Œuvres de Napoléon Bonaparte (Tome I-V). Napoleon Bonaparte
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Название: Œuvres de Napoléon Bonaparte (Tome I-V)

Автор: Napoleon Bonaparte

Издательство: Bookwire

Жанр: Документальная литература

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isbn: 4064066388782

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СКАЧАТЬ dans la nécessité de vous indemniser. L'expérience a prouvé la justesse de vos calculs: on vous remit bien au-delà de l'évalué des pertes. Il est vrai que l'on se plaint que vous gardâtes tout pour vous, ne donnant qu'une bagatelle aux misérables que vous aviez séduits. Pour justifier si vous l'avez dû faire, il ne s'agit que de savoir si vous l'avez pu faire avec sûreté. Or, de pauvres gens, qui avaient si besoin de votre protection, n'étaient ni dans le cas de réclamer, ni même dans celui de connaître bien clairement le tort qu'on leur faisait. Ils ne pouvaient pas faire les mécontens, et se révolter contre votre autorité: en horreur à leurs compatriotes, leur retour n'eût pas été plus sincère. Il est donc bien naturel qu'ayant ainsi trouvé quelques milliers d'écus, vous ne les ayez pas laissé échapper: c'eût été une duperie.

      Les Français, battus malgré leur or, leurs brevets, la discipline de leurs nombreux bataillons, la légèreté de leurs escadrons, l'adresse de leurs artilleurs; défaits à la Penta, à Vescovato, à Loretto, à San-Nicolao, à Borgo, à Barbaggio, à Oletta, se retranchèrent excessivement découragés. L'hiver, le moment de leur repos, fut pour vous, monsieur, celui du plus grand travail; et si vous ne pûtes triompher de l'obstination des préjugés profondément enracinés dans l'esprit du peuple, vous parvîntes à en séduire quelques chefs, auxquels vous réussîtes, quoique avec peine, à inculquer les bons sentimens; ce qui, joint aux trente bataillons qu'au printemps suivant M. de Vaux conduisît avec lui, soumit la Corse au joug, obligea Paoli et les plus fanatiques à la retraite.

      Une partie des patriotes étaient morts en défendant leur indépendance; l'autre avait fui une terre proscrite, désormais hideux nid des tyrans. Mais un grand nombre n'avaient dû ni mourir ni fuir: ils furent l'objet des persécutions. Des âmes que l'on n'avait pu corrompre étaient d'une autre trempe: l'on ne pouvait asseoir l'empire français que sur leur anéantissement absolu. Hélas! ce plan ne fut que trop ponctuellement exécuté. Les uns périrent victimes des crimes qu'on leur supposa; les autres, trahis par l'hospitalité, par la confiance, expièrent sur l'échafaud les soupirs, les larmes surprises à leur dissimulation; un grand nombre, entassés par Narbonne-Fridzelar dans la tour de Toulon; empoisonnés par les alimens, tourmentés par leurs chaînes; accablés par les plus indignes traitemens; ils ne vécurent quelque temps dans leurs soupirs, que pour voir la mort s'avancer à pas lents... Dieu, témoin de leur innocence, comment ne te rendis-tu pas leur vengeur!

      Au milieu de ce désastre général, au sein des cris et des gémissemens de cet infortuné peuple, vous, cependant, commençâtes à jouir du fruit de vos peines: honneurs, dignités, pensions, tout vous fut prodigué. Vos prospérités se seraient encore plus rapidement accrues, lorsque la Dubarri culbuta M. de Choiseul, vous priva d'un protecteur, d'un appréciateur de vos services. Ce coup ne vous découragea pas: vous vous tournâtes du côté des bureaux; vous sentîtes seulement la nécessité d'être plus assidu. Ils en furent flattés: vos services étaient si notoires! Tout vous fut accordé. Non content de l'étang de Biguglia, vous demandâtes une partie des terres de plusieurs communautés. Pourquoi les en vouliez-vous dépouiller, dit-on? Je demande, à mon tour, quels égards deviez-vous avoir pour une nation que vous saviez vous détester?

      Votre projet favori était de partager l'île entre dix barons. Comment! non content d'avoir aidé à forger les chaînes où votre patrie était retenue, vous vouliez encore l'asujétir à l'absurde régime féodal! Mais je vous loue d'avoir fait aux Corses le plus de mal que vous pouviez: vous étiez dans un état de guerre avec eux; et, dans l'état de guerre, faire le mal pour son profit est un axiôme.

      Mais passons sur toutes ces misères-là: arrivons au moment actuel, et finissons une lettre qui, par son épouvantable longueur, ne peut manquer de vous fatiguer.

      L'état des affaires de France présageait des événemens extraordinaires. Vous en craignîtes le contre-coup en Corse. Le même délire dont nous étions possédés avant la guerre, à votre grand scandale, commença à ématir cet aimable peuple. Vous en comprîtes les conséquences; car, si les grands sentimens maîtrisaient l'opinion, vous ne deveniez plus qu'un traître, au lieu d'un homme de bon sens. Pis encore; si les grands sentimens revenaient à agiter le sang de nos chauds compatriotes; si jamais un gouvernement national s'ensuivait; que deveniez-vous? Votre conscience alors commença à vous épouvanter: inquiet, affligé, vous ne vous y abandonnâtes pas; vous résolûtes de jouer le tout pour le tout, mais vous le fîtes en homme de tête. Vous vous mariâtes, pour accroître vos appuis. Un honnête homme qui avait, sur votre parole, donné sa soeur à votre neveu, se trouva abusé. Votre neveu, dont vous aviez englouti le patrimoine pour accroître un héritage qui devait être le sien, s'est trouvé réduit dans la misère avec une nombreuse famille.

      Vos affaires domestiques arrangées, vous jetâtes un coup d'oeil sur le pays: vous le vîtes fumant du sang de ses martyrs, jonché de victimes multipliées, n'inspirer à tous pas, que des idées de vengeance. Mais vous y vîtes l'atroce militaire, l'impertinent robin, l'avide publicain, y régner sans contradictions, et le Corse accablé sous ses triples chaînes, n'oser ni penser à ce qu'il fut, ni réfléchir sur ce qu'il pouvait être encore. Vous vous dîtes, dans la joie de votre coeur: les choses vont bien, il ne s'agit que de les maintenir; et aussitôt vous vous liguâtes avec le militaire, le robin et le publicain. Il ne fut plus question que de s'occuper à avoir des députés qui fussent animés par ces sentimens; car pour vous, vous ne pouviez pas soupçonner qu'une nation, votre ennemie, vous choisît pour la représenter. Mais vous dûtes changer d'opinion, lorsque les lettres de convocation, par une absurdité peut-être faite à dessein, déterminèrent que le député de la noblesse serait nommé dans une assemblée composée seulement de vingt-deux personnes: il ne s'agissait que d'obtenir douze suffrages, Vos co-associés du conseil supérieur travaillèrent avec activité: menaces, promesses, caresses, argent, tout fut mis en jeu: vous réussîtes. Les vôtres ne furent pas si heureux dans les communes: le premier président échoua; et deux hommes exaltés dans leurs idées, l'un fils, frère, neveu des plus zélés défenseurs de la cause commune; l'autre avait vu Sionville et Narbonne; en gémissant sur son impuissance, son esprit était plein des horreurs qu'il avait vu commettre: ces deux hommes furent proclamés, et rencontrèrent le voeu de la nation, dont ils devinrent l'espoir. Le dépit secret, la rage que votre nomination fit dévorer à tous, fait l'éloge de vos manoeuvres et du crédit de votre ligue.

      Arrivé Versailles, vous fûtes zélé royaliste: arrivé à Paris, vous dûtes voir avec un sensible chagrin que le gouvernement que l'on voulait organiser sur tant de débris, était le même que celui que l'on avait chez nous noyé dans tant de sang.

      Les efforts des méchans furent impuissans: la nouvelle constitution, admirée de l'Europe, et devenue la sollicitude de tout être pensant; il ne vous resta plus qu'une ressource; ce fut de faire croire que cette constitution ne convenait pas à notre île, quand elle était exactement la même que celle qui opéra de si bons effets, et qu'il fallut tant de sang pour nous l'arracher.

      Tous les délégués de l'ancienne administration, qui entraient naturellement dans votre cabale, vous servirent avec toute la chaleur de l'intérêt personnel: l'on dressa des mémoires où l'on prétendit prouver l'avantage dont était pour nous le gouvernement actuel, et où l'on établissait que tout changement contrarierait le voeu de la nation. Dans ce même temps, la ville d'Ajaccio eut indice de ce qui se tramait: elle leva le front, forma sa garde nationale, organisa son comité. Cet incident inattendu vous alarma: la fermentation se communiquait partout. Vous persuadâtes aux ministres, sur qui vous aviez pris de l'ascendant pour les affaires de Corse, qu'il était éminent d'y envoyer votre beau-père, M. Gaffory, avec un commandement; et voici M. Gaffory, digne précurseur de M. Narbonne, qui prétend, à la tête de ses troupes, maintenir par la force, la tyrannie que feu son père, de glorieuse mémoire, avait combattue et confondue par son génie. Des bévues sans nombre ne permirent pas de dissimuler la médiocrité des talens de votre beau-père: il n'avait que l'art de se faire des ennemis. L'on se ralliait de tous côtés contre lui. Dans ce pressant danger, vous levâtes vos regards, et vîtes Narbonne! Narbonne, СКАЧАТЬ