Название: Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 4 - (C suite)
Автор: Eugene-Emmanuel Viollet-le-Duc
Издательство: Public Domain
Жанр: Техническая литература
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Un tracé très-simple fera comprendre l'application des deux méthodes. Soit (40) une voûte dont la résultante des poussées est la ligne AB, nous pouvons établir une construction telle que la donne notre tracé. En supposant les pierres CD d'un seul morceau chacune, résistantes et engagées à la queue sous le contre-fort, cette construction sera plus solide que si nous avions élevé une pile de fond EA sous les sommiers de la voûte. Dans ce figuré, nous profitons des effets de la poussée AB, nous la soutirons suivant sa direction. L'arc-boutant G et son massif ne sont là que pour empêcher la voûte de s'écarter suivant une ligne horizontale. Remarquons, en passant, que l'arc-boutant ne charge pas la pile X et qu'il ne fait que contre-presser la voûte au point où la courbe des pressions tend à sortir de l'extrados des voussoirs. C'est la méthode contenant les effets de la poussée, mais s'en servant comme d'un élément d'équilibre. Soit maintenant (40 bis) une voûte dont la résultante des poussées est la ligne AB. Si, au lieu d'un arc-boutant, nous opposons à la poussée AB une poussée moins puissante CD, et que nous placions un poids E en charge sur les sommiers des deux voûtes, nous réduisons les poussées obliques en une pesanteur verticale, nous en prévenons les effets, elles n'agissent pas. C'est ce que nous appelons la méthode préventive.
Il y a donc ceci de très-subtil dans ces constructions: 1º que l'arc-boutant est simplement un obstacle opposé, non point aux pressions obliques, mais à leurs effets, si l'équilibre venait à se déranger; 2º qu'il permet au constructeur de profiter de ces pressions obliques dans son système général, sans craindre de voir l'économie de ce système dérangée par un commencement d'action en dehors de l'équilibre. Mais toute l'attention des constructeurs, par cela même, se porte sur la parfaite stabilité des contre-forts recevant les poussées des arcs-boutants, car l'équilibre des forces des diverses parties de l'édifice dépend de la stabilité des culées extérieures. Cependant les architectes ne veulent ou ne peuvent souvent donner à ces culées une épaisseur suffisante en raison de leur hauteur; il faut donc les rendre fixes par des moyens factices. Nous avons un exemple de l'emploi de ces moyens dans l'église même de Saint-Remy de Reims, plus franchement accusé encore dans le choeur de l'église de Notre-Dame de Châlons, auquel nous revenons.
Nous présentons d'abord (41) le plan d'une travée de cette abside, en A à rez-de-chaussée, en B à la hauteur de la galerie voûtée du premier étage, en C à la hauteur du triforium et en D à la hauteur des naissances des voûtes. On voit, sur le plan du rez-de-chaussée, comment l'architecte s'est épargné l'embarras de construire une voûte en arcs d'ogive sur un trapèze. Il a posé à l'entrée des chapelles des colonnes E qui lui ont permis de tracer une voûte EFG sur un parallélogramme. Dès lors, l'arc doubleau EH est semblable, comme hauteur et ouverture, à l'arc doubleau FI, et la ligne de clef IH des remplissages triangulaires n'est point inclinée, comme à Langres, de l'extérieur à l'intérieur. De E en K, un second arc doubleau réunit la colonne E à la pile K, et il reste un triangle KEF facile à voûter, puisqu'il n'est qu'une portion de remplissage ordinaire. La méthode est la même à Saint-Remy de Reims, mais beaucoup moins bien appliquée. On voit que ces plans supérieurs posent exactement sur le rez-de-chaussée, si ce n'est quelque porte-à-faux dont tout à l'heure nous reconnaîtrons la nécessité.
Il est, dans la construction du choeur de Notre-Dame de Châlons, un fait important, en ce qu'il indique les efforts tentés par le maître de l'oeuvre pour s'affranchir de certaines difficultés qui embarrassaient fort ses confrères à la fin du XIIe siècle. On observera que le plan du sanctuaire donne des pans coupés à l'intérieur et une courbe demi-circulaire à l'extérieur. Ainsi les archivoltes inférieures L réunissant les grosses colonnes du rez-de-chaussée sont bandées sur les côtés d'un dodécagone, tandis que les archivoltes de la galerie du premier étage sont sur plan rectiligne sur le sanctuaire, et sur plan courbe sur la galerie; le mur extérieur de cette galerie est bâti également sur plan semi-circulaire, et le triforium (plan C) est sur plan rectiligne à l'intérieur, sur plan courbe à l'extérieur. Il en est de même des fenêtres supérieures (plan D). L'architecte avait voulu éviter les embarras que donne la construction d'archivoltes ou d'arcs doubleaux sur un plan demi-circulaire d'un assez faible rayon. Il craignait les poussées au vide, et, conservant seulement le plan circulaire à l'extérieur en l'amenant au dodécagone à l'intérieur, il réunissait assez habilement les avantages des deux systèmes: c'est-à-dire les grandes lignes de murs et bandeaux concentriques, une disposition simple au dehors et une grande solidité jointe à un effet satisfaisant dans le sanctuaire; car les arcs percés dans un mur sur plan circulaire d'un petit diamètre produisent toujours à l'oeil des ligne fort désagréables.
Une vue perspective (42) du collatéral avec l'entrée d'une chapelle rendra le plan du rez-de-chaussée facile à comprendre pour tous, et en indique la construction. Les colonnes isolées des chapelles sont des monolithes de 0,30 c. de diamètre au plus; le reste de la construction, sauf les colonnettes des arêtiers des chapelles et celles des fenêtres, est monté par assises.
Nous donnons maintenant (43) la coupe de cette construction jusqu'aux voûtes suivant la ligne MN du plan. Cette coupe nous fait voir en A, conformément à la méthode alors appliquée dans l'Île-de-France et les provinces voisines, les colonnes monocylindriques marquées en O sur le plan; en B l'archivolte et l'arrachement des voûtes du bas-côté. Les églises importantes de cette époque et de cette province possèdent toutes une galerie de premier étage voûtée (voy. ARCHITECTURE RELIGIEUSE, CATHÉDRALE, ÉGLISE). Ici, la voûte est rampante, comme celle du bas-côté de la cathédrale de Langres, et ce n'est pas sans motifs (voy. le plan B, fig. 41.). En effet, le formeret C, étant plus large à la base que l'archivolte D, monte sa clef plus haut, ce qui permet d'ouvrir de grands jours propres à éclairer le choeur. Le triforium E, occupant un espace assez considérable entre la clef des archivoltes de la galerie de premier étage et l'appui des fenêtres supérieures, permet d'établir un comble F sur cette galerie avec pente suffisante, malgré l'inclinaison de la voûte G. Examinons cette coupe avec attention. Nous voyons que le tailloir du chapiteau de la pile A reçoit en encorbellement la base de la colonne H qui porte la nervure de la voûte; cette colonnette et les deux autres qui la flanquent et portent les formerets ne font pas corps avec la bâtisse (voy. le plan), mais sont composées de grands morceaux de pierre posés en délit. Il en est de même des colonnettes adossées de la galerie et de la colonne engagée I. Ainsi la pile à la hauteur de la galerie est un parallélépipède composé d'assises et entouré de colonnes en délit comme de chandelles de charpente, afin d'obtenir du roide sous les charges et poussées supérieures. Il en est de même pour ces piles à la hauteur du triforium E (voy. le plan): le noyau est monté en assises, et les colonnettes qui l'entourent sur trois côtés sont posées en délit. Les grandes colonnettes de tête sont reliées par des bandeaux, formant bagues, au corps de la construction, par leur base et le chapiteau K sous les sommiers. Pour СКАЧАТЬ