A fond de cale. Reid Mayne
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Название: A fond de cale

Автор: Reid Mayne

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ et les navires qui se dirigeaient vers le port ou qui en sortaient, passaient au large pour éviter le récif. J'avais bien peu de chances d'être aperçu du rivage; peut-être moins encore de voir passer un bateau assez près de moi pour que je pusse m'y faire entendre.

      C'est avec une tristesse indicible que j'allai m'asseoir sur un quartier de roche, en attendant le sort qui m'était réservé.

      Toutefois je ne pensais pas rester sur cet écueil assez longtemps pour y mourir de faim. J'espérais qu'Henry, ne voyant pas revenir le canot, finirait par se mettre à ma recherche. À vrai dire, il ne rentrerait que le soir, et ne s'apercevrait de l'absence de son bateau qu'à la nuit close. Mais il saurait bien qui l'avait pris; j'étais le seul du village qui eût le privilége de s'en servir; dans son inquiétude Henry Blou irait jusqu'à la ferme, et ne me trouvant pas chez mon oncle, il était probable qu'il devinerait mon aventure, et saurait me retrouver.

      Cette pensée me rendit toute ma confiance, et dès qu'elle se fut emparée de mon esprit, je fus beaucoup moins troublé du péril de ma situation que du dommage dont mon imprudence avait été la cause. Je pâlissais rien que d'y songer: comment regarder en face mon ami Blou? Comment réparer la perte que j'avais faite! La chose était sérieuse; je ne possédais pas un farthing, et mon oncle payerait-il le canot? J'avais bien peur que non. Il fallait pourtant qu'on dédommageât le batelier de cette perte considérable; comment faire? Si mon oncle, pensais-je, voulait seulement me permettre de travailler pour Henry, je m'acquitterais de cette façon; mon ami Blou me retiendrait tant par semaine jusqu'à ce que le bateau fût payé, en supposant qu'il eût quelque chose à me faire faire.

      Je me mis à calculer approximativement ce que devait coûter un canot pareil à celui que j'avais perdu, et combien il me faudrait de temps pour me libérer de ma dette. Quant au reste, je ne pensais pas que ma vie fût en péril. Je m'attendais, il est vrai, à souffrir de la faim et du froid, à être plus ou moins mouillé, car je savais qu'à une certaine heure, la mer couvrait l'écueil; et il était certain que je passerais la nuit dans l'eau.

      Mais quelle serait sa profondeur?

      En aurais-je jusqu'aux genoux?

      Je cherchai un indice qui pût me faire découvrir quelle était la hauteur des marées ordinaires. Je savais que le rocher disparaissait entièrement; on voyait du rivage les flots rouler sur lui; mais j'étais persuadé avec beaucoup d'autres, que la mer le recouvrait seulement d'un ou deux décimètres.

      Je ne vis rien tout d'abord qui pût me renseigner sur ce que je voulais savoir; à la fin cependant mes yeux rencontrèrent le poteau qui supportait le signal; et je me dirigeai vers lui, bien certain d'y trouver ce que je cherchais; on y voyait une ligne circulaire, peinte en blanc, qui était sans doute une ligne d'eau; jugez de ma terreur quand je découvris que cette ligne était à deux mètres au-dessus du roc.

      Rendu à demi fou par cette découverte, je m'approchai du poteau, et levai les yeux; hélas! je ne m'étais pas trompé; la ligne blanche était bien loin au-dessus de ma tête; c'était tout ce que je pouvais faire, en me mettant sur la pointe des pieds, que d'y atteindre du bout des doigts.

      Un frisson d'horreur parcourut tous mes membres; le péril était trop clairement démontré: avant qu'on pût venir à mon secours, la marée couvrirait tout l'écueil; je serais balayé du récif, et englouti par les flots.

      CHAPITRE X

Escalade

      Ma vie n'était pas seulement en danger, la mort était presque certaine; l'espérance que j'avais eue d'être sauvé était détruite; la marée serait de retour avant le soir, dans quelques heures elle submergerait l'îlot, tout serait fini pour moi. On ne s'apercevrait de mon absence qu'après la fin du jour, et il serait trop tard: la marée n'attend pas.

      Un profond désespoir s'était emparé de mon âme, qu'il paralysait complétement. Je ne pouvais plus penser, je ne distinguais plus rien de ce qui m'environnait. Mes yeux étaient attachés sur la mer, et je regardais machinalement les vagues. De temps à autre la conscience se réveillait à demi, je tournais la tête, je cherchais à découvrir quelque voile se dirigeant de mon côté; mais rien n'interrompait la monotonie des flots, si ce n'est parfois un goëland qui revenait planer autour du récif, comme s'il avait été surpris de me voir à pareille place, et qu'il se fût demandé si je n'allais pas bientôt partir.

      Tout à coup mes yeux rencontrèrent le poteau dont l'examen avait causé ma stupeur, et cette fois en le voyant j'eus un rayon d'espoir. Je pouvais encore me sauver en grimpant à son sommet, et en m'installant sur la futaille jusqu'à la marée descendante. La mer n'arrivait pas à la moitié de ce poteau, et je n'aurais plus rien à craindre dès que je serais perché sur la barrique.

      Toute la question était d'y arriver; la chose me paraissait facile. Je grimpais bien à un arbre, pourquoi n'aurais-je pas escaladé le support de mon tonneau? Je passerais sur ma futaille une assez mauvaise nuit; mais je serais à l'abri de tout péril, et le lendemain matin, je me trouverais encore de ce monde, où je rirais de ma frayeur.

      Ranimé par cette espérance, je m'approchai du poteau avec l'intention d'y grimper; ce n'est pas que je voulusse m'établir à mon poste; il serait bien temps de le faire quand l'îlot serait inondé; mais je voulais être sûr de pouvoir accomplir mon escalade, au moment où il n'y aurait plus moyen de la différer.

      C'était beaucoup moins facile que je ne l'avais cru d'abord, surtout pour commencer; la partie inférieure du poteau était enduite, jusqu'à deux mètres au moins, de cette espèce de glu marine dont les rochers étaient couverts, et cet enduit le rendait aussi glissant que les mâts de cocagne que j'avais vus à la fête de notre village.

      Il me fallut échouer plusieurs fois avant de réussir à dépasser la ligne blanche; le reste fut plus aisé, et je ne tardai pas à être au bout du poteau. Arrivé là, je me félicitai d'être parvenu à mon but, et j'étendis la main pour saisir le bord de la futaille. Quelle amère déception!

      J'avais le bras trop court pour atteindre l'extrémité du tonneau; le bout de mes doigts n'arrivait qu'au ventre de la barrique, où je n'avais aucune prise, et il m'était impossible de gravir jusqu'au faîte.

      Je ne pouvais pas davantage garder ma position; mes forces ne tardèrent pas à s'épuiser, et l'instant d'après j'avais glissé malgré moi jusqu'en bas du poteau.

      Mes nouvelles tentatives ne furent pas plus heureuses; j'avais beau étendre les bras, étirer les jambes, faire mille et un efforts pour me hisser plus haut, je n'arrivais toujours qu'au milieu de la futaille; et comme le poteau n'offrait pas la moindre saillie, je me retrouvais sur le rocher plus vite que je ne voulais.

      Malgré cela, je ne cédai point au désespoir; l'approche du péril tenait au contraire mon esprit en éveil; et conservant tout mon sang-froid, je me mis à chercher ce qu'il y avait de mieux à faire.

      Si j'avais eu seulement un couteau, j'aurais pu entailler la pièce de bois, et poser les pieds sur les crans que j'y aurais faits; mais je n'avais pas même un canif, et à moins de ronger le poteau avec mes dents, il fallait renoncer à l'entamer. Vous voyez que ma position était critique.

      J'en étais là, quand une idée lumineuse me traversa l'esprit. Pourquoi ne ferais-je pas un tas de pierres à côté du poteau? Je pourrais l'élever jusqu'à la ligne blanche, monter dessus et m'y trouver sain et sauf. Quelques fragments de roche avaient été placés autour du signal pour en consolider la base; il ne me restait plus qu'à poser des galets sur cette première assise pour me bâtir un cairn9, dont la plate-forme me servirait de refuge.

      Ravi de ce nouvel expédient, je ne perdis pas une seconde, et je me mis en СКАЧАТЬ



<p>9</p>

Cairn, tas de pierres que les peuples du Nord élèvent sur la tombe de leurs chefs.