Le comte de Monte Cristo. Alexandre Dumas
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Название: Le comte de Monte Cristo

Автор: Alexandre Dumas

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ honnête femme et une bonne ménagère. Où trouverais-je mieux que vous sous ces deux rapports?

      – Fernand, répondit Mercédès en secouant la tête, on devient mauvaise ménagère et on ne peut répondre de rester honnête femme lorsqu’on aime un autre homme que son mari. Contentez-vous de mon amitié, car, je vous le répète, c’est tout ce que je puis vous promettre, et je ne promets que ce que je suis sûre de pouvoir donner.

      – Oui, je comprends, dit Fernand; vous supportez patiemment votre misère, mais vous avez peur de la mienne. Eh bien, Mercédès, aimé de vous, je tenterai la fortune; vous me porterez bonheur, et je deviendrai riche: je puis étendre mon état de pêcheur; je puis entrer comme commis dans un comptoir; je puis moi-même devenir marchand!

      – Vous ne pouvez rien tenter de tout cela, Fernand; vous êtes soldat, et si vous restez aux Catalans, c’est parce qu’il n’y a pas de guerre. Demeurez donc pêcheur; ne faites point de rêves qui vous feraient paraître la réalité plus terrible encore, et contentez-vous de mon amitié, puisque je ne puis vous donner autre chose.

      – Eh bien, vous avez raison, Mercédès, je serai marin; j’aurai, au lieu du costume de nos pères que vous méprisez, un chapeau verni, une chemise rayée et une veste bleue avec des ancres sur les boutons. N’est-ce point ainsi qu’il faut être habillé pour vous plaire?

      – Que voulez-vous dire? demanda Mercédès en lançant un regard impérieux, que voulez-vous dire? Je ne vous comprends pas.

      – Je veux dire, Mercédès, que vous n’êtes si dure et si cruelle pour moi que parce que vous attendez quelqu’un qui est ainsi vêtu. Mais celui que vous attendez est inconstant peut-être, et, s’il ne l’est pas, la mer l’est pour lui.

      – Fernand, s’écria Mercédès, je vous croyais bon et je me trompais! Fernand, vous êtes un mauvais cœur d’appeler à l’aide de votre jalousie les colères de Dieu! Eh bien, oui, je ne m’en cache pas, j’attends et j’aime celui que vous dites, et s’il ne revient pas, au lieu d’accuser cette inconstance que vous invoquez, vous, je dirai qu’il est mort en m’aimant.»

      Le jeune Catalan fit un geste de rage.

      «Je vous comprends, Fernand: vous vous en prendrez à lui de ce que je ne vous aime pas; vous croiserez votre couteau catalan contre son poignard! À quoi cela vous avancera-t-il? À perdre mon amitié si vous êtes vaincu, à voir mon amitié se changer en haine si vous êtes vainqueur. Croyez-moi, chercher querelle à un homme est un mauvais moyen de plaire à la femme qui aime cet homme. Non, Fernand, vous ne vous laisserez point aller ainsi à vos mauvaises pensées. Ne pouvant m’avoir pour femme, vous vous contenterez de m’avoir pour amie et pour sœur; et d’ailleurs, ajouta-t-elle, les yeux troublés et mouillés de larmes, attendez, attendez, Fernand: vous l’avez dit tout à l’heure, la mer est perfide, et il y a déjà quatre mois qu’il est parti; depuis quatre mois j’ai compté bien des tempêtes!»

      Fernand demeura impassible; il ne chercha pas à essuyer les larmes qui roulaient sur les joues de Mercédès; et cependant, pour chacune de ces larmes, il eût donné un verre de son sang; mais ces larmes coulaient pour un autre.

      Il se leva, fit un tour dans la cabane et revint, s’arrêta devant Mercédès, l’œil sombre et les poings crispés.

      Voyons, Mercédès, dit-il, encore une fois répondez: est-ce bien résolu?

      – J’aime Edmond Dantès, dit froidement la jeune fille, et nul autre qu’Edmond ne sera mon époux.

      – Et vous l’aimerez toujours?

      – Tant que je vivrai.»

      Fernand baissa la tête comme un homme découragé, poussa un soupir qui ressemblait à un gémissement; puis tout à coup relevant le front, les dents serrées et les narines entrouvertes:

      «Mais s’il est mort?

      – S’il est mort, je mourrai.

      – Mais s’il vous oublie?

      – Mercédès! cria une voix joyeuse au-dehors de la maison, Mercédès!

      – Ah! s’écria la jeune fille en rougissant de joie et en bondissant d’amour, tu vois bien qu’il ne m’a pas oubliée, puisque le voilà!»

      Et elle s’élança vers la porte, qu’elle ouvrit en s’écriant:

      «À moi, Edmond! me voici.»

      Fernand, pâle et frémissant, recula en arrière comme fait un voyageur à la vue d’un serpent, et rencontrant sa chaise, il y retomba assis.

      Edmond et Mercédès étaient dans les bras l’un de l’autre. Le soleil ardent de Marseille, qui pénétrait à travers l’ouverture de la porte, les inondait d’un flot de lumière. D’abord ils ne virent rien de ce qui les entourait. Un immense bonheur les isolait du monde, et ils ne parlaient que par ces mots entrecoupés qui sont les élans d’une joie si vive qu’ils semblent l’expression de la douleur.

      Tout à coup Edmond aperçut la figure sombre de Fernand, qui se dessinait dans l’ombre, pâle et menaçante; par un mouvement dont il ne se rendit pas compte lui-même, le jeune Catalan tenait la main sur le couteau passé à sa ceinture.

      «Ah! pardon, dit Dantès en fronçant le sourcil à son tour, je n’avais pas remarqué que nous étions trois.»

      Puis, se tournant vers Mercédès:

      «Qui est ce monsieur? demanda-t-il.

      – Monsieur sera votre meilleur ami, Dantès, car c’est mon ami à moi, c’est mon cousin, c’est mon frère; c’est Fernand; c’est-à-dire l’homme qu’après vous, Edmond, j’aime le plus au monde; ne le reconnaissez-vous pas?

      – Ah! si fait», dit Edmond.

      Et, sans abandonner Mercédès, dont il tenait la main serrée dans une des siennes, il tendit avec un mouvement de cordialité son autre main au Catalan.

      Mais Fernand, loin de répondre à ce geste amical, resta muet et immobile comme une statue.

      Alors Edmond promena son regard investigateur de Mercédès, émue et tremblante, à Fernand, sombre et menaçant.

      Ce seul regard lui apprit tout.

      La colère monta à son front.

      «Je ne savais pas venir avec tant de hâte chez vous Mercédès, pour y trouver un ennemi.

      – Un ennemi! s’écria Mercédès avec un regard de courroux à l’adresse de son cousin; un ennemi chez moi, dis-tu, Edmond! Si je croyais cela, je te prendrais sous le bras et je m’en irais à Marseille, quittant la maison pour n’y plus jamais rentrer.»

      L’œil de Fernand lança un éclair.

      «Et s’il t’arrivait malheur, mon Edmond, continua-t-elle avec ce même flegme implacable qui prouvait à Fernand que la jeune fille avait lu jusqu’au plus profond de sa sinistre pensée, s’il t’arrivait malheur, je monterais sur le cap de Morgion, et je me jetterais sur les rochers la tête la première.»

      Fernand devint affreusement pâle.

      «Mais tu t’es trompé, Edmond, poursuivit-elle, tu n’as point d’ennemi СКАЧАТЬ