Le crime de l'Opéra 2. Fortuné du Boisgobey
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Название: Le crime de l'Opéra 2

Автор: Fortuné du Boisgobey

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ Et qui sait si, à force de plaider sa cause auprès de mon oncle, elle n’a pas réussi à la sauver?

      Il lui tardait de l’aborder, et il maudissait les empressés qui l’accablaient de saluts et probablement d’invitations.

      – On va danser. Elle doit être déjà engagée pour toute la nuit, et Dieu sait quand je pourrai lui parler, se disait-il avec inquiétude. Mon oncle est là, mais je préfèrerais ne pas m’adresser à lui.

      Enfin, il y eut une éclaircie. L’orchestre préludait déjà, et les notes isolées des instruments qui cherchaient l’accord rappelaient les cavaliers dispersés dans la salle. Le cercle se rompit, et Gaston put s’approcher. Justement, M.  Roger Darcy venait d’être accaparé par un magistrat de ses amis, et il ne voyait pas son neveu. La veuve l’aperçut au premier pas qu’il fit vers elle, et sa figure changea d’expression. Elle l’appela d’un signe imperceptible, quoiqu’elle fût encore assiégée par le joli lieutenant Tréville, qui insistait pour obtenir une valse, fût-ce la treizième. Et Gaston ne se fit pas prier pour venir couper court aux galantes obsessions de cet aimable hussard.

      – Je vous cherchais, dit madame Cambry en lui tendant le bout de ses doigts effilés.

      Tréville comprit qu’il était de trop, et battit en retraite, après avoir adressé à la veuve un salut ponctué d’un sourire expressif et un bonsoir amical à Darcy, son camarade de cercle.

      – C’est moi qui vous cherchais, madame, murmura Gaston, et je vous supplie de m’excuser d’avoir tant tardé à me présenter. Jugez de mon impatience. Vous étiez si entourée que je ne pouvais pas approcher, moi qui ne suis venu que pour vous…

      – Pour elle et pour moi, n’est-ce pas? Je regrette de ne pas vous avoir rencontré plus tôt. Je ne me serais pas engagée, et maintenant je vais être obligée de vous quitter quand nous avons tant de choses à nous dire. Mais je vous ai gardé un quadrille. Ne vous éloignez pas.

      – Je n’aurai garde, et je ne saurais trop vous remercier.

      – C’est votre oncle qu’il faut remercier. Lui seul a tout fait. Mais j’entends le prélude d’une valse que j’ai promise. Je vous laisse à M.  Roger qui vous dira…

      – Ce que j’aimerais cent fois mieux apprendre de votre bouche, interrompit Gaston, ému au point d’oublier qu’il est malséant de couper la parole à une femme.

      Madame Cambry se pencha à son oreille et lui dit à demi-voix:

      – Je suis bien heureuse. Demain, Berthe nous sera rendue.

      – Demain! s’écria Gaston; ai-je bien entendu? Demain elle sera libre!

      – L’ordre a été signé ce matin, murmura madame Cambry. Votre oncle vous dira le reste. En ce moment, voyez, je ne m’appartiens plus.

      Le valseur favorisé accourait, un beau jeune substitut, tout fier de l’honneur que lui faisait la future madame Darcy. Elle prit son bras et se laissa entraîner.

      – Libre! murmura Gaston. Ah! je n’espérais pas ce bonheur, et c’est à peine si j’y puis croire. Et on jurerait que madame Cambry n’y croit pas non plus. Elle m’a annoncé cette joie d’un ton presque triste. Et pourtant elle l’a dit… l’ordre est signé. Ah! il me tarde d’interroger mon oncle.

      L’oncle était à deux pas, et il avait fort bien vu son neveu, mais, par malheur, il était engagé dans une conversation des plus sérieuses avec un grave collègue, et Gaston ne pouvait guère se jeter à la traverse d’un entretien sur l’inamovibilité de la magistrature. Il dut se borner à lancer des regards suppliants à M.  Roger Darcy, qui lui fit signe de l’attendre, et force lui fut de se réfugier dans une embrasure de fenêtre pour laisser le champ libre aux tournoyantes évolutions de la valse.

      Vingt couples, entraînés par un excellent orchestre, tourbillonnaient avec furie sur le parquet ciré. Il y avait là des étrangères qui passaient comme des comètes échevelées. Le beau Prébord emportait dans l’espace une grande Américaine brune qui avait du feu dans les yeux et une boutique de joaillier sur les épaules. Le petit baron de Sigolène conduisait plus sagement une toute jeune Espagnole, pâle comme la lune, quelque arrière-cousine de la marquise. Tréville, renvoyé par la belle veuve à une quatorzième mazurka, se consolait en berçant une Russe aux yeux verts, qui s’appuyait sur lui avec une nonchalance tout asiatique. Et Saint-Galmier, le quadragénaire Saint-Galmier, faisait tourner sur place la cliente rondelette qu’il soignait d’une névrose. La valse rentrait dans sa méthode diététique.

      Retenue par ses devoirs de maîtresse de maison, la marquise ne valsait pas, et Nointel était allé la rejoindre dans le premier salon.

      Gaston n’avait d’yeux que pour son oncle, et son émotion fut vive quand il le vit se séparer du magistrat qui causait avec lui et s’approcher de la fenêtre. M.  Roger Darcy souriait. C’était de bon augure.

      – Eh bien, dit-il, tu dois être content, car je suppose que madame Cambry t’a annoncé la grande nouvelle.

      – Oui, répondit le neveu, tout palpitant d’espoir et d’inquiétude, madame Cambry m’a assuré que, demain matin, mademoiselle Lestérel sortirait de prison.

      – C’est parfaitement vrai.

      – Ah vous me rendez la vie. Je savais bien qu’elle n’était pas coupable. Enfin, son innocence a éclaté! Cette odieuse accusation a été mise à néant… il n’en restera plus de trace, et maintenant…

      – Pardon! madame Cambry ne t’a pas dit autre chose?

      – Non.

      – Les femmes les plus intelligentes manquent de précision dans l’esprit. Elle aurait bien dû compléter sa nouvelle.

      – Nous avons à peine échangé quelques mots. On est venu la chercher pour la valse.

      – Que tu t’es laissé souffler par un alerte substitut. C’était à toi d’ouvrir le bal avec ta future tante, mais je te pardonne. Les amoureux ne savent ce qu’ils font. Et je suppose que tu es toujours amoureux.

      – Plus que jamais, et j’espère que maintenant vous ne désapprouverez pas la résolution que j’ai prise d’épouser…

      – Une prévenue. Mais si, je la désapprouve très fort. Pourquoi veux-tu que je change de sentiment, puisqu’au fond la situation n’a pas changé?

      – Je ne vous comprends pas, mon oncle. Vous venez de me dire vous-même que mademoiselle Lestérel va être mise en liberté.

      – Provisoire. Voilà le mot que madame Cambry aurait dû ajouter pour ne pas te donner une fausse joie. Il est vrai que, toi, tu aurais bien dû le deviner.

      – Provisoire… comment?… que signifie?…

      – Sous caution, pour parler plus correctement. Cela t’étonne. Tu as donc oublié ton code d’instruction criminelle? Je m’en doutais un peu.

      – Quoi! ce n’est pas d’une ordonnance de non-lieu qu’il s’agit. Vous n’abandonnez pas cette affaire, alors que tout démontre…

      – Fais-moi le plaisir de te calmer et de m’écouter. Je veux bien t’expliquer les motifs de la décision à laquelle je me suis arrêté, après avoir beaucoup СКАЧАТЬ