Observations grammaticales sur quelques articles du Dictionnaire du mauvais langage. Deplace Guy-Marie
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СКАЧАТЬ mine d'être méchant.

      Au lieu de ces singuliers raisonnemens, ne vaut-il pas mieux reconnoître que dans le cas dont nous parlons, comme dans tous les autres, l'adjectif se rapporte au substantif auquel il est joint et s'accorde avec lui? Et l'Académie ne consacre-t-elle pas ce principe, lorsque parlant en général et sans désigner le sujet, elle cite ces locutions: Avoir l'air guerrier, avoir l'air spirituel, avoir l'air hautain? Ne tranche-t-elle pas la question lorsqu'après ces exemples, elle ajoute encore ceci: «On dit avoir l'air bon, avoir l'air mauvais, pour dire avoir la mine d'un bon homme ou d'un méchant homme»? Est-il possible de ne pas voir que dans ces phrases, les mots bon, mauvais se rapportent nécessairement au substantif air exprimé, et non pas à un sujet dont l'infinitif avoir fait abstraction?

      IV

      Amateur. Ce mot a-t-il un féminin?.. Il me semble que l'analogie nous autorise à donner un féminin à ce mot. On dit une spectatrice, une actrice, une force créatrice… Il faut donc donner à amateur une inflexion féminine.

      En général, M. Molard ne reconnoît comme françois que les mots qui se trouvent dans l'Académie. N'étoit-il pas naturel d'appliquer ce principe en cette occasion? Pour décider la question qu'il propose ici, il suffit d'ouvrir le Dictionnaire qui fait autorité. Ce Dictionnaire n'admet que le masculin dans amateur, tandis qu'il donne un féminin à spectateur, à acteur, etc. Il faut donc s'en tenir là. Il me seroit facile de citer une multitude de mots qui ne sont pas françois, quoiqu'ils aient en leur faveur l'espèce d'analogie qu'invoque M. Molard. Les principes de l'analogie ne prouveront jamais que tels ou tels mots doivent exister dans une langue; ils ne servent qu'à indiquer la manière la plus régulière de les employer, en cas qu'on les adopte.

      V

      Balustre. Sorte de petit pilier façonné… Il ne faut pas confondre ce mot avec balustrade; celui-ci est un assemblage de balustres. Cependant l'Académie leur donne quelquefois la même signification.

      Le mot balustrade ne peut jamais signifier un seul pilier; mais balustre peut, quand on le veut, être employé pour balustrade. En ce sens, il est autorisé, non-seulement par l'Académie, mais encore par nos meilleurs écrivains. S'il falloit n'entendre par balustre qu'un pilier façonné, le dernier de ces vers de Boileau:

      Ici s'offre un perron; là, règne un corridor;

      Là, ce balcon s'enferme en un balustre d'or.2

      deviendroit absolument inintelligible.

      VI

      Benne. C'est une de ces expressions locales nécessaires, ou parce que l'invention des choses qu'elles désignent est de fraîche date, ou parce que l'instrument a une forme particulière.

      Benot. Dites, banneau.

      Benne, Benneau, Banneau, ne se trouvent point dans le Dictionnaire de l'Académie. Le Dictionnaire de Trévoux les admet tous les trois, et ne donne la préférence à aucun. Il les définit également: vaisseaux de bois qui servent à contenir les liquides, le blé, la vendange, la chaux, etc. Ces mots viennent du latin benna, qu'on retrouve dans Varron, et du diminutif benellus qu'employoient les écrivains du moyen âge.

      Benneau et benel signifioient aussi autrefois une espèce de chariot. Ces mots, pris dans les deux sens, sont très-anciens.

      VII

      Bretagne. Pièce de fonte qu'on applique au fond de la cheminée. Dites, plaque ou contre-mur.

      Contre-mur, pris dans le sens que lui donne ici M. Molard, n'est pas françois. Un contre-mur est un mur que l'on bâtit le long d'un autre, pour le conserver. On fortifie quelquefois le mur d'une terrasse par un contre-mur.

      VIII

      Broche de Bas. Petite verge de fer. Dites, aiguille, s. f.; aiguille de bas. Dans ce sens, broche et brocher ont vieilli.

      Broche est françois dans le sens que M. Molard indique. L'Académie ne dit point que ce mot ait vieilli.

      IX

      Caneçons. Sorte de culotte de toile ou de coton. Dites, caleçons, s. m. pl.; donnez-moi des caleçons. Ce mot s'emploie toujours au pluriel.

      M. Molard assujettit à la même règle les mots pincette et tenaille. L'Académie n'emploie caleçon qu'au singulier. Caleçon de toile; se mettre en caleçon; être en caleçon. Le Dictionnaire de Trévoux s'exprime de même, et ajoute seulement qu'on peut employer ce mot au pluriel. Quant aux mots pincette et tenaille, l'Académie cite des exemples du singulier comme du pluriel.

      X

      Capon, Caponner. Qui a peur. Ces deux mots ne sont pas françois. Dites, poltron, poltronner.

      Capon, Caponner sont françois, mais n'expriment pas l'idée qu'on y attache à Lyon. Un capon est un joueur rusé et fin, attentif à prendre toute sorte d'avantages aux jeux d'adresse. Caponner c'est user de ruse, d'adresse au jeu. Ces deux termes sont populaires.

      XI

      Carabasse. Vendre la carabasse; dites; découvrir le pot aux roses.

      Pour conserver la figure, on pourroit dire, ce me semble, vendre la calebasse. L'Académie n'autorise-t-elle pas cette locution en citant celle-ci: Frauder la calebasse?

      XII

      Carnier. Sac où l'on met le gibier; dites, carnacière, s. f.

      La troisième syllabe de ce mot ne prend pas un c; d'après l'Académie, il faut écrire carnassière.

      XIII

      Chaîne d'oignons. Acheter une chaîne d'oignons; dites, acheter une glane d'oignons.

      Une glane d'oignons et une chaîne d'oignons ne sont pas une même chose. Glane, à proprement parler, signifie une poignée d'épis que l'on ramasse après que les gerbes ont été emportées. C'est le substantif de glaner. Il se dit par extension des fruits, des légumes, etc. Ainsi une glane d'oignons signifie une poignée d'oignons. Le mot le plus propre à désigner ce que le peuple entend par une chaîne d'oignons, est chapelet d'oignons. Cette locution se trouve dans l'Académie.

      XIV

      Chauffe-lit. Bassin ayant un couvercle percé de plusieurs trous, et servant à chauffer le lit; dites, bassinoire. Par la même raison vous direz, bassiner, et non pas chauffer un lit.

      Chauffe-lit est une expression que l'on trouve dans nos anciens Dictionnaires. L'Académie ne l'admet pas. Le Dictionnaire de Trévoux le place au nombre des mots françois, et le définit ainsi: Ce qui sert à chauffer un lit, soit une bassinoire, un moine, ou СКАЧАТЬ



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Art poétique, chant premier.