La Comédie humaine volume VI. Honore de Balzac
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Название: La Comédie humaine volume VI

Автор: Honore de Balzac

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ tu avoueras ainsi ta complicité.)

      Il se fit un moment de silence.

      – Les affaires temporelles de mademoiselle Gamard ne me concernent pas, dit enfin le prêtre en abaissant ses larges paupières sur ses yeux d'aigle pour voiler ses émotions. (Oh! oh! vous ne me compromettrez pas! Mais Dieu soit loué! les damnés avocats ne plaideront pas une affaire qui pouvait me salir. Que veulent donc les Listomère, pour se faire ainsi mes serviteurs?)

      – Monsieur, répondit la baronne, les affaires de monsieur Birotteau me sont aussi étrangères que vous le sont les intérêts de mademoiselle Gamard; mais malheureusement la religion peut souffrir de leurs débats, et je ne vois en vous qu'un médiateur, là où moi-même j'agis en conciliatrice… (Nous ne nous abuserons ni l'un ni l'autre, monsieur Troubert, pensait-elle. Sentez-vous le tour épigrammatique de cette réponse?)

      – La religion souffrir, madame! dit le grand-vicaire. La religion est trop haut située pour que les hommes puissent y porter atteinte. (La religion, c'est moi, pensait-il.) – Dieu nous jugera sans erreur, madame, ajouta-t-il, je ne reconnais que son tribunal.

      – Hé! bien, monsieur, répondit-elle, tâchons d'accorder les jugements des hommes avec les jugements de Dieu. (Oui, la religion, c'est toi.)

      L'abbé Troubert changea de ton: – Monsieur votre neveu n'est-il pas allé à Paris? (Vous avez eu là de mes nouvelles, pensait-il. Je puis vous écraser, vous qui m'avez méprisé. Vous venez capituler.)

      – Oui, monsieur, je vous remercie de l'intérêt que vous prenez à lui. Il retourne ce soir à Paris, il est mandé par le ministre, qui est parfait pour nous, et voudrait ne pas lui voir quitter le service. (Jésuite, tu ne nous écraseras pas, pensait-elle, et ta plaisanterie est comprise.) Un moment de silence. – Je ne trouve pas sa conduite convenable dans cette affaire, reprit-elle, mais il faut pardonner à un marin de ne pas se connaître en Droit. – (Faisons alliance, pensait-elle. Nous ne gagnerons rien à guerroyer.)

      Un léger sourire de l'abbé se perdit dans les plis de son visage: – Il nous aura rendu le service de nous apprendre la valeur de ces deux peintures, dit-il en regardant les tableaux, elles seront un bel ornement pour la chapelle de la Vierge. (Vous m'avez lancé une épigramme, pensait-il, en voici deux, nous sommes quittes, madame.)

      – Si vous les donniez à Saint-Gatien, je vous demanderais de me laisser offrir à l'église des cadres dignes du lieu et de l'œuvre. (Je voudrais bien te faire avouer que tu convoitais les meubles de Birotteau, pensait-elle.)

      – Elles ne m'appartiennent pas, dit le prêtre en se tenant toujours sur ses gardes.

      – Mais voici, dit madame de Listomère, un acte qui éteint toute discussion, et les rend à mademoiselle Gamard. Elle posa le désistement sur la table. (Voyez, monsieur, pensait-elle, combien j'ai de confiance en vous.) – Il est digne de vous, monsieur, ajouta-t-elle, digne de votre beau caractère, de réconcilier deux chrétiens; quoique je prenne maintenant peu d'intérêt à monsieur Birotteau…

      – Mais il est votre pensionnaire, dit-il en l'interrompant.

      – Non, monsieur, il n'est plus chez moi. (La pairie de mon beau-frère et le grade de mon neveu me font faire bien des lâchetés, pensait-elle.)

      L'abbé demeura impassible, mais son attitude calme était l'indice des émotions les plus violentes. Monsieur de Bourbonne avait seul deviné le secret de cette paix apparente. Le prêtre triomphait!

      – Pourquoi vous êtes-vous donc chargée de son désistement? demanda-t-il excité par un sentiment analogue à celui qui pousse une femme à se faire répéter des compliments.

      – Je n'ai pu me défendre d'un mouvement de compassion. Birotteau, dont le caractère faible doit vous être connu, m'a suppliée de voir mademoiselle Gamard, afin d'obtenir pour prix de sa renonciation à…

      L'abbé fronça ses sourcils.

      – … A des droits reconnus par des avocats distingués, le portrait…

      Le prêtre regarda madame de Listomère.

      – … Le portrait de Chapeloud, dit-elle en continuant. Je vous laisse le juge de sa prétention… (Tu serais condamné, si tu voulais plaider, pensait-elle.)

      L'accent que prit la baronne pour prononcer les mots avocats distingués fit voir au prêtre qu'elle connaissait le fort et le faible de l'ennemi. Madame de Listomère montra tant de talent à ce connaisseur émérite dans le cours de cette conversation qui se maintint long-temps sur ce ton, que l'abbé descendit chez mademoiselle Gamard pour aller chercher sa réponse à la transaction proposée.

      Il revint bientôt.

      – Madame, voici les paroles de la pauvre mourante: «Monsieur l'abbé Chapeloud m'a témoigné trop d'amitié, m'a-t-elle dit, pour que je me sépare de son portrait.» Quant à moi, reprit-il, s'il m'appartenait, je ne le céderais à personne. J'ai porté des sentiments trop constants au cher défunt pour ne pas me croire le droit de disputer son image à tout le monde.

      – Monsieur, ne nous brouillons pas pour une mauvaise peinture. (Je m'en moque autant que vous vous en moquez vous-même, pensait-elle.) – Gardez-la, nous en ferons faire une copie. Je m'applaudis d'avoir assoupi ce triste et déplorable procès, et j'y aurai personnellement gagné le plaisir de vous connaître. J'ai entendu parler de votre talent au wisth. Vous pardonnerez à une femme d'être curieuse, dit-elle en souriant. Si vous vouliez venir jouer quelquefois chez moi, vous ne pouvez pas douter de l'accueil que vous y recevrez.

      Troubert se caressa le menton.

      (Il est pris! Bourbonne avait raison, pensait-elle, il a sa dose de vanité.)

      En effet, le grand-vicaire éprouvait en ce moment la sensation délicieuse contre laquelle Mirabeau ne savait pas se défendre, quand, aux jours de sa puissance, il voyait ouvrir devant sa voiture la porte cochère d'un hôtel autrefois fermé pour lui.

      – Madame, répondit-il, j'ai de trop grandes occupations pour aller dans le monde; mais pour vous, que ne ferait-on pas? (La vieille fille va crever, j'entamerai les Listomère, et les servirai s'il me servent! pensait-il. Il vaut mieux les avoir pour amis que pour ennemis.)

      Madame de Listomère retourna chez elle, espérant que l'archevêque consommerait une œuvre de paix si heureusement commencée. Mais Birotteau ne devait pas même profiter de son désistement. Madame de Listomère apprit le lendemain la mort de mademoiselle Gamard. Le testament de la vieille fille ouvert, personne ne fut surpris en apprenant qu'elle avait fait l'abbé Troubert son légataire universel. Sa fortune fut estimée à cent mille écus. Le vicaire-général envoya deux billets d'invitation pour le service et le convoi de son amie chez madame de Listomère: l'un pour elle, l'autre pour son neveu.

      – Il faut y aller, dit-elle.

      – Ça ne veut pas dire autre chose, s'écria monsieur de Bourbonne. C'est une épreuve par laquelle monseigneur Troubert veut vous juger. Baron, allez jusqu'au cimetière, ajouta-t-il en se tournant vers le lieutenant de vaisseau qui, pour son malheur, n'avait pas quitté Tours.

      Le service eut lieu, et fut d'une grande magnificence ecclésiastique. Une seule personne y pleura. Ce fut Birotteau, qui, seul dans une chapelle écartée, et sans être vu, se crut coupable de cette mort, et pria sincèrement pour l'âme de la défunte, СКАЧАТЬ