Название: Le Juge Et Les Sorcières
Автор: Guido Pagliarino
Издательство: Tektime S.r.l.s.
Жанр: Эзотерика
isbn: 9788885356566
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Le sbire me conduisit directement au presbytère. Un jeune prêtre nous accueillit et sursauta quand je mâannonçai. « Le curé vient à peine de se confesser, et il est encore lucide », me dit-il, dâune voix ténue, en me conduisant par les escaliers vers la chambre du supérieur : « Je lui ai déjà administré lâEucharistie et lâExtrême Onction et il en semble réconforté, car il a retrouvé une voix plus forte et une expression plus claire. »
Le rétablissement qui, souvent, précède la mort, pensai-je spontanément ; et je me troublai soudain : en bon chrétien, jâacceptais de bonne foi le pouvoir thaumaturgique de lâHuile Sainte ; pourquoi donc cette pensée blasphématoire me traversa-t-elle ? Il nây avait pas de doute, ce devait certainement être le diable. Sans doute voulait-il mâempêcher de mâadresser au curé ? Je fis le Signe de Croix et commençai de prier, au moment même où je mâapprochai du mourant, imité par le jeune prêtre et par la garde, qui était montée derrière nous. Ils pensèrent sans aucun doute à une oraison à lâintention de ce moribond, ce que dâailleurs, je partageais aussi.
La chambre, très petite, était misérablement aménagée, une planche monacale, quelques étagères en bois brut pour les livres et, comme grabat, trois traverses recouvertes de paille posées sur des chevalets. La pièce était à peine éclairée par deux bougies.
Lâarchiprêtre semblait assoupi ; mais au son de nos prières il ouvrit les yeux et se tourna vers moi, en exprimant un soulagement suivi dâun gémissement.
âCâest le ciliceâ, murmura le jeune prêtre, lâoraison à peine terminée, « il le porte depuis de nombreuses années et il nâa pas voulu que je lâen débarrasse, même maintenant. »
âLaissez-nous seuls et éloignez-vousâ, intimai-je. « Toi aussi », adressai-je au sbire : « Il nâest pas question que nous retournions aujourdâhui. Je me reposerai ici. Viens mâattendre à lâaube ; sollicite la sainte autorisation du bourgmestre, en mon nom. »
Une fois seuls, le prêtre me fit signe dâapprocher la planche de sa couche.
A peine à ses côtés, il se mit à me parler; et tandis que ses mots sortaient progressivement de sa bouche, moi, jâouvrais la mienne toujours plus.
Il me raconta à propos dâElvira, contre qui il avait témoigné quelques années auparavant.
La femme, encore jeune, après de nombreux malheurs, avait fini par arriver à Benevento, repaire fameux de sorcières autour duquel, comme lâavait raconté le démonologue Spina dans son traité, elles se réunissaient sous un noyer à perpétrer des choses horribles et à en concocter de nouvelles. Sa mère avait été lâune dâentre elles. Jâétais au courant à propos de cette sorcière pour avoir lu le livre du docte dominicain. Elle se trouvait perchée tel un vautour sur une branche du noyer, les jambes écartées, quand, passant par-là , solitaire, un jeune marchand, bossu mais sublimement fait et dâun parler très noble, et voyant la sorcière, femme pour le reste très belle mais néanmoins plus très jeune, attiré par les appâts génitaux quâelle exhibait, entama une conversation lascive. Elle aussi lâavait aussitôt désiré sexuellement, mais de désirs démoniaques les plus bestiaux et contre-nature, et lui avait promis de lui ôter la bosse, définitivement, sâil acceptait de la satisfaire. Câest ce qui arriva. Ãtant plus tard de passage à Benevento, à lâauberge, après de nombreuses beuveries, le marchant, le visage rougi de tant de béatitude, peu avant de sâen aller, avait raconté le fait aux autres hôtes, leur montrant lâéchine à plusieurs reprises, se tournant par-ci puis par-là pour que chacun pût bien la voir, et jurant à tous quâavant la luxurieuse rencontre avec la mégère, son dos était beaucoup plus gibbeux. Ensuite il sâéloigna, en riant, vers son destin inconnu sans pouvoir être interrogé au préalable par les autorités. Il ne fut donc pas possible de connaître les méfaits de la chipie libidineuse pour lâappréhender et la juger. Dâailleurs, un forgeron, lui aussi boscot, ayant prestement retrouvé la voix, sâétait rendu au pied du noyer en espérant y trouver la belle harpie et de connaître aussi bien lâextase suprême dont lâautre sâétait vanté que, et surtout, lâablation définitive de sa protubérance. Elle sây trouvait, mais lâhomme était tellement vilain et avait lâhaleine tellement vineuse de trop de boissons que la sorcière, irritée, non seulement nâavait pas forniqué avec lui, mais, plutôt que de lui enlever la bosse, elle y avait appendu celle de lâautre. Arrivé à la place du village, bouleversé, le pauvre artisan avait relaté sa mésaventure aux témoins. Selon certains dâentre eux, le renflement avait doublé ; selon dâautres, elle nâavait grossi que de peu ; pour dâautres encore, qui selon Spina cependant, nâavaient lâintention que de consoler la victime et non de rendre la vérité, la proéminence nâavait pas changé. Deux pandores communaux sur le seuil de la mairie avaient tout entendu et immédiatement arrêtèrent le témoin. Peu après, lâenquêteur local avait obtenu du forgeron, la description physique de la sorcière, et, connaissant tous les autres villageois, était parvenu à lâidentifier comme une certaine guérisseuse et sage-femme miteuse. Câest ainsi que celle-ci fut arrêtée peu de temps après dans sa maison par les gendarmes communaux : comme lâenquêteur le soupçonnait, de par sa faculté à pouvoir voler, comme toutes ses semblables, elle devait avoir atterri à Benevenuto avant même que le pauvre malade nây fût arrivé. Il ressortait du traité de Spina que la rombière, célibataire, avait une fille, sans aucun doute le fruit, selon lâintuition instantanée des tous, de son accouplement avec le diable, mais qui malheureusement nâavait pu être appréhendée. Jâappris du prêtre quelle nâétait pas chez elle au moment de lâarrestation de la mère et, quâau retour, elle avait été vue et saisie de force dans sa propre boutique par le jeune tailleur du village, un judéen mal vu de tous et souvent insulté et qui, solidaire de tous les persécutés, mais aussi parce que cela faisait longtemps quâil était fasciné par la beauté du tendron, lâavait cachée. Dans son laboratoire, Elvira avait dû souffrir les cris horribles de sa mère torturée dans le tribunal tout proche, laquelle, après seulement deux jours, avait été condamnée et, pour calmer la plèbe tumultueuse, tout de suite brûlée, sans étranglement préalable afin que le peuple appréciât mieux le verdict prononcé, en se délectant de ses hurlements. Il était soir et, profitant de lâassoupissement des villageois excités devant le bûcher et, surtout, amoureusement attiré par la jouvencelle en herbe, il avait préféré lui aussi sâéloigner de Benevento. De loin, Elvira avait vu sa mère se consumer et entendu ses dernières vociférations stridentes. Ils avaient vécu ensemble comme des couche-dehors, lui en coupant des habits de village en village, elle en vendant une liqueur couleur paille, dâun goût exquis affirmait le curé pour y avoir goûté à maintes reprises, et dont elle tenait la recette de sa mère. Tout cela, elle lâavait ensuite raconté à lâarchiprêtre à qui elle sâétait finalement liée, dont elle devint enceinte et après de nombreuses péripéties, lui demanda un asile temporaire : elle avait à peine échappé à un repaire de brigands où elle était gardée en esclave pendant des années puisque câétait dans la rue quâils СКАЧАТЬ