Le vicomte de Bragelonne, Tome I.. Dumas Alexandre
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Название: Le vicomte de Bragelonne, Tome I.

Автор: Dumas Alexandre

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ style="font-size:15px;">      «Ce misérable Italien, ce pleutre, ce ladre vert, qui vient de refuser un million au roi d'Angleterre, ne me donnerait peut-être pas mille pistoles pour la nouvelle que je lui porterais. Oh! mordioux! voilà que je tombe en enfance! voilà que je m'abrutis! Le Mazarin donner quelque chose, ha! ha! ha!»

      Et l'officier se mit à rire formidablement tout seul.

      «Dormons, dit-il, dormons, et tout de suite. J'ai l'esprit fatigué de ma soirée, demain il verra plus clair qu'aujourd'hui.»

      Et sur cette recommandation faite à lui-même, il s'enveloppa de son manteau, narguant son royal voisin.

      Cinq minutes après, il dormait les poings fermés, les lèvres entrouvertes, laissant échapper, non pas son secret, mais un ronflement sonore qui se développait à l'aise sous la voûte majestueuse de l'antichambre.

      Chapitre XIII – Marie de Mancini

      Le soleil éclairait à peine de ses premiers rayons les grands bois du parc et les hautes girouettes du château, quand le jeune roi, réveillé déjà depuis plus de deux heures, et tout entier à l'insomnie de l'amour, ouvrit son volet lui-même et jeta un regard curieux sur les cours du palais endormi.

      Il vit qu'il était l'heure convenue: la grande horloge de la cour marquait même quatre heures un quart.

      Il ne réveilla point son valet de chambre, qui dormait profondément à quelque distance; il s'habilla seul, et ce valet, tout effaré, arrivait, croyant avoir manqué à son service, lorsque Louis le renvoya dans sa chambre en lui recommandant le silence le plus absolu. Alors il descendit le petit escalier, sortit par une porte latérale, et aperçut le long du mur du parc un cavalier qui tenait un cheval de main.

      Ce cavalier était méconnaissable dans son manteau et sous son chapeau.

      Quant au cheval, sellé comme celui d'un bourgeois riche, il n'offrait rien de remarquable à l'oeil le plus exercé.

      Louis vint prendre la bride de ce cheval; l'officier lui tint l'étrier, sans quitter lui-même la selle, et demanda d'une voix discrète les ordres de Sa Majesté.

      – Suivez-moi, répondit Louis XIV.

      L'officier mit son cheval au trot derrière celui de son maître, et ils descendirent ainsi vers le pont.

      Lorsqu'ils furent de l'autre côté de la Loire:

      – Monsieur, dit le roi, vous allez me faire le plaisir de piquer devant vous jusqu'à ce que vous aperceviez un carrosse; alors vous reviendrez m'avertir; je me tiens ici.

      – Votre Majesté daignera-t-elle me donner quelques détails sur le carrosse que je suis chargé de découvrir?

      – Un carrosse dans lequel vous verrez deux dames et probablement aussi leurs suivantes.

      – Sire, je ne veux point faire d'erreur; y a-t-il encore un autre signe auquel je puisse reconnaître ce carrosse?

      – Il sera, selon toute probabilité, aux armes de M. le cardinal.

      – C'est bien, Sire, répondit l'officier, entièrement fixé sur l'objet de sa reconnaissance.

      Il mit alors son cheval au grand trot et piqua du côté indiqué par le roi. Mais il n'eut pas fait cinq cents pas qu'il vit quatre mules, puis un carrosse poindre derrière un monticule.

      Derrière ce carrosse en venait un autre. Il n'eut besoin que d'un coup d'oeil pour s'assurer que c'étaient bien là les équipages qu'il était venu chercher.

      Il tourna bride sur-le-champ, et se rapprochant du roi:

      – Sire, dit-il, voici les carrosses. Le premier, en effet, contient deux dames avec leurs femmes de chambre; le second renferme des valets de pied, des provisions, des hardes.

      – Bien, bien, répondit le roi d'une voix tout émue. Eh bien! allez, je vous prie, dire à ces dames qu'un cavalier de la cour désire présenter ses hommages à elles seules.

      L'officier partit au galop.

      – Mordioux! disait-il tout en courant, voilà un emploi nouveau et honorable, j'espère! Je me plaignais de n'être rien, je suis confident du roi. Un mousquetaire, c'est à en crever d'orgueil!

      Il s'approcha du carrosse et fit sa commission en messager galant et spirituel.

      Deux dames étaient en effet dans le carrosse: l'une d'une grande beauté, quoique un peu maigre; l'autre moins favorisée de la nature, mais vive, gracieuse, et réunissant dans les légers plis de son front tous les signes de la volonté. Ses yeux vifs et perçants, surtout, parlaient plus éloquemment que toutes les phrases amoureuses de mise en ces temps de galanterie. Ce fut à celle-là que d'Artagnan s'adressa sans se tromper, quoique, ainsi que nous l'avons dit, l'autre fût plus jolie peut-être.

      – Mesdames, dit-il, je suis le lieutenant des mousquetaires, et il y a sur la route un cavalier qui vous attend et qui désire vous présenter ses hommages.

      À ces mots, dont il suivait curieusement l'effet, la dame aux yeux noirs poussa un cri de joie, se pencha hors de la portière, et, voyant accourir le cavalier, tendit les bras en s'écriant:

      – Ah! mon cher Sire!

      Et les larmes jaillirent aussitôt de ses yeux. Le cocher arrêta ses chevaux, les femmes de chambre se levèrent avec confusion au fond du carrosse, et la seconde dame ébaucha une révérence terminée par le plus ironique sourire que la jalousie ait jamais dessiné sur des lèvres de femme.

      – Marie! chère Marie! s'écria le roi en prenant dans ses deux mains la main de la dame aux yeux noirs.

      Et, ouvrant lui-même la lourde portière, il l'attira hors du carrosse avec tant d'ardeur qu'elle fut dans ses bras avant de toucher la terre. Le lieutenant, posté de l'autre côté du carrosse, voyait et entendait sans être remarqué.

      Le roi offrit son bras à Mlle de Mancini, et fit signe aux cochers et aux laquais de poursuivre leur chemin.

      Il était six heures à peu près; la route était fraîche et charmante; de grands arbres aux feuillages encore noués dans leur bourre dorée laissaient filtrer la rosée du matin suspendue comme des diamants liquides à leurs branches frémissantes; l'herbe s'épanouissait au pied des haies; les hirondelles, revenues depuis quelques jours, décrivaient leurs courbes gracieuses entre le ciel et l'eau; une brise parfumée par les bois dans leur floraison courait le long de cette route et ridait la nappe d'eau du fleuve; toutes ces beautés du jour, tous ces parfums des plantes, toutes ces aspirations de la terre vers le ciel, enivraient les deux amants, marchant côte à côte, appuyés l'un à l'autre, les yeux sur les yeux, la main dans la main, et qui, s'attardant par un commun désir, n'osaient parler, tant ils avaient de choses à se dire.

      L'officier vit que le cheval abandonné errait çà et là et inquiétait Mlle de Mancini. Il profita du prétexte pour se rapprocher en arrêtant le cheval, et, à pied aussi entre les deux montures qu'il maintenait, il ne perdit pas un mot ni un geste des deux amants. Ce fut Mlle de Mancini qui commença.

      – Ah! mon cher Sire, dit elle, vous ne m'abandonnez donc pas, vous?

      – Non, répondit le roi: vous le voyez bien, Marie.

      – On me l'avait tant dit, cependant: qu'à peine serions-nous СКАЧАТЬ