Eugénie Grandet. Honore de Balzac
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Читать онлайн книгу Eugénie Grandet - Honore de Balzac страница 8

Название: Eugénie Grandet

Автор: Honore de Balzac

Издательство: Bookwire

Жанр: Языкознание

Серия:

isbn: 4064066089993

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СКАЧАТЬ de Grandet exploitant le faux attachement des deux familles, en tirant d'énormes profits, dominait ce drame et l'éclairait. N'était-ce pas le seul dieu moderne auquel on ait foi, l'Argent dans toute sa puissance, exprimé par une seule physionomie? Les doux sentiments de la vie n'occupaient là qu'une place secondaire, ils animaient trois coeurs purs, ceux de Nanon, d'Eugénie et sa mère. Encore, combien d'ignorance dans leur naïveté! Eugénie et sa mère ne savaient rien de la fortune de Grandet, elles n'estimaient les choses de la vie qu'à la lueur de leurs pâles idées, et ne prisaient ni ne méprisaient l'argent, accoutumées qu'elles étaient à s'en passer. Leurs sentiments, froissés à leur insu mais vivaces, le secret de leur existence, en faisaient des exceptions curieuses dans cette réunion de gens dont la vie était purement matérielle. Affreuse condition de l'homme! il n'y a pas un de ses bonheurs qui ne vienne d'une ignorance quelconque. Au moment où madame Grandet gagnait un lot de seize sous, le plus considérable qui eût jamais été ponté dans cette salle, et que la grande Nanon riait d'aise en voyant madame empochant cette riche somme, un coup de marteau retentit à la porte de la maison, et y fit un si grand tapage que les femmes sautèrent sur leurs chaises.

      —Ce n'est pas un homme de Saumur qui frappe ainsi, dit le notaire.

      —Peut-on cogner comme ça, dit Nanon. Veulent-ils casser notre porte?

      —Quel diable est-ce? s'écria Grandet.

      Nanon prit une des deux chandelles, et alla ouvrir accompagnée de

       Grandet.

      —Grandet, Grandet, s'écria sa femme qui poussée par un vague sentiment de peur s'élança vers la porte de la salle.

      Tous les joueurs se regardèrent.

      —Si nous y allions, dit monsieur des Grassins. Ce coup de marteau me paraît malveillant.

      A peine fut-il permis à monsieur des Grassins d'apercevoir la figure d'un jeune homme accompagné du facteur des messageries, qui portait deux malles énormes et traînait des sacs de nuit. Grandet se retourna brusquement vers sa femme et lui dit:

      —Madame Grandet, allez à votre loto. Laissez-moi m'entendre avec monsieur.

      Puis il tira vivement la porte de la salle, où les joueurs agités reprirent leurs places, mais sans continuer le jeu.

      —Est-ce quelqu'un de Saumur, monsieur des Grassins? lui dit sa femme.

      —Non, c'est un voyageur.

      —Il ne peut venir que de Paris. En effet, dit le notaire en tirant sa vieille montre épaisse de deux doigts et qui ressemblait à un vaisseau hollandais, il est neuffe-s-heures. Peste! la diligence du Grand Bureau n'est jamais en retard.

      —Et ce monsieur est-il jeune? demanda l'abbé Cruchot.

      —Oui, répondit monsieur des Grassins. Il apporte des paquets qui doivent peser au moins trois cents kilos.

      —Nanon ne revient pas, dit Eugénie.

      —Ce ne peut être qu'un de vos parents, dit le président.

      —Faisons les mises, s'écria doucement Madame Grandet. A sa voix, j'ai vu que monsieur Grandet était contrarié, peut-être ne serait-il pas content de s'apercevoir que nous parlons de ses affaires.

      —Mademoiselle, dit Adolphe à sa voisine, ce sera sans doute votre cousin Grandet, un bien joli jeune homme que j'ai vu au bal de monsieur de Nucingen. Adolphe ne continua pas, sa mère lui marcha sur le pied, puis, en lui demandant à haute voix deux sous pour sa mise:

      —Veux-tu te taire, grand nigaud! lui dit-elle à l'oreille.

      En ce moment Grandet rentra sans la grande Nanon, dont le pas et celui du facteur retentirent dans les escaliers; il était suivi du voyageur qui depuis quelques instants excitait tant de curiosités et préoccupait si vivement les imaginations, que son arrivée en ce logis et sa chute au milieu de ce monde peut être comparée à celle d'un colimaçon dans une ruche, ou à l'introduction d'un paon dans quelque obscure basse-cour de village.

      —Asseyez-vous auprès du feu, lui dit Grandet.

      Avant de s'asseoir, le jeune étranger salua très gracieusement l'assemblée. Les hommes se levèrent pour répondre par une inclination polie, et les femmes firent une révérence cérémonieuse.

      —Vous avez sans doute froid, monsieur, dit madame Grandet, vous arrivez peut-être de …

      —Voilà bien les femmes! dit le vieux vigneron en quittant la lecture d'une lettre qu'il tenait à la main, laissez donc monsieur se reposer.

      —Mais, mon père, monsieur a peut-être besoin de quelque chose, dit

       Eugénie.

      —Il a une langue, répondit sévèrement le vigneron.

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