Название: Le corsaire rouge
Автор: James Fenimore Cooper
Издательство: Bookwire
Жанр: Языкознание
isbn: 4064066319045
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–On nous a toujours appelés Homespun.
–Sir Hector Homespun! voilà un nom qui résonnera aussi bien qu’un autre; mais pour vous assurer ces récompenses, mon ami, il faut beaucoup de discrétion. J’admire votre perspicacité, et je me rends à vos arguments invincibles; vous avez démontré d’une manière si palpable la justesse de vos soupçons, que je suis aussi certain que ce vaisseau est le Corsaire, que je le suis de vous voir bientôt porter des éperons, et de vous entendre appeler sir Hector: ce sont deux faits également bien établis dans mon esprit; mais il est nécessaire que dans cette occasion nous agissions avec prudence. Je vous ai entendu dire que vous n’aviez communiqué à personne le résultat de vos lumineuses observations.
–A âme qui vive. Tape lui-même est prêt à jurer que les gens de l’équipage sont d’honnêtes négriers.
–A merveille. Il faut d’abord que nous soyons bien sûrs de nos conclusions, et alors nous songerons à la récompense. Venez me trouver ce soir, à onze heures, là-bas, à ce point peu élevé où la terre s’avance dans le havre extérieur; de là nous ferons nos observations, et tous nos doutes une fois éclaircis, nous parlerons demain matin, et nos paroles retentiront depuis la colonie de la Baie jusqu’aux établissements d’Oglethorpe. Jusque-là séparons-nous, car il n’est pas bon qu’on nous voie plus longtemps conférer ensemble. Souvenez-vous bien de mes recommandations. Silence, exactitude et faveur du roi, voilà notre mot d’ordre
–Adieu, honorable gentilhomme, dit le tailleur en faisant un salut jusqu’à terre, tandis que son compagnon portait légèrement la main à son chapeau,
–Adieu, sir Hector, répondit l’étranger en vert avec un sourire affable et en lui faisant un gracieux salut de la main. Il remonta alors lentement le quai, et disparut derrière le manoir des Homespun, laissant le chef de cette ancienne famille, comme beaucoup de ses ancêtres et sans doute de ses descendants, tellement absorbé par le sentiment de sa grandeur future, et si aveuglé par sa folie, que, quoique physiquement il vît à gauche et à droite aussi bien que jamais, les yeux de son âme étaient complétement obscurcis par les fumées de l’ambition.
CHAPITRE III.
ALONZO: Bon contre-maître, prenez garde.
SHAKSPEARE. La Tempête.
A peine l’étranger eut-il quitté le crédule tailleur, que sa figure perdit son expression empruntée pour en prendre une plus calme et plus naturelle. Néanmoins il semblait que la réflexion n’était pour lui ni une habitude ni un plaisir, car, donnant plusieurs coups de badine sur sa botte, il entra dans la principale rue de la ville d’un pas léger et d’un air distrait. Malgré cette distraction apparente, il ne laissait passer presque personne que son coup d’œil rapide n’eût passé en revue; et il était évident, d’après l’empressement qu’il mettait à tout examiner, que son esprit n’était pas moins actif que son corps. Un étranger dans cet équipage, portant sur sa personne tant de preuves qu’il venait de faire une longue route, ne manqua pas d’attirer l’attention des aubergistes prévoyants dont nous avons eu occasion de parler dans notre premici chapitre. Sourd aux politesses empressées de ceux qui étaient le plus en vogue, il s’arrêta, par une bizarrerie assez singulière, chez celui dont la maison était le rendez-vous ordinaire de tous les oisifs du port.
En entrant dans la salle commune de cette taverne, comme on l’appelait, quoiqu’il fût probable que dans la mère-patrie ses prétentions se seraient bornées à l’humble nom de cabaret, il trouva la chambre hospitalière remplie de ses pratiques accoutumées. L’arrivée d’un hôte qui, par son air et son habillement, semblait au-dessus de ceux qui fréquentaient habituellement la maison, causa une légère interruption; mais ce mouvement cessa dès que l’étranger se fut jeté sur un banc et eut dit à l’aubergiste ce qu’il voulait. Celui-ci, en le servant, crut devoir faire quelques excuses, qu’il destinait en même temps à celles de ses pratiques qui se trouvaient à portée de l’entendre, sur la manière dont un individu placé à l’extrémité de la salle, longue et étroite, accaparait non-seulement la conversation, mais semblait même forcer tous ceux qui l’entouraient à écouter ses récits de quelque histoire surprenante.
–C’est le contre-maître du négrier qui est dans le havre extérieur, Monsieur, ajouta le digne élève de Bacchus, un homme qui a passé sur l’eau plus d’un jour, et qui a vu des choses merveilleuses, assez pour en remplir un volume. On l’appelle le vieux Borée, quoique son nom légitime soit Jack Nightingale. Le toddy est-il au goût du squire?
L’étranger passa sa langue sur ses lèvres, et fit un geste affirmatif en remettant sur la table la liqueur à laquelle il avait à peine touché. Il tourna alors la tête pour examiner celui qui, à la manière dont il pérorait, aurait pu être appelé, dans le langage du pays, le second «orateur du jour.»
Une taille qui excédait de beaucoup six pieds, d’énormes moustaches qui cachaient entièrement la moitié de sa sombre figure, une balafre, reste indélébile d’une profonde blessure qui avait menacé de subdiviser cette moitié en plusieurs parties; des membres en proportion, le tout rendu plus frappant encore par le costume du marin; une longue chaîne d’argent ternie, et un petit sifflet de même métal, servaient à rendre l’individu en question assez remarquable. Sans paraître faire la moindre attention à l’entrée d’un homme si fort au-dessus de la classe de ses auditeurs ordinaires, ce fils de l’Océan continua son récit en ces termes et d’une voix qui semblait lui avoir été donnée par la nature comme pour contraster avec son nom harmonieux, et même ses accents avaient tant de rapport avec les beuglements sourds d’un taureau qu’il fallait que l’oreille y fût habituée pour entendre un jargon aussi étrange.
–Eh bien! dit-il en étendant son bras vigoureux et tenant le poing fermé, le pouce seulement levé pour indiquer le point nécessaire de la boussole, la côte de Guinée pouvait être ici, et le vent venait de cet endroit, soufflant par bouffées, comme si le matois qui le tient dans une outre pour l’usage de nous autres marins le laissait tantôt passer à travers ses doigts, et tantôt refermait l’outre avec grand soin en y faisant un double nœud.–Vous savez ce que c’est qu’une outre, camarade?
Cette brusque question était adressée au campagnard ébahi, que le lecteur connaît déjà, et qui, portant sous le bras l’ajustement que venait de lui remettre le tailleur, s’était amusé en route pour écouter l’histoire du contre-maître, et l’ajouter à la provision d’anecdotes dont il se promettait de régaler ses amis dans son village. Un rire général retentit dans la salle aux dépens de l’honnête Pardon. Nightingale lança un regard significatif à un ou deux de ses intimes, et profitant de l’occasion pour se rafraîchir le palais en avalant une pinte de rhum et d’eau, il continua son récit en disant d’un ton en quelque sorte d’admonition:
–Et il peut venir un temps, mon ami, où vous saurez aussi ce que c’est qu’un double nœud, si vous ne tenez pas votre honnêteté à deux mains. Le cou d’un homme a été fait, camarade, pour tenir sa tête hors de l’eau, et non pour être tendu comme un câble qu’on tire à force de bras. Ainsi donc, ayez soin que tous vos comptes soient réglés à temps, et que la conscience sonde l’eau lorsque vous vous sentez poussé contre les écueils de la tentation. Alors roulant son tabac dans sa bouche, et regardant autour de lui de l’air satisfait d’un homme qui venait de remplir un devoir moral il continua:
–Ainsi donc la terre était ici, et, comme je le disais, le vent était СКАЧАТЬ