Le crime de l'Opéra 1. Fortuné du Boisgobey
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Название: Le crime de l'Opéra 1

Автор: Fortuné du Boisgobey

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ d’abord Julia voulait brûler ses lettres. C’était pour pouvoir anéantir les preuves de son ancienne liaison avec Golymine qu’elle avait eu le terrible courage de les prendre.

      Elle allait jeter le paquet au feu, mais elle se ravisa. Il lui sembla qu’il était plus gros qu’il n’aurait dû l’être, s’il n’avait contenu que sa correspondance à elle.

      Elle défit précipitamment le cordonnet de soie, et elle vit que les billets doux avaient été divisés par le comte en quatre paquets. Ce fougueux amant mettait de l’ordre dans ses papiers de cœur, comme s’il se fût agi de papiers d’affaires.

      Julia avait sa liasse. Elle reconnut tout de suite son écriture, et elle fut assez surprise de trouver, épinglée sur cette liasse, une étiquette portant cette mention très explicite:

      «Madame d’Orcival, boulevard Malesherbes, 199.»

      – On aurait su à quoi s’en tenir, dit-elle avec amertume.

      Elle fut encore plus étonnée quand elle s’aperçut que chacun des trois autres paquets portait aussi un nom et une adresse.

      – Pourquoi a-t-il fait cela? se demanda-t-elle. Voulait-il se servir de ces lettres pour exploiter celles qui les ont écrites? On l’a accusé autrefois d’avoir abusé par ce procédé des faiblesses qu’une grande dame avait eues pour lui. Non, je crois plutôt qu’il se réservait de prendre un parti après m’avoir vue. Si j’avais consenti à le suivre à l’étranger, peut-être aurait-il cherché à profiter des secrets qu’il possédait. Il lui restait fort peu d’argent… et ce n’est pas à moi qu’il en aurait demandé. Quand il a pris la résolution de mourir, parce que je refusais de partir avec lui, il n’a plus songé qu’à se venger de moi.

      Il savait bien que le commissaire de police n’hésiterait pas à ouvrir une enquête sur la d’Orcival, et que, pour éviter un scandale, il s’empresserait de détruire ou de restituer les autres correspondances. Je ne suis qu’une femme galante, moi, tandis que mes rivales sont des femmes mariées, j’en suis sûre.

      Et après avoir réfléchi quelques secondes:

      – Si je voulais pourtant!… les noms y sont… il ne tiendrait qu’à moi de faire ce que Golymine aurait peut-être fait, s’il ne s’était pas tué. Pourquoi aurais-je pitié de celles qui me méprisent? La baronne du Briage a changé son jour d’opéra parce que sa loge est à côté de la mienne, et qu’elle ne veut pas être ma voisine. Oui, mais il ne s’agit pas d’elle. De qui sont ces lettres?

      Madame d’Orcival lut le nom qui désignait la destinataire du premier paquet.

      – Je ne la connais pas, murmura-t-elle. Une bourgeoise sans doute. Si c’était une des grandes mondaines qui vont aux bois et aux premières, j’aurais entendu parler d’elle. Pauvre femme! dans quelles transes va la jeter la nouvelle du suicide de Golymine! Et comme elle me bénira quand je lui rendrai ses lettres! Car je veux les lui rendre. Pourquoi chercherais-je à lui nuire?

      »Voyons les autres.

      À peine eut-elle jeté les yeux sur la seconde liasse qu’elle s’écria:

      – Elle! ces lettres sont d’elle! Ah! je savais bien qu’il avait été son amant, quoiqu’il l’ait toujours nié. La marquise s’est donnée à un aventurier. Et tous ces imbéciles qui ont lapidé Golymine avec des boules noires se disputeraient l’honneur d’épouser cette créature, si elle ne dédaignait leurs hommages! Ah! je les lui rendrai peut-être ses lettres, mais je ferai mes conditions… et ce n’est pas de l’argent que j’exigerai.

      À ce moment, on frappa doucement à la porte du boudoir, et, avant de tirer le verrou, madame d’Orcival cacha la correspondance dans la poche de son peignoir.

      Il y avait un troisième paquet dont elle n’avait pas encore regardé la suscription.

      – C’est toi; que veux-tu? demanda-t-elle à la soubrette qui répondit avec assurance:

      – Madame m’avait commandé de rester dans la chambre à coucher. Je m’y suis endormie devant le feu, et en me réveillant j’ai vu qu’il était plus de minuit. J’ai pensé que M.  Darcy devait être parti…

      – Depuis une heure au moins, mais je n’ai pas eu besoin de toi. Va me chercher le Figaro qui est sur la table de Boulle dans la bibliothèque, et occupe-toi ensuite de ma toilette de nuit.

      La camériste disparut avec la prestesse d’une souris. Julia, restée seule, alla droit au bonheur du jour dont le bois de rose cachait un tiroir secret. Elle y serra les lettres, et elle attendit la lugubre nouvelle qu’elle était parfaitement préparée à recevoir.

      Trois minutes après, Mariette, effarée, se précipita dans le boudoir en balbutiant:

      – Madame!… Ah! mon Dieu!… si vous saviez ce que je viens de voir! Le comte…

      – Eh bien? Est-ce qu’il s’est caché dans l’hôtel pour m’espionner?

      – Il est mort, madame! il s’est pendu!

      – Pendu!

      – Oui, madame… à une des fenêtres de la bibliothèque. Je ne sais pas comment je ne me suis pas évanouie de peur.

      – C’est épouvantable! s’écria madame d’Orcival, qui n’eut pas trop de peine à pâlir. Appelle le valet de pied… le cocher… dis-leur qu’ils courent chercher un médecin… prévenir le commissaire de police… le médecin d’abord… Il est peut-être encore temps de rappeler à la vie ce malheureux.

      II. À peine sorti de l’hôtel de madame d’Orcival

      À peine sorti de l’hôtel de madame d’Orcival, Gaston Darcy s’était mis à descendre le boulevard Malesherbes en courant comme un homme qui vient de s’échapper d’une prison et qui craint qu’on ne l’y ramène. Il était venu soucieux; il s’en allait le cœur léger, et il bénissait le hasard qui avait amené le Polonais chez Julia.

      – Ces bohèmes étrangers ont du bon, se disait-il joyeusement. Sans la scène que celui-ci est venu faire à Julia, je crois que je n’aurais pas eu le courage de dénoncer mon traité. Et pourtant, elle n’a pas à se plaindre de moi. Il a duré un an, cet aimable traité, et il m’a coûté dans les cent mille… en y comprenant le chèque que j’enverrai demain matin. Elle m’a dit qu’elle ne l’accepterait pas, mais je parierais bien qu’elle ne s’en servira pas pour allumer sa bougie. Les Cléopâtres d’à présent ne font pas fondre leurs perles dans du vinaigre… et elles ont raison. Mais moi je n’ai pas eu tort de quitter Julia. Elle m’aurait mené trop loin. Mon oncle me sautera au cou, quand je lui dirai demain: Tout est rompu… comme dans le Chapeau de paille d’Italie.

      Madame d’Orcival aurait, en effet, mené fort loin Gaston Darcy, mais ce n’était pas précisément la crainte de laisser chez elle son dernier louis qui l’avait arrêté tout à coup sur le chemin glissant de la ruine élégante. Ce n’était même pas pour suivre les conseils d’un oncle à succession qu’il venait de faire acte de sagesse.

      Gaston Darcy avait bien l’intention d’entrer dans la magistrature et de dételer l’équipage du diable en renonçant au jeu, aux soupers et aux demoiselles à la mode. Mais ces belles résolutions n’auraient probablement pas été suivies d’effet, si le goût СКАЧАТЬ