La Chèvre d'Or. Paul Arene
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Название: La Chèvre d'Or

Автор: Paul Arene

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ parapet en bâtisse qui va diminuant, suivant la pente du toit dallé, de façon qu'à l'extrémité de la pente on puisse s'accouder pour voir le paysage et que, sur les trois autres faces, on trouve toujours un coin d'ombre fraîche en été, un coin de soleil en hiver.

      Perché comme un guetteur, je pourrais au loin voir passer patron Ruf et sa voile blanche.

      Un ruisseau chante sous la tour. Des sources invisibles, filtrant au pied du rocher, l'alimentent. Mais à cent mètres, le ruisseau cesse de luire dans le lit pierreux du vallon, tari tout de suite qu'il est par les saignées qu'y pratiquent les propriétaires d'une infinité de jardinets dont les muraillettes en pierre sèche vont dégringolant la montagne.

      Ici on se rend très bien compte, topographiquement, de l'histoire du Puget-Maure.

      Au temps jadis, avant les défrichements et les cultures, l'eau des sources devait descendre abondante jusqu'à la mer; et l'aride calanque d'Aygues-Sèches servait alors d'aiguade aux marins.

      Peut-être les Phéniciens et puis les Grecs eurent-ils là un petit port? Mais à coup sûr les Sarrasins connurent la plage et y abritèrent leurs barques légères. Plus tard seulement ils montèrent et s'établirent au Puget demeuré tel qu'ils l'ont bâti, avec ses rues en escaliers où les maisons penchantes s'entre-baiseraient si, de loin en loin, une voûte, un arceau n'y mettaient bon ordre.

      Gardent-ils quelque vague souvenir de leur origine, ces hommes qui, là-bas, leur travail fini, devant la vieille maison commune, contemplent obstinément, dans l'espérance de je ne sais quoi qui doit venir, la mer, le chemin bleu de l'antique patrie oubliée?

      Un «Monsieur! hé! Monsieur!» interrompt mes réflexions archéologiques.

      C'est Saladine inquiète, affairée, qui s'avance vers moi, se retournant pour voir si quelqu'un ne la suit pas.

      Pourquoi ces airs mystérieux, et que peut bien me vouloir Saladine?

      XI

      CLAVETTE ET CLOCHETTE

      Il paraît qu'en rangeant le léger bagage rapporté du Bacchus navigateur par Ganteaume, Mlle Norette s'est montrée fort surprise de découvrir, au milieu de mes livres et de mes papiers, la fameuse clavette en ivoire.

      Elle a interrogé Ganteaume qui ne lui a rien appris sinon que la clavette m'appartenait. Maintenant elle voudrait savoir comment cette clavette est arrivée dans mes mains.

      Je raconte alors très simplement à Saladine la rencontre que j'eus de l'étonnante chèvre jaune qui me fit tant courir tout le long du vallon, il y a trois jours, le soir même de mon arrivée.

      – «Mais c'est Jeanne que vous avez rencontrée!

      – Jeanne?

      – Oui, Misé Jano, la chèvre de Mlle Norette, notre chèvre, qui précisément, ce jour-là, après avoir, tant elle est malicieuse, arraché avec ses cornes le piquet qui l'attache au pré, rentra, son collier de travers, prêt à tomber, la lanière pendante, ayant perdu clavette et clochette. Voilà bien maintenant la clavette, mais c'est la clochette qu'il faudrait. Mlle Norette a pleuré, et M. Honnorat, s'il apprend cela, risque d'en faire une maladie… Une clochette en argent, monsieur, que, depuis des cents et cents ans, les Gazan ont dans leur famille? Si vous vous rappeliez l'endroit? on pourrait, des fois, la retrouver…»

      Alors, à son tour, timidement, Mlle Norette, qui attendait dans l'escalier le résultat de l'ambassade, s'est approchée.

      – «Surtout, monsieur, je vous en prie, que mon père n'en sache rien.»

      La nuit tombait. J'ai promis de retourner au vallon dès l'aube première pour essayer de reconnaître le buisson que traversait la chèvre, quand, dans la nuit, il me sembla entendre quelque chose tinter.

      Et ce matin je suis retourné au vallon. Singulier prélude à mes travaux savants que cette recherche d'une clochette égarée!

      Heureusement le bloc de porphyre rouge sur lequel s'est un instant posée la chèvre pourra servir à me guider.

      Voici bien le buisson, l'endroit où tomba la clavette, et, en bas d'une pente rocheuse, polie au passage des paysans et de leurs bêtes, le trou d'eau où la clavette a dû rouler.

      Quelque chose de blanc tremblait au fond: c'était la clochette.

      Je l'ai retirée ruisselante, et tout de suite j'ai compris l'importance que M. Honnorat et Mlle Norette attachaient à sa possession.

      Cette clochette, curieusement ouvragée dans le goût sarrasin, portait, en ourlet sur l'extrême bord, une manière d'arabesque que je pris d'abord pour un pur caprice ornemental, mais qui, plus attentivement examinée, me parut constituer une étrange inscription en grec très ancien mêlé de caractères coufiques.

      Le tout me parut rentrer avec un singulier à propos dans le cadre de mes études.

      Je songeais donc à transcrire l'inscription, me réservant, car je m'entends un peu en cryptographie, de la déchiffrer à loisir, quand Mlle Norette est arrivée. Sa chèvre jaune la suivait, pareille d'ailleurs à toutes les chèvres et nullement fantastique au grand jour.

      Mlle Norette m'a repris la clochette, riant et me remerciant; elle l'a suspendue au cou de Misé Jano qui aussitôt s'est mise à courir devant sa maîtresse vers le village.

      M. Honnorat grondait lorsque nous rentrâmes.

      – «Est-ce raisonnable, Norette, de fier ainsi cette clochette d'argent à la chèvre? Un jour ou l'autre tu peux la perdre!

      – Tu vois bien, père, qu'elle n'est pas perdue.

      – Sans doute! mais des gens l'ont vue. Cela fait toujours parler les gens.»

      Et, de sa voix doucement entêtée:

      – «J'aime assez faire parler les gens!» disait Norette.

      XII

      PANIER DE SOUHAITS

      Cette aventure a établi tout de suite une sorte de complicité entre Mlle Norette et moi.

      Mlle Norette veut, accompagnée de Ganteaume qui ne la quitte plus d'un pas, me faire visiter de fond en comble, d'abord ma tour, décidément bien sarrasine, puis le château proprement dit, curieux encore quoique moins ancien.

      Un petit logis Renaissance, mais bâti sur le plan des maisons arabes. De sorte que l'on s'étonne comme d'un anachronisme, en découvrant au plafond de l'escalier, presque méconnaissables déjà sous les couches de chaux superposées, quelques naïfs bas-reliefs inspirés de l'Iliade: un Agamemnon portant la toque du roi François, une dame que, sans le nom de Briséis inscrit sur une banderole, je prendrais pour Diane de Poitiers.

      En revanche la cour a gardé un caractère oriental des plus purs, avec son puits à margelle basse, ses niches creusées dans le mur pour servir d'étagères, le double rang de galeries par où s'éclairent les chambres sans ouvertures sur la rue, et l'énorme vigne centenaire qui, jaillissant d'un angle du sol carrelé, la recouvre presque tout entière de ses bras tortueux et noirs, de ses pampres chargés de grappes dans lesquels à midi des pigeons roucoulent.

      L'intérieur est un vrai musée.

      Sans compter quelques СКАЧАТЬ