oui, quelquefois, je m’attendris, dans le soir bleu ;

      J’entre en quelque jardin où l’heure se parfume ;

      Avec mon pauvre grand diable de nez je hume

      L’avril, – je suis des yeux, sous un rayon d’argent,

      Au bras d’un cavalier, quelque femme, en songeant

      Que pour marcher, à petits pas, dans de la lune,

      Aussi moi j’aimerais au bras en avoir une,

      Je m’exalte, j’oublie… et j’aperçois soudain

      L’ombre СКАЧАТЬ