Fables. Jean de la Fontaine
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Название: Fables

Автор: Jean de la Fontaine

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ il composa notre espèce; il fit cet ouvrage qu’on appelle «le petit monde». Ainsi ces fables sont un tableau où chacun de nous se trouve dépeint. Ce qu’elles nous représentent confirme les personnes d’âge avancé dans les connaissances que l’usage leur a données, et apprend aux enfants ce qu’il faut qu’ils sachent. Comme ces derniers sont nouveaux venus dans le monde, ils n’en connaissent pas encore les habitants, ils ne se connaissent pas eux-mêmes. On ne les doit laisser dans cette ignorance que le moins qu’on peut; il leur faut apprendre ce que C’est qu’un lion, un renard, ainsi du reste; et pourquoi l’on compare quelquefois un homme à ce renard ou à ce lion. C’est à quoi les fables travaillent; les premières notions de ces choses proviennent d’elles.

      J’ai déjà passé la longueur ordinaire des préfaces, cependant je n’ai pas encore rendu raison de la conduite de mon ouvrage. L’apologue est composé de deux parties, dont on peut appeler l’une le corps, l’autre l’âme. Le corps est la fable; l’âme, la moralité. Aristote n’admet dans la fable que les animaux; il en exclut les hommes et les plantes. Cette règle est moins de nécessité que de bienséance, puisque ni Ésope, ni Phèdre, ni aucun des fabulistes, ne l’a gardée: tout au contraire de la moralité, dont aucun ne se dispense. Que s’il m’est arrivé de le faire, ce n’a été que dans les endroits où elle n’a pu entrer avec grâce, et où il est aisé au lecteur de la suppléer. On ne considère en France que ce qui plaît; c’est la grande règle, et pour ainsi dire la seule. Je n’ai donc pas cru que ce fût un crime de passer par-dessus les anciennes coutumes lorsque je ne pouvais les mettre en usage sans leur faire tort. Du temps d’Ésope, la fable était contée simplement, la moralité séparée, et toujours en suite. Phèdre est venu, qui ne s’est pas assujetti à cet ordre: il embellit la narration, et transporte quelquefois la moralité de la fin au commencement. Quand il serait nécessaire de lui trouver place, je ne manque à ce précepte que pour en observer un qui n’est pas moins important. C’est Horace qui nous le donne. Cet auteur ne veut pas qu’un écrivain s’opiniâtre contre l’incapacité de son esprit, ni contre celle de sa matière. Jamais, à ce qu’il prétend, un homme qui veut réussir n’en vient jusque-là; il abandonne les choses dont il voit bien qu’il ne saurait rien faire de bon:

Et quœDesperat tractata nitescere posse, relinquit.

      C’est ce que j’ai fait à l’égard de quelques moralités, du succès desquelles je n’ai pas bien espéré.

      Il ne reste plus qu’à parler de la vie d’Ésope. Je ne vois presque personne qui ne tienne pour fabuleuse celle que Planude nous a laissée. On s’imagine que cet auteur a voulu donner à son héros un caractère et des aventures qui répondissent à ses fables. Cela m’a paru d’abord spécieux; mais j’ai trouvé à la fin peu de certitude en cette critique. Elle est en partie fondée sur ce qui se passe entre Xantus et Ésope; on y trouve trop de niaiseries, et qui est le sage à qui de pareilles choses n’arrivent point? Toute la vie de Socrate n’a pas été sérieuse. Ce qui me confirme en mon sentiment, c’est que le caractère que Planude donne à Ésope est semblable à celui que Plutarque lui a donné dans son Banquet des sept Sages, c’est-à-dire d’un homme subtil, et qui ne laisse rien passer. On me dira que le Banquet des sept Sages est aussi une invention. Il est aisé de douter de tout: quant à moi, je ne vois pas bien pourquoi Plutarque aurait voulu imposer à la postérité dans ce traité-là, lui qui fait profession d’être véritable partout ailleurs, et de conserver à chacun son caractère. Quand cela serait, je ne saurais que mentir sur la foi d’autrui: me croira-t-on moins que si je m’arrête à la mienne? Car ce que je puis est de composer un tissu de mes conjectures, lequel j’intitulerai: Vie d’Ésope. Quelque vraisemblable que je le rende, on ne s’y assurera pas, et, fable pour fable, le lecteur préférera toujours celle de Planude à la mienne.

      A Monseigneur le Dauphin

      Je chante les héros dont Ésope est le père,

      Troupe de qui l’histoire, encor que mensongère,

      Contient des vérités qui servent de leçons.

      Tout parle en mon ouvrage, et même les poissons:

      Ce qu’ils disent s’adresse à tous tant que nous sommes;

      Je me sers d’animaux pour instruire les hommes.

      Illustre rejeton d’un prince aimé des cieux,

      Sur qui le monde entier a maintenant les yeux,

      Et qui faisant fléchir les plus superbes têtes,

      Comptera désormais ses jours par ses conquêtes,

      Quelque autre te dira d’une plus forte voix

      Les faits de tes aïeux et les vertus des rois.

      Je vais t’entretenir de moindres aventures,

      Te tracer en ces vers de légères peintures;

      Et si de t’agréer je n’emporte le prix,

      J’aurai du moins l’honneur de l’avoir entrepris.

      La Cigale et la Fourmi

      La cigale, ayant chanté

      Tout l’été,

      Se trouva fort dépourvue

      Quand la bise fut venue.

      Pas un seul petit morceau

      De mouche ou de vermisseau

      Elle alla crier famine

      Chez la fourmi sa voisine,

      La priant de lui prêter

      Quelque grain pour subsister

      Jusqu’à la saison nouvelle

      «Je vous paierai, lui dit-elle,

      Avant l’oût, foi d’animal,

      Intérêt et principal.»

      La fourmi n’est pas prêteuse;

      C’est là son moindre défaut.

      «Que faisiez-vous au temps chaud?

      Dit-elle à cette emprunteuse.

      – Nuit et jour à tout venant

      Je chantais, ne vous déplaise.

      – Vous chantiez? j’en suis fort aise.

      Eh bien: dansez maintenant.»

      Le Corbeau et le Renard

      Maître corbeau, sur un arbre perché

      Tenait en son bec un fromage.

      Maître renard par l’odeur alléché

      Lui tint à peu près ce langage:

      «Hé! bonjour Monsieur du Corbeau

      Que vous êtes joli! que vous me semblez beau!

      Sans mentir, si votre ramage

      Se rapporte à votre plumage

      Vous êtes le phénix des hôtes de ces bois»

      A ces mots le corbeau ne se sent pas de joie

      Et pour montrer sa belle voix

      Il ouvre un large bec laisse tomber sa proie.

      Le renard s’en saisit et dit: «Mon bon Monsieur

      Apprenez que tout flatteur

      Vit aux dépens de celui qui l’écoute:

      Cette leçon vaut bien un fromage sans doute.»

      Le corbeau honteux et confus

      Jura mais un peu tard, qu’on ne l’y prendrait plus.

      La grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf

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