Notre Dame de Paris. Victor Hugo
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Название: Notre Dame de Paris

Автор: Victor Hugo

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ coupé fréquemment par la bouche d’une rue, et de temps en temps aussi par la face ou par le coude d’un grand hôtel de pierre, se carrant à son aise, cours et jardins, ailes et corps de logis, parmi cette populace de maisons serrées et étriquées, comme un grand seigneur dans un tas de manants, il y avait cinq ou six de ces hôtels sur le quai, depuis le logis de Lorraine qui partageait avec les Bernardins le grand enclos voisin de la Tournelle, jusqu’à l’hôtel de Nesle, dont la tour principale bornait Paris, et dont les toits pointus étaient en possession pendant trois mois de l’année d’échancrer de leurs triangles noirs le disque écarlate du soleil couchant.

      Ce côté de la Seine du reste était le moins marchand des deux, les écoliers y faisaient plus de bruit et de foule que les artisans, et il n’y avait, à proprement parler, de quai que du pont Saint-Michel à la tour de Nesle. Le reste du bord de la Seine était tantôt une grève nue, comme au delà des Bernardins, tantôt un entassement de maisons qui avaient le pied dans l’eau, comme entre les deux ponts. Il y avait grand vacarme de blanchisseuses, elles criaient, parlaient, chantaient du matin au soir le long du bord, et y battaient fort le linge, comme de nos jours. Ce n’est pas la moindre gaieté de Paris.

      L’Université faisait un bloc à l’œil. D’un bout à l’autre c’était un tout homogène et compact. Ces mille toits, drus, anguleux, adhérents, composés presque tous du même élément géométrique, offraient, vus de haut, l’aspect d’une cristallisation de la même substance. Le capricieux ravin des rues ne coupait pas ce pâté de maisons en tranches trop disproportionnées. Les quarante-deux collèges y étaient disséminés d’une manière assez égale, et il y en avait partout; les faîtes variés et amusants de ces beaux édifices étaient le produit du même art que les simples toits qu’ils dépassaient, et n’étaient en définitive qu’une multiplication au carré ou au cube de la même figure géométrique, ils compliquaient donc l’ensemble sans le troubler, le complétaient sans le charger. La géométrie est une harmonie. Quelques beaux hôtels faisaient aussi çà et là de magnifiques saillies sur les greniers pittoresques de la rive gauche, le logis de Nevers, le logis de Rome, le logis de Reims qui ont disparu; l’hôtel de Cluny, qui subsiste encore pour la consolation de l’artiste, et dont on a si bêtement découronné la tour il y a quelques années. Près de Cluny, ce palais romain, à belles arches cintrées, c’étaient les Thermes de Julien. Il y avait aussi force abbayes d’une beauté plus dévote, d’une grandeur plus grave que les hôtels, mais non moins belles, non moins grandes. Celles qui éveillaient d’abord l’œil, c’étaient les Bernardins avec leurs trois clochers; Sainte-Geneviève, dont la tour carrée, qui existe encore, fait tant regretter le reste; la Sorbonne, moitié collège, moitié monastère dont il survit une si admirable nef, le beau cloître quadrilatéral des Mathurins; son voisin le cloître de Saint-Benoît, dans les murs duquel on a eu le temps de bâcler un théâtre entre la septième et la huitième édition de ce livre; les Cordeliers, avec leurs trois énormes pignons juxtaposés; les Augustins, dont la gracieuse aiguille faisait, après la tour de Nesle, la deuxième dentelure de ce côté de Paris, à partir de l’occident. Les collèges, qui sont en effet l’anneau intermédiaire du cloître au monde, tenaient le milieu dans la série monumentale entre les hôtels et les abbayes, avec une sévérité pleine d’élégance, une sculpture moins évaporée que les palais, une architecture moins sérieuse que les couvents. Il ne reste malheureusement presque rien de ces monuments où l’art gothique entrecoupait avec tant de précision la richesse et l’économie. Les églises (et elles étaient nombreuses et splendides dans l’Université, et elles s’échelonnaient là aussi dans tous les âges de l’architecture depuis les pleins cintres de Saint-Julien jusqu’aux ogives de Saint-Séverin), les églises dominaient le tout, et, comme une harmonie de plus dans cette masse d’harmonie, elles perçaient à chaque instant la découpure multiple des pignons de flèches tailladées, de clochers à jour, d’aiguilles déliées dont la ligne n’était aussi qu’une magnifique exagération de l’angle aigu des toits.

      Le sol de l’Université était montueux. La montagne Sainte-Geneviève y faisait au sud-est une ampoule énorme, et c’était une chose à voir du haut de Notre-Dame que cette foule de rues étroites et tortues (aujourd’hui le pays latin), ces grappes de maisons qui, répandues en tous sens du sommet de cette éminence, se précipitaient en désordre et presque à pic sur ses flancs jusqu’au bord de l’eau, ayant l’air, les unes de tomber, les autres de regrimper, toutes de se retenir les unes aux autres. Un flux continuel de mille points noirs qui s’entrecroisaient sur le pavé faisait tout remuer aux yeux. C’était le peuple, vu ainsi de haut et de loin.

      Enfin, dans les intervalles de ces toits, de ces flèches, de ces accidents d’édifices sans nombre qui pliaient, tordaient et dentelaient d’une manière si bizarre la ligne extrême de l’Université, on entrevoyait, d’espace en espace, un gros pan de mur moussu, une épaisse tour ronde, une porte de ville crénelée, figurant la forteresse: c’était la clôture de Philippe-Auguste. Au delà verdoyaient les prés, au delà s’enfuyaient les routes, le long desquelles traînaient encore quelques maisons de faubourg, d’autant plus rares qu’elles s’éloignaient plus. Quelques-uns de ces faubourgs avaient de l’importance. C’était d’abord, à partir de la Tournelle, le bourg Saint-Victor, avec son pont d’une arche sur la Bièvre, son abbaye, où on lisait l’épitaphe de Louis le Gros, epitaphium Ludovici Grossi, et son église à flèche octogone flanquée de quatre clochetons du onzième siècle (on en peut voir une pareille à Étampes; elle n’est pas encore abattue); puis le bourg Saint-Marceau, qui avait déjà trois églises et un couvent. Puis, en laissant à gauche le moulin des Gobelins et ses quatre murs blancs, c’était le faubourg Saint-Jacques avec la belle croix sculptée de son carrefour, l’église de Saint-Jacques du Haut-Pas, qui était alors gothique, pointue et charmante, Saint-Magloire, belle nef du quatorzième siècle, dont Napoléon fit un grenier à foin, Notre-Dame-des-Champs où il y avait des mosaïques byzantines. Enfin, après avoir laissé en plein champ le monastère des Chartreux, riche édifice contemporain du Palais de Justice, avec ses petits jardins à compartiments et les ruines mal hantées de Vauvert, l’œil tombait à l’occident sur les trois aiguilles romanes de Saint-Germain-des-Prés. Le bourg Saint-Germain, déjà une grosse commune, faisait quinze ou vingt rues derrière. Le clocher aigu de Saint-Sulpice marquait un des coins du bourg. Tout à côté on distinguait l’enceinte quadrilatérale de la foire Saint-Germain, où est aujourd’hui le marché; puis le pilori de l’abbé, jolie petite tour ronde bien coiffée d’un cône de plomb. La tuilerie était plus loin, et la rue du Four, qui menait au four banal, et le moulin sur sa butte, et la maladrerie, maisonnette isolée et mal vue. Mais ce qui attirait surtout le regard, et le fixait longtemps sur ce point, c’était l’abbaye elle-même. Il est certain que ce monastère, qui avait une grande mine et comme église et comme seigneurie, ce palais abbatial, où les évêques de Paris s’estimaient heureux de coucher une nuit, ce réfectoire auquel l’architecte avait donné l’air, la beauté et la splendide rosace d’une cathédrale, cette élégante chapelle de la Vierge, ce dortoir monumental, ces vastes jardins, cette herse, ce pont-levis, cette enveloppe de créneaux qui entaillait aux yeux la verdure des prés d’alentour, ces cours où reluisaient des hommes d’armes mêlés à des chapes d’or, le tout groupé et rallié autour des trois hautes flèches à plein cintre bien assises sur une abside gothique, faisaient une magnifique figure à l’horizon.

      Quand enfin, après avoir longtemps considéré l’Université, vous vous tourniez vers la rive droite, vers la Ville, le spectacle changeait brusquement de caractère. La Ville, en effet, beaucoup plus grande que l’Université, était aussi moins une. Au premier aspect, on la voyait se diviser en plusieurs masses singulièrement distinctes. D’abord, au levant, dans cette partie de la Ville qui reçoit encore aujourd’hui son nom du marais où Camulogène embourba César, c’était un entassement de palais. Le pâté venait jusqu’au bord de l’eau. Quatre hôtels presque adhérents, Jouy, Sens, Barbeau, le logis de la Reine, miraient dans la Seine leurs combles d’ardoise coupés de sveltes tourelles. Ces quatre édifices emplissaient l’espace de la rue des Nonaindières à l’abbaye des Célestins, dont l’aiguille СКАЧАТЬ