Название: Le vicomte de Bragelonne, Tome III.
Автор: Dumas Alexandre
Издательство: Public Domain
Жанр: Зарубежная классика
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De Saint-Aignan s'écarta par respect.
– Entrez, fit le roi.
Le valet entrebâilla la porte.
– Que veut-on? demanda Louis.
Le valet montra une lettre pliée en forme de triangle.
– Pour Sa Majesté, dit-il.
– De quelle part?
– Je l'ignore; il a été remis par un des officiers de service.
Le roi fit signe, le valet apporta le billet.
Le roi s'approcha des bougies, ouvrit le billet, lut la signature et laissa échapper un cri.
Saint-Aignan était assez respectueux pour ne pas regarder; mais, sans regarder, il voyait et entendait.
Il accourut.
Le roi, d'un geste, congédia le valet.
– Oh! mon Dieu! fit le roi en lisant.
– Votre Majesté se trouve-t-elle indisposée? demanda Saint-Aignan les bras étendus.
– Non, non, Saint-Aignan; lis!
Et il lui passa le billet.
Les yeux de Saint-Aignan se portèrent à la signature.
– La Vallière! s'écria-t-il. Oh! Sire!
– Lis! lis!
Et Saint-Aignan lut:
«Sire, pardonnez-moi mon importunité, pardonnez-moi surtout le défaut de formalités qui accompagne cette lettre; un billet me semble plus pressé et plus pressant qu'une dépêche; je me permets donc d'adresser un billet à Votre Majesté.
Je rentre chez moi brisée de douleur et de fatigue, Sire, et j'implore de Votre Majesté la faveur d'une audience dans laquelle je pourrai dire la vérité à mon roi.
Signé: Louise de La Vallière.»
– Eh bien? demanda le roi en reprenant la lettre des mains de
Saint Aignan tout étourdi de ce qu'il venait de lire.
– Eh bien? répéta Saint-Aignan.
– Que penses-tu de cela?
– Je ne sais trop.
– Mais enfin?
– Sire, la petite aura entendu gronder la foudre, et elle aura eu peur.
– Peur de quoi? demanda noblement Louis.
– Dame! que voulez-vous, Sire! Votre Majesté a mille raisons d'en vouloir à l'auteur ou aux auteurs d'une si méchante plaisanterie, et la mémoire de Votre Majesté, ouverte dans le mauvais sens, est une éternelle menace pour l'imprudente.
– Saint-Aignan, je ne vois pas comme vous.
– Le roi doit voir mieux que moi.
– Eh bien! je vois dans ces lignes: de la douleur, de la contrainte, et maintenant surtout que je me rappelle certaines particularités de la scène qui s'est passée ce soir chez Madame… Enfin…
Le roi s'arrêta sur ce sens suspendu.
– Enfin, reprit Saint-Aignan, Votre Majesté va donner audience, voilà ce qu'il y a de plus clair dans tout cela.
– Je ferai mieux, Saint-Aignan.
– Que ferez-vous, Sire?
– Prends ton manteau.
– Mais, Sire…
– Tu sais où est la chambre des filles de Madame?
– Certes.
– Tu sais un moyen d'y pénétrer?
– Oh! quant à cela, non.
– Mais enfin tu dois connaître quelqu'un par là?
– En vérité, Votre Majesté est la source de toute bonne idée.
– Tu connais quelqu'un?
– Oui.
– Qui connais-tu? Voyons.
– Je connais certain garçon qui est au mieux avec certaine fille.
– D'honneur?
– Oui, d'honneur, Sire.
– Avec Tonnay-Charente? demanda Louis en riant.
– Non, malheureusement; avec Montalais.
– Il s'appelle?
– Malicorne.
– Bon! Et tu peux compter sur lui?
– Je le crois, Sire. Il doit bien avoir quelque clef… Et s'il en a une, comme je lui ai rendu service… il m'en fera part.
– C'est au mieux. Partons!
– Je suis aux ordres de Votre Majesté.
Le roi jeta son propre manteau sur les épaules de Saint-Aignan et lui demanda le sien. Puis tous deux gagnèrent le vestibule.
Chapitre CXXXIII – Ce que n'avaient prévu ni naïade ni dryade
De Saint-Aignan s'arrêta au pied de l'escalier qui conduisait aux entresols chez les filles d'honneur, au premier chez Madame. De là, par un valet qui passait, il fit prévenir Malicorne, qui était encore chez Monsieur.
Au bout de dix minutes, Malicorne arriva le nez au vent et flairant dans l'ombre.
Le roi se recula, gagnant la partie la plus obscure du vestibule.
Au contraire, de Saint-Aignan s'avança.
Mais, aux premiers mots par lesquels il formula son désir,
Malicorne recula tout net.
– Oh! oh! dit-il, vous me demandez à être introduit dans les chambres des filles d'honneur?
– Oui.
– Vous comprenez que je ne puis faire une pareille chose sans savoir dans quel but vous la désirez.
– Malheureusement, cher monsieur Malicorne, il m'est impossible de donner aucune explication; il faut donc que vous vous fiiez à moi comme un ami qui vous a tiré d'embarras hier et qui vous prie de l'en tirer aujourd'hui.
– Mais moi, monsieur, je vous disais ce que je voulais; ce que je voulais, c'était ne point coucher à la belle étoile, et tout honnête homme peut avouer un pareil désir; tandis que vous, vous n'avouez СКАЧАТЬ