Le Mariage forcé. Жан-Батист Мольер
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      Ce mariage doit être heureux, car il donne de la joie à tout le monde, et je fais rire tous ceux à qui j'en parle. Me voilà maintenant le plus content des hommes.

      Scène IV. – Dorimène, Sganarelle.

      – Dorimène -

      (dans le fond du théâtre, à un petit laquais qui la suit.)

      Allons, petit garçon, qu'on tienne bien ma queue, et qu'on ne s'amuse pas à badiner.

      – Sganarelle -

      (à part, apercevant Dorimène.)

      Voici ma maîtresse qui vient. Ah! qu'elle est agréable! Quel air, et quelle taille! Peut-il y avoir un homme qui n'ait, en la voyant, des démangeaisons de se marier ?

      (à Dorimène.)

      Où allez-vous, belle mignone, chère épouse future de votre époux futur ?

      – Dorimène -

      Je vais faire quelques emplettes.

      – Sganarelle -

      Eh bien! ma belle, c'est maintenant que nous allons être heureux l'un et l'autre. Vous ne serez plus en droit de me rien refuser; et je pourrai faire avec vous tout ce qu'il me plaira, sans que personne s'en scandalise. Vous allez être à moi depuis la tête jusqu'aux pieds, et je serai maître de tout: de vos petits yeux éveillés, de votre petit nez fripon, de vos lèvres appétissantes, de vos oreilles amoureuses, de votre petit menton joli, de vos petits tetons rondelets, de votre… Enfin, toute votre personne sera à ma discrétion, et je serai à même de vous caresser comme je voudrai. N'êtes-vous pas bien aise de ce mariage, mon aimable pouponne ?

      – Dorimène -

      Tout à fait aise, je vous jure. Car enfin la sévérité de mon père m'a tenue jusques ici dans une sujétion la plus fâcheuse du monde. Il y a je ne sais combien que j'enrage du peu de liberté qu'il me donne, et j'ai cent fois souhaité qu'il me mariât, pour sortir promptement de la contrainte où j'étais avec lui, et me voir en état de faire ce que je voudrai. Dieu merci, vous êtes venu heureusement pour cela, et je me prépare désormais à me donner du divertissement, et à réparer comme il faut le temps que j'ai perdu. Comme vous êtes un fort galant homme, et que vous savez comme il faut vivre, je crois que nous ferons le meilleur ménage du monde ensemble, et que vous ne serez point de ces maris incommodes qui veulent que leurs femmes vivent comme des loups-garous. Je vous avoue que je ne m'accommoderais pas de cela, et que la solitude me désespère. J'aime le jeu, les visites, les assemblées, les cadeaux2, et les promenades; en un mot, toutes les choses de plaisir: et vous devez être ravi d'avoir une femme de mon humeur. Nous n'aurons jamais aucun démêlé ensemble, et je ne vous contraindrai point dans vos actions, comme j'espère que, de votre côté, vous ne me contraindrez point dans les miennes; car, pour moi, je tiens qu'il faut une complaisance mutuelle, et qu'on ne se doit point marier pour se faire enrager l'un l'autre. Enfin, nous vivrons, étant mariés, comme deux personnes qui savent leur monde: aucun soupçon jaloux ne nous troublera la cervelle; et c'est assez que vous serez assuré de ma fidélité, comme je serai assuré de la vôtre. Mais qu'avez-vous? je vous vois tout changé de visage.

      – Sganarelle -

      Ce sont quelques vapeurs qui me viennent de monter à la tête.

      – Dorimène -

      C'est un mal aujourd'hui qui attaque beaucoup de gens, mais notre mariage vous dissipera tout cela. Adieu. Il me tarde déjà que je n'aie des habits raisonnables, pour quitter vite ces guenilles. Je m'en vais de ce pas achever d'acheter toutes les choses qu'il me faut, et je vous enverrai les marchands.

      Scène V. – Géronimo, Sganarelle.

      – Géronimo -

      Ah! seigneur Sganarelle, je suis ravi de vous trouver encore ici; et j'ai rencontré un orfèvre qui, sur le bruit que vous cherchiez quelque beau diamant en bague pour faire un présent à votre épouse, m'a fort prié de venir vous parler pour lui, et de vous dire qu'il en a un à vendre, le plus parfait du monde.

      – Sganarelle -

      Mon Dieu! cela n'est pas pressé.

      – Géronimo -

      Comment, que veut dire cela? Où est l'ardeur que vous montriez tout à l'heure ?

      – Sganarelle -

      Il m'est venu, depuis un moment, de petits scrupules sur le mariage. Avant que de passer plus avant, je voudrais bien agiter à fond cette matière, et que l'on m'expliquât un songe que j'ai fait cette nuit, et qui vient tout à l'heure de me revenir dans l'esprit. Vous savez que les songes sont comme des miroirs, où l'on découvre quelquefois tout ce qui nous doit arriver. Il me semblait que j'étais dans un vaisseau, sur une mer bien agitée, et que…

      – Géronimo -

      Seigneur Sganarelle, j'ai maintenant quelque petite affaire qui m'empêche de vous ouïr. Je n'entend rien du tout aux songes; et quant au raisonnement du mariage, vous avez deux savants, deux philosophes, vos voisins, qui sont gens à vous débiter tout ce qu'on peut dire sur ce sujet. Comme ils sont de sectes différentes, vous pouvez examiner leurs diverses opinions là-dessus. Pour moi, je me contente de ce que je vous ai dit tantôt, et demeure votre serviteur.

      – Sganarelle -

      Il a raison. Il faut que je consulte un peu ces gens-là sur l'incertitude où je suis.

      Scène VI. – Pancrace, Sganarelle.

      – Pancrace -

      (se tournant du côté où il est entré, et sans voir Sganarelle.)

      Allez, vous êtes un impertinent, mon ami, un homme [ignare de toute bonne discipline], bannissable de la république des lettres.

      – Sganarelle -

      Ah! bon. En voici un fort à propos.

      – Pancrace -

      (de même, sans voir Sganarelle.)

      Oui, je te soutiendrai par vives raisons3, [je te montrerai par Aristote, le philosophe des philosophes,] que tu es un ignorant, [un] ignorantissime, ignorantifiant et ignorantifié, par tous les cas et les modes imaginables.

      – Sganarelle -

      (à part.)

      Il a pris querelle contre quelqu'un.

      (A Pancrace.)

      Seigneur…

      – Pancrace -

      (de même, sans voir Sganarelle.)

      Tu veux te mêler de raisonner, et tu ne sais pas seulement les éléments de la raison.

      – Sganarelle -

      (à part.)

      La colère l'empêche de me voir.

      (A СКАЧАТЬ



<p>2</p>

Donner un "cadeau" signifiait autrefois "donner un repas". Le P. Bouhours fait venir ce mot de "cadendo", parce que, dit-il, les buveurs chancellent et tombent et que c'est ordinairement comme finissent les "cadeaux".

<p>3</p>

Tous les passages placés entre deux crochets ne se trouvent que dans l'édition de 1682.