Название: Micah Clarke – Tome I. Les recrues de Monmouth
Автор: Артур Конан Дойл
Издательство: Public Domain
Жанр: Зарубежная классика
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Mon père comparut devant un conseil de guerre, et il est possible qu'il aurait été offert en sacrifice pour apaiser la fureur de la soldatesque, si le Lord Protecteur n'était intervenu et n'avait réduit la punition au renvoi de l'armée.
En conséquence, le cornette Clarke se vit enlever sa cotte de buffle et son casque d'acier.
Il s'en retourna à Havant et s'y établit négociant en cuirs et tanneur, ce qui priva le Parlement du soldat le plus dévoué qui eût jamais porté l'épée à son service.
Voyant qu'il prospérait dans son commerce, il épousa Marie Shopstone, jeune personne attachée à l'Église, et moi, Micah Clarke, je fus le premier gage de leur union.
Mon père, tel que je le trouve dans mes premiers souvenirs, était de stature haute et droite.
Il avait de larges épaules et une puissante poitrine.
Sa figure était accidentée et rude, avec de gros traits durs, des sourcils en broussaille et saillants, le nez fort, large, charnu, de grosses lèvres qui se contractaient et se rentraient quand il était en colère.
Ses yeux gris étaient perçants, de vrais yeux de soldat, et cependant je les ai vu s'éclairer d'un bon sourire, d'un pétillement joyeux.
Sa voix était terrible et propre à inspirer la crainte à un point que je n'ai jamais su m'expliquer.
Je n'ai pas de peine à croire ce que j'ai appris, que quand il chantait le centième Psaume à cheval parmi les bonnets bleus, à Dunbar, sa voix dominait le son des trompettes, le bruit des coups de feu, comme le roulement grave d'une vague contre un brisant.
Mais bien qu'il possédât toutes les qualités nécessaires pour devenir un officier de distinction, il renonça à ses habitudes militaires, en rentrant dans la vie civile.
Grâce à sa prospérité et à la fortune qu'il avait acquise, il aurait fort bien pu porter l'épée.
Au lieu de cela, il avait un petit exemplaire de la Bible logé dans sa ceinture, à l'endroit où les autres suspendent leurs armes.
Il était sobre et mesuré en ses propos, et même au milieu de sa famille, il lui arrivait rarement de parler des scènes auxquelles il avait pris part, où des grands personnages tels que Fleetwood et Harrison, Blake et Ireton, Desborough et Lambert, dont quelques-uns étaient comme lui simples soldats, lorsque les troubles éclatèrent.
Il était frugal dans sa nourriture, fuyant la boisson, et ne s'accordait d'autre plaisir que ses trois pipes quotidiennes de tabac d'Oroonoko, qu'il gardait dans une jarre brune près du grand fauteuil de bois, à gauche de la cheminée.
Et cependant, malgré toute la réserve qu'il s'imposait, il arrivait parfois que l'homme de jadis se fit jour en lui, et éclata en un de ses accès que ses ennemis appelaient du fanatisme, ses amis de la piété, et il faut bien reconnaître que cette piété-là avait tendance à se manifester sous une forme farouche et emportée.
Et quand je remonte dans mes souvenirs, deux ou trois incidents y reparaissent avec un relief si net et si clair que je pourrais les prendre pour des scènes tout récemment vues au théâtre, alors qu'elles datent de mon enfance, d'une soixantaine d'années, et de l'époque où régnait Charles II.
Quand survint le premier incident, j'étais si jeune, que je ne puis me rappeler ni ce qui le précéda, ni ce qui le suivit immédiatement.
Il se planta dans ma mémoire parmi bien des choses qui en ont disparu depuis.
Nous étions tous à la maison, par une lourde soirée d'été, quand nous entendîmes un roulement de timbales, un bruit de fers de chevaux, qui amenèrent sur le seuil mon père et ma mère.
Elle me portait dans ses bras pour que je puisse mieux voir.
C'était un régiment de cavalerie, qui se rendait de Chichester à Portsmouth, drapeau au vent, musique jouant, et c'était le plus attrayant coup d'œil qu'eussent jamais vu mes yeux d'enfant.
J'étais plein d'étonnement, d'admiration en contemplant les chevaux au poil lustré, à l'allure vive, les morions d'acier, les chapeaux à plumes des officiers, les écharpes et les baudriers.
Je ne croyais avoir jamais vu une aussi belle troupe réunie, et dans mon ravissement je battis des mains, je poussai des cris.
Mon père sourit gravement, et me prit des bras de ma mère:
– Hé! dit-il, mon garçon; tu es un fils de soldat, et tu devrais avoir assez de jugement pour ne pas louer une cohue pareille. Est-ce que tout enfant que tu es, tu ne vois pas que leurs armes sont mal fourbies, que leurs éperons de fer sont rouillés, leurs rangs sans ordre ni cohésion? Et ils n'ont pas envoyé en avant d'eux d'éclaireurs ainsi que cela doit se faire, même en temps de paix, et leur arrière-garde a des traînards d'ici à Bedhampton…
«Oui, reprit-il en brandissant son long bras dans la direction des soldats, et les interpellant, vous êtes du blé mûr pour la faucille et qui n'attend plus que les moissonneurs.
Plusieurs d'entre eux tirèrent sur les rênes à cette soudaine explosion.
– Jack, un bon coup sur le crâne tondu de ce coquin, cria l'un d'eux, on faisant faire demi-tour à son cheval.
Mais il y avait dans la figure de mon père quelque chose qui fit reculer l'homme, et il rentra dans les rangs sans avoir fait ce qu'il disait.
Le régiment défila à grand fracas sur la route.
Ma mère posa ses mains fines sur le bras de mon père et apaisa par ses gentillesses et ses caresses le démon endormi qui s'était réveillé en lui.
En une autre occasion que je puis me rappeler – c'était quand j'avais sept ou huit ans – sa colère éclata d'une façon plus dangereuse dans ses effets.
Je jouais autour de lui un après-midi de printemps pendant qu'il travaillait dans la cour de la tannerie, lorsque par la porte ouverte entrèrent, en se dandinant, deux beaux messieurs aux revers d'habit dorés, et des cocardes coquettement fixées sur le côté de leurs tricornes.
Ainsi que je l'appris plus tard, c'étaient des officiers de la flotte qui passaient par Havant, et nous voyant occupés dans la cour, ils étaient entrés pour nous demander des renseignements sur leur route.
Le plus jeune des deux aborda mon père, et commença l'entretien par un grand fracas de mots qui étaient pour moi de l'hébreu; mais maintenant je me souviens que c'était une série de ces jurons qui sont communs dans la bouche d'un marin.
Et pourtant que des gens qui sont sans cesse exposés à comparaître devant le Tout-Puissant s'égarassent au point de l'insulter, cela fut toujours un mystère pour moi!
Mon père, d'un ton rude et sévère, l'invita à parler avec plus de respect des choses saintes.
Sur quoi les deux hommes lâchèrent la bride à leur langue, et traitèrent mon père de farceur prédicant, de Jacquot presbytérien à figure de cafard.
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