Le capitaine Pamphile. Alexandre Dumas
Чтение книги онлайн.

Читать онлайн книгу Le capitaine Pamphile - Alexandre Dumas страница 8

Название: Le capitaine Pamphile

Автор: Alexandre Dumas

Издательство: Bookwire

Жанр: Языкознание

Серия:

isbn: 4064066085698

isbn:

СКАЧАТЬ

      Love se leva aussitôt sur ses pattes de derrière et se mit à danser.

      —Tiens! dit Alexandre en posant la crosse de son fusil à terre et regardant son chien, il paraît que Love, outre son éducation universitaire, possède aussi des talents d'agrément. Je crois que j'ai fait là une excellente acquisition.

      Cependant, comme il avait acheté Love pour chasser et non pour danser, il profita du moment où celui-ci venait de retomber sur ses quatre pattes pour lui faire un second signe plus expressif, et lui dire d'une voix plus forte:

      —Cherche!

      Love se coucha de tout son long, ferma les yeux et fit le mort.

      Alexandre prit son lorgnon, regarda Love. L'intelligent animal était d'une immobilité parfaite; pas un poil de son corps ne bougeait; on l'eut cru trépassé depuis vingt-quatre heures.

      —Ceci est très joli, reprit Alexandre; mais, mon cher ami, ce n'est point ici le moment de nous livrer à ces sortes de plaisanteries; nous sommes venus pour chasser, chassons. Allons, la bête, allons!

      Love ne bougeait pas.

      —Attends, attends! dit Alexandre tirant de terre un échalas qui avait servi à ramer les pois, et s'avançant vers Love avec l'intention de lui en caresser les épaules, attends!

      À peine Love avait-il vu le bâton dans les mains de son maître, qu'il s'était remis sur ses pattes et avait suivi tous ses mouvements avec une expression d'intelligence remarquable. Alexandre, qui s'en était aperçu, différa donc la correction, et pensant que, cette fois, il allait enfin lui obéir, il étendit l'échalas devant Love, et lui dit pour la troisième fois:

      —Cherche!

      Love prit son élan et sauta par-dessus l'échalas.

      Love savait admirablement trois choses: danser sur les pattes de derrière, faire le mort et sauter pour le roi.

      Alexandre, qui, pour le moment, n'appréciait pas plus ce dernier talent que les autres, cassa l'échalas sur le dos de Love, qui se sauva en hurlant du côté de notre chasseur.

      Or, comme Love arrivait, notre chasseur tirait, et, par le plus grand hasard, une malheureuse alouette, qui s'était trouvée sous le coup, tombait dans la gueule de Love. Love remercia la Providence qui lui envoyait une pareille bénédiction; et sans s'inquiéter si elle était rôtie ou non, il n'en fit qu'une bouchée.

      Notre chasseur se précipita sur le malheureux chien avec les imprécations les plus terribles, le saisit à la gorge et la lui serra avec tant de force, qu'il le força d'ouvrir la gueule, quelque envie qu'il eût de n'en rien faire. Le chasseur y plongea frénétiquement la main jusqu'au gosier, et en tira trois plumes de la queue de l'alouette. Quant au corps, il n'y fallait plus penser.

      Le propriétaire de l'alouette chercha dans sa poche un couteau pour éventrer Love, et rentrer par ce moyen en possession de son gibier; mais, malheureusement pour lui, et heureusement pour Love, il avait prêté le sien, la veille au soir, à sa femme pour tailler d'avance les brochettes qui devaient enfiler ses perdrix, et sa femme avait oublié de le lui rendre. Forcé, en conséquence, de recourir à des moyens de punition moins violents, il donna à Love un coup de pied à enfoncer une porte cochère, mit soigneusement dans sa carnassière les trois plumes qu'il avait sauvées, et cria de toutes ses forces à Alexandre:

      —Vous pouvez être tranquille, mon cher ami, jamais je ne chasserai avec vous, à l'avenir. Votre gredin de Love vient de me dévorer une caille superbe! Ah! reviens-y, drôle!...

      Love n'avait garde d'y revenir. Il se sauvait, au contraire, tant qu'il avait de jambes, du côté de son maître; ce qui prouvait qu'à tout prendre, il aimait encore mieux les coups d'échalas que les coups de pied.

      Cependant l'alouette avait mis Love en appétit, et, comme il voyait de temps en temps se lever devant lui des individus qui paraissaient appartenir à la même espèce, il se prit à courir en tous sens dans l'espoir, sans doute, qu'il finirait par rencontrer une seconde aubaine pareille à la première.

      Alexandre le suivait à grand-peine et se damnait en le suivant: c'est que Love quêtait d'une manière toute contraire à celle adoptée par les autres chiens, c'est-à-dire le nez en l'air et la queue en bas. Cela dénotait qu'il avait une vue meilleure que l'odorat; mais ce déplacement de facultés physiques était intolérable pour son maître, à cent pas duquel il courait toujours, faisant lever le gibier à deux portées de fusil de distance et le chassant à voix jusqu'à la remise.

      Ce manège dura toute la journée.

      Vers les cinq heures du soir, Alexandre avait fait à peu près quinze lieues, et Love plus de cinquante: l'un était exténué de crier et l'autre d'aboyer; quant au chasseur, il avait accompli sa mission et s'était séparé de tous deux pour aller tirer des bécassines dans les marais de Pantin.

      Tout à coup Love tomba en arrêt.

      Mais un arrêt si ferme, si dur, qu'on aurait dit que, comme le chien de Céphale, il était changé en pierre. À cette vue, si nouvelle pour lui, Alexandre oublia sa fatigue, courut comme un dératé, tremblant toujours que Love ne forçât son arrêt avant qu'il fût arrivé à portée. Mais il n'y avait pas de danger: Love avait les quatre pattes rivées en terre.

      Alexandre le rejoignit, examina la direction de ses yeux, vit qu'ils étaient fixés sur une touffe d'herbe, et, sous cette touffe d'herbe, aperçut quelque chose de grisâtre. Il crut que c'était un jeune perdreau séparé de sa compagnie; et, se fiant plus à sa casquette qu'à son fusil, il coucha son arme à terre, prit sa casquette à sa main, et, s'approchant à pas de loup comme un enfant qui veut attraper un papillon, il abattit la susdite sur l'objet inconnu, fourra vivement la main dessous, et retira une grenouille.

      Un autre aurait jeté la grenouille à trente pas: Alexandre, au contraire, pensa que, puisque la Providence lui envoyait cette intéressante bête d'une manière si miraculeuse, c'est qu'elle avait sur elle des vues cachées et qu'elle la réservait à de grandes choses.

      En conséquence, il la mit soigneusement dans son carnier, la rapporta religieusement chez lui, la transvasa, aussitôt rentré, dans un bocal dont nous avions mangé, la veille, les dernières cerises, et lui versa sur la tête tout ce qui restait d'eau dans la carafe.

      Ces soins pour une grenouille auraient pu paraître extraordinaires de la part d'un homme qui se la serait procurée d'une manière moins compliquée que ne l'avait fait Alexandre; mais Alexandre savait ce que cette grenouille lui coûtait, et il la traitait en conséquence.

      Elle lui coûtait six cent soixante francs, sans compter le port d'armes.

       Table des matières

       Table СКАЧАТЬ