Название: Persuasion
Автор: Austen Jane
Издательство: Public Domain
Жанр: Зарубежная классика
isbn: http://www.gutenberg.org/ebooks/36777
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– Mon Dieu! qu'avez-vous eu à faire?
– Beaucoup de choses: je ne puis tout me rappeler. J'ai fait une copie du catalogue des livres et tableaux de mon père. J'ai été souvent au jardin avec Mackensie, tâchant de lui faire comprendre quelles sont les plantes d'Élisabeth destinées à lady Russel. J'ai eu mes livres, ma musique à arranger, et à refaire toutes mes malles, pour n'avoir pas compris d'abord ce qu'il fallait emporter. Enfin, j'ai été visiter toutes les maisons de la paroisse. Tout cela prend beaucoup de temps.
– Ah! mais vous ne me parlez pas de notre dîner chez les Pools, hier?
– Vous y êtes donc allée? Je croyais que vous aviez dû y renoncer?
– Oh! j'y suis allée! Je me portais très bien hier. Jusqu'à ce matin je n'étais pas malade; n'y pas aller aurait semblé singulier.
– J'en suis très contente: j'espère que vous vous êtes amusée?
– Pas trop. On sait d'avance le dîner et les personnes qui y seront. Quel ennui de n'avoir pas une voiture à soi! M. et Mme Musgrove m'ont emmenée, et nous étions trop serrés. Ils sont si gros, et occupent tant de place! J'étais entassée au fond avec Henriette et Louisa. Voilà très probablement la cause de mon malaise.»
La patience et la bonne humeur d'Anna apportèrent bientôt un soulagement à Marie, qui put s'asseoir, et espéra pouvoir se lever pour dîner. Puis, oubliant qu'elle était malade, elle alla à l'autre bout de la chambre, arrangea des fleurs, mangea quelque chose et se trouva assez bien pour proposer une petite promenade.
«Où allons-nous? dit-elle: sans doute vous n'irez pas à Great-House avant qu'on vous ait fait visite?
– Mais si, dit Anna; je ne suis pas sur l'étiquette avec les dames Musgrove.
– Oh! c'est à elles de venir, elles doivent savoir ce qui est dû à ma sœur. Cependant nous pouvons y entrer avant de faire notre promenade.»
Anna avait toujours trouvé très fâcheuse cette façon de comprendre les relations; mais, croyant qu'on avait à se plaindre de part et d'autre, elle avait cessé de s'en occuper. Elles allèrent à Great-House. On les introduisit dans un antique parloir carré, au parquet brillant et orné d'un maigre tapis. Mais les filles de la maison donnaient à cette pièce l'air de désordre indispensable, avec un grand piano à queue, une harpe, des jardinières, et de petites tables dans tous les coins. Oh! si les originaux des portraits accrochés à la boiserie, si les gentilshommes habillés de velours brun, et les dames, en satin bleu, avaient vu ce bouleversement de l'ordre et de la propreté! Les portraits eux-mêmes semblaient saisis d'étonnement!
Les Musgrove, comme leur maison, représentaient deux époques. Les parents étaient dans le vieux style anglais, les enfants, dans le nouveau. M. et Mme Musgrove étaient de très bonnes gens, affectueux et hospitaliers, sans grande éducation et sans aucune élégance. Leurs enfants avaient un esprit et des façons plus modernes. La famille était nombreuse, mais c'étaient encore des enfants, excepté Charles, Louisa et Henriette, jeunes filles de dix-neuf et vingt ans, qui avaient rapporté à la maison le bagage ordinaire des talents de pension, et n'avaient, comme mille autres jeunes filles, rien à faire que d'être gaies, heureuses, et suivre les modes. Leurs vêtements étaient parfaits, leurs figures assez jolies, leur esprit extrêmement bon, et leurs manières simples et agréables. Elles étaient très appréciées à la maison, et très recherchées au dehors. Anna les trouvait fort heureuses; mais cependant, soutenue, comme nous le sommes tous, par le sentiment de sa supériorité, elle n'aurait pas voulu changer contre toutes leurs jouissances son esprit cultivé et élégant.
Elle n'enviait que la bonne intelligence qui semblait régner entre elles, et cette mutuelle affection qu'elle-même avait si peu connue. Elles furent reçues très cordialement, et Anna ne trouva rien à critiquer. La demi-heure s'écoula en causerie agréable, et Anna ne fut pas peu surprise de voir les misses Musgrove les accompagner à la promenade sur l'invitation pressante de Marie.
CHAPITRE VI
Anna n'avait pas besoin de cette visite pour savoir qu'un changement de société amène un changement total de conversation, d'opinions et d'idées. Elle aurait voulu que les Elliot pussent voir combien leurs affaires, traitées avec une telle solennité à Kellynch, avaient ici peu d'importance. Cependant elle sentit qu'elle avait encore besoin d'une leçon, car elle avait compté sur plus de curiosité et de sympathie qu'elle n'en trouva. On lui avait bien dit: «Ainsi, miss Anna, votre père et votre sœur sont partis?» Ou bien: «J'espère que nous irons aussi à Bath cet hiver; mais nous comptons loger dans un beau quartier.» Ou bien, Marie disait: «En vérité! comme je m'amuserai seule ici pendant que vous serez à Bath!»
Anna se promettait de ne plus éprouver à l'avenir de telles déceptions, et pensait avec reconnaissance au bonheur inexprimable d'avoir une amie vraie et sympathique comme lady Russel.
Cependant elle trouvait très juste que chaque société dictât ses sujets de conversation. Les messieurs Musgrove avaient leur chasse, leurs chevaux, leurs chiens, leurs journaux. Les dames avaient les soins d'intérieur, la toilette, les voisins, la danse et la musique. Anna, devant passer deux mois à Uppercross, devait meubler son imagination et sa mémoire avec les choses d'Uppercross. Elle ne redoutait pas ces deux mois. Marie était abordable et accessible à son influence. Anna était sur un pied de bonne amitié avec son beau-frère; les enfants l'aimaient presque autant et la respectaient plus que leur mère. Ils étaient pour elle une source d'intérêt, d'amusement et d'occupation.
Charles était poli et agréable; il était certainement, comme esprit et comme bon sens, supérieur à sa femme. Cependant Anna et lady Russel pensaient qu'une femme intelligente aurait pu donner à son caractère plus de suite, à ses habitudes plus d'élégance, à ses occupations plus d'utilité et de sens pratique. Il ne mettait beaucoup d'ardeur à rien, si ce n'est au jeu, et il gaspillait son temps.
Il était d'un caractère gai, s'affectant peu des doléances de sa femme; il supportait son manque de bon sens avec une patience qui émerveillait Anna, et en définitive, malgré quelques petites querelles (où les deux parties appelaient Anna, à son grand regret), ce couple pouvait passer pour heureux. Il y avait une chose sur laquelle ils étaient toujours parfaitement d'accord: le besoin d'argent et le désir de recevoir un cadeau de M. Musgrove. Quant à l'éducation de leurs enfants, la théorie de Charles était meilleure que celle de sa femme. «Je les gouvernerais très bien, si Marie ne s'en mêlait pas,» disait-il, et Anna trouvait que c'était assez vrai. Mais quand Marie répondait à cela: «Charles gâte tellement les enfants que je ne puis en venir à bout,» Anna n'était jamais tentée de dire que c'était vrai.
Ce qu'il y avait de moins agréable dans son séjour, c'était d'être la confidente de tous les partis. On savait qu'elle avait quelque influence sur sa sœur, et l'on voulait qu'elle s'en servît, même au delà du possible. «Tâchez donc de persuader à Marie de ne pas toujours se croire malade,» disait Charles. Et Marie disait: «Je crois que si Charles me voyait mourante, il dirait encore que ce n'est rien. Vous pouvez, Anna, lui persuader que je suis plus malade que je ne l'avoue.» Ou bien: «Je n'aime pas à envoyer les enfants à Great-House, quoique leur grand'mère les demande toujours. Elle les gâte tellement, et leur donne tant de friandises qu'ils reviennent malades et grognons pour le reste de la journée.»
Et Mme Musgrove mère, aussitôt qu'elle était seule avec Anna, disait:
«Ah! miss Anna! si seulement Mme Charles avait un peu de votre méthode avec les enfants! Ils sont tout autres avec vous! Il faut convenir СКАЧАТЬ