Les mille et un fantômes. Dumas Alexandre
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Название: Les mille et un fantômes

Автор: Dumas Alexandre

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ style="font-size:15px;">      – Pendant tout le temps que nous serons dans la cave, vous ne me quitterez pas.

      – Non.

      – Vous me laisserez vous tenir la main.

      – Oui.

      – Eh bien! dit-il, allons!

      Et, tirant de sa poche un mouchoir à carreaux, il essuya son front trempé de sueur.

      On s'achemina vers l'impasse des Sergents.

      Le commissaire de police et le docteur marchaient les premiers, puis Jacquemin et les deux gendarmes.

      Derrière eux venaient M. Ledru et les deux hommes qui avaient apparu à sa porte en même temps que lui.

      Puis roulait, comme un torrent plein de houle et de rumeurs, toute la population à laquelle j'étais mêlé.

      Au bout d'une minute de marche à peu près, nous arrivâmes à l'impasse des Sergents. – C'était une petite ruelle située à gauche de la Grande-Rue, et qui allait en descendant jusqu'à une grande porte de bois délabrée, s'ouvrant à la fois par deux grands battants, et une petite porte, découpée dans un des deux grands battants.

      Cette petite porte ne tenait plus qu'à un gond.

      Tout, au premier aspect, paraissait calme dans cette maison; un rosier fleurissait à la porte, et, près du rosier, sur un banc de pierre; un gros chat roux se chauffait avec béatitude au soleil.

      En apercevant tout ce monde, en entendant tout ce bruit, il prit peur, se sauva et disparut par le soupirail d'une cave.

      Arrivé à la porte que nous avons décrite; Jacquemin s'arrêta.

      Les gendarmes voulurent le faire entrer de force.

      – Monsieur Ledru, dit-il en se retournant, monsieur Ledru, vous avez promis de ne pas me quitter.

      – Eh bien! me voilà, répondit le maire.

      – Votre bras! votre bras!

      Et il chancelait comme s'il eût été prêt à tomber. M. Ledru s'approcha, fit signe aux deux gendarmes de lâcher le prisonnier, et lui donna le bras.

      – Je réponds de lui, dit-il.

      Il était évident que, dans ce moment, M. Ledru n'était plus le maire de la commune, poursuivant la punition d'un crime, mais un philosophe explorant le domaine de l'inconnu.

      Seulement, son guide dans cette étrange exploration était un assassin.

      Le docteur et le commissaire de police entrèrent les premiers, puis M. Ledru et Jacquemin; puis les deux gendarmes, puis quelques privilégiés au nombre desquels je me trouvais, grâce au contact que j'avais eu avec MM. les gendarmes, pour lesquels je n'étais déjà plus un étranger, ayant eu l'honneur de les rencontrer dans la plaine et de leur montrer mon port d'armes.

      La porte fut refermée sur le reste de la population, qui resta grondant au dehors.

      On s'avança vers la porte de la petite maison.

      Rien n'indiquait l'événement terrible qui s'y était passé; tout était à sa place: le lit de serge verte dans son alcôve; à la tête du lit le crucifix de bois noir, surmonté d'une branche de buis séché depuis la dernière Pâques. – Sur la cheminée, un enfant Jésus en cire, couché parmi les fleurs entre deux chandeliers de forme Louis XVI, argentés autrefois; à la muraille, quatre gravures coloriées, encadrées dans des cadres de bois noir et représentant les quatre parties du monde.

      Sur une table un couvert mis, à l'âtre un pot-au-feu bouillant, et près d'un coucou sonnant la demie une huche ouverte.

      – Eh bien! dit le docteur de son ton jovial, je ne vois rien jusqu'à présent.

      – Prenez par la porte à droite, murmura Jacquemin d'une voix sourde.

      On suivit l'indication du prisonnier, et l'on se trouva dans une espèce de cellier à l'angle duquel s'ouvrait une trappe à l'orifice de laquelle tremblait une lueur qui venait d'en bas.

      – Là, là, murmura Jacquemin en se cramponnant au bras de M. Ledru d'une main et en montrant de l'autre l'ouverture de la cave.

      – Ah! ah! dit tout bas le docteur au commissaire de police, avec ce sourire terrible des gens que rien n'impressionne, parce qu'ils ne croient à rien, il paraît que madame Jacquemin a suivi le précepte de maître Adam; et il fredonna:

      Si je meurs, que l'on m'enterre

      Dans la cave où est…

      – Silence! interrompit Jacquemin, le visage livide, les cheveux hérissés, la sueur sur le front, ne chantez pas ici!

      Frappé par l'expression de cette voix, le docteur se tut.

      Mais presque aussitôt, descendant les premières marches de l'escalier: – Qu'est-ce que cela? demanda-t-il.

      Et, s'étant baissé, il ramassa une épée à large lame.

      C'était l'épée à deux mains que Jacquemin, comme il l'avait dit, avait prise, le 29 juillet 1830, au Musée d'artillerie; la lame était teinte de sang.

      Le commissaire de police la prit des mains du docteur.

      – Reconnaissez-vous cette épée? dit-il au prisonnier.

      – Oui, répondit Jacquemin. Allez! allez! finissons-en.

      C'était le premier jalon du meurtre, que l'on venait de rencontrer.

      On pénétra dans la cave, chacun tenant le rang que nous avons déjà dit.

      Le docteur et le commissaire de police les premiers, puis M. Ledru et Jacquemin, puis les deux personnes qui se trouvaient chez lui, puis les gendarmes, puis les privilégiés, au nombre desquels je me trouvais.

      Après avoir descendu la septième marche, mon oeil plongeait dans la cave et embrassait le terrible ensemble que je vais essayer de peindre.

      Le premier objet sur lequel s'arrêtaient les yeux était un cadavre sans tête, couché près d'un tonneau, dont le robinet, ouvert à moitié, continuait de laisser échapper un filet de vin, lequel, en coulant, formait une rigole qui allait se perdre sous le chantier.

      Le cadavre était à moitié tordu, comme si le torse, retourné sur le dos, eût commencé un mouvement d'agonie que les jambes n'avaient pas pu suivre. – La robe était, d'un côté, retroussée jusqu'à la jarretière.

      On voyait que la victime avait été frappée au moment où, à genoux devant le tonneau, elle commençait à remplir une bouteille, qui lui avait échappé des mains et qui était gisante à ses côtés.

      Tout le haut du corps nageait dans une mare de sang.

      Debout sur un sac de plâtre adossé à la muraille, comme un buste sur sa colonne, on apercevait ou plutôt on devinait une tête, noyée dans ses cheveux; une raie de sang rougissait le sac, du haut jusqu'à la moitié.

      Le docteur et le commissaire de police avaient déjà fait СКАЧАТЬ