Название: Jean qui grogne et Jean qui rit
Автор: Comtesse de Ségur
Издательство: Bookwire
Жанр: Книги для детей: прочее
isbn: 4064066086121
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Et puis nous irons dire adieu à M. le curé, maman!
HÉLÈNE.
Oui, mon ami; c'est une bonne idée que tu as là, et qui me fait plaisir.»
Le jour commençait à baisser, mais ils n'avaient pas loin à aller; l'église et le presbytère étaient à cent pas. Ils marchèrent tous les trois en silence; la mère se sentait le coeur brisé du départ de son enfant; Jean s'affligeait de la solitude de sa mère, et Jeannot songeait avec effroi aux dangers du voyage et au tumulte de Paris.
Ils arrivèrent devant l'église; la porte était ouverte, Hélène entra suivie des enfants, et tous trois se mirent à genoux devant l'autel de la sainte Vierge. Hélène et Jean priaient et pleuraient, mais tout bas, en silence, afin d'avoir l'air calme et content. Jeannot soupirait et demandait du pain et un voyage heureux, suivi d'une heureuse arrivée chez Simon.
Pendant que la mère priait, elle se sentit serrer doucement le bras, et une voix enfantine lui dire tout bas:
«Assez, maman, assez: j'ai faim.»
Hélène se retourna vivement et vit une petite fille; l'obscurité croissante l'empêcha de distinguer ses traits! Elle se pencha vers elle.
«Je ne suis pas ta maman, ma petite», lui dit-elle.
La petite fille recula avec frayeur et se mit à crier:
«Maman, maman, au secours!»
Jean et Jeannot se levèrent fort surpris, presque effrayés. Hélène prit la petite fille par la main, et ils sortirent tous de l'église.
HÉLÈNE.
Où est ta maman, ma chère petite? Je vais te ramener à elle.
LA PETITE FILLE.
Je ne sais pas; elle était là!
HÉLÈNE.
Sais-tu où elle est allée?
LA PETITE FILLE.
Je ne sais pas; elle m'a dit: «Attends moi». J'attendais.
HÉLÈNE.
Elle est peut-être chez M. le curé. Allons l'y chercher.»
La petite fille se laissa conduire; en deux minutes ils furent chez M. le curé, qui interrogea Hélène sur la petite fille qu'elle amenait.
HÉLÈNE.
Je ne sais pas qui elle est, monsieur le curé. Je viens de la trouver dans l'église; elle cherchait sa maman, que je pensais trouver chez vous.
LE CURÉ.
Je n'ai vu personne; c'est singulier tout de même. Comment t'appelle-tu, ma petite? ajouta-t-il en caressant la joue de la petite.
LA PETITE FILLE.
J'ai faim! Je voudrais manger.»
Le curé alla chercher du pain, du raisiné et un verre de cidre; la petite mangea et but avec avidité.
Pendant qu'elle se rassasiait, Hélène expliquait au curé qu'elle était venue lui demander une dernière bénédiction pour le voyage qu'allaient entreprendre les enfants.
LE CURÉ.
«Quand donc partent-ils?
HÉLÈNE.
Demain matin de bonne heure, monsieur le curé.
LE CURÉ.
Demain, déjà! Je vous bénis de tout mon coeur et du fond du coeur, mes enfants. N'oubliez pas de prier le bon Dieu et la sainte Vierge de vous venir en aide dans tous vos embarras, dans vos privations, dans vos dangers, dans vos peines. Ce sont vos plus sûrs et vos plus puissants protecteurs.... Et quant à cette petite, mère Hélène, emmenez-la chez vous jusqu'à ce que sa mère revienne la chercher. Je vous l'enverrai si elle vient chez moi.
«Et vous, mes enfants, continua-t-il en ouvrant un tiroir, voici un souvenir de moi qui vous sera une protection pendant votre voyage et pendant votre vie.»
Il retira du tiroir deux cordons noirs avec des médailles de la sainte Vierge et les passa au cou de Jean et de Jeannot, qui les reçurent à genoux et baisèrent la main du bon curé.
La petite fille avait fini de manger; elle recommença à demander sa maman. Hélène l'emmena après avoir pris congé de M. le curé; Jean et Jeannot la suivirent. Hélène espérait trouver la mère de la petite aux environs de l'église, devant laquelle ils devaient passez pour rentrer chez eux; mais, ni dans l'église ni à l'entour de l'église, elle ne vit personne qui réclamât l'enfant.
La petite pleurait; Hélène soupirait.
«Que vais-je faire de cette enfant? pensa-t-elle. Je n'ai pas les moyens de la garder. Je ne me suis pas séparée de mon pauvre petit Jean pour prendre la charge d'une étrangère. Mais je suis bien sotte de m'inquiéter; le bon Dieu me l'a remise entre les mains, le bon Dieu me donnera de quoi la nourrir, si sa mère ne vient pas la rechercher.»
Rassurée par cette pensée, Hélène ne s'en inquiéta plus; elle la coucha au pied de son lit, la couvrit de quelques vieilles hardes; le printemps était avancé, on était au mois de juin; il faisait beau et chaud. Les petits garçons se couchèrent; Jeannot s'établit dans le lit de son cousin, et Jean s'étendit près de lui.
«C'est notre dernière nuit heureuse, maman, dit Jean en l'embrassant avant de se coucher.
—Non, mon enfant, pas la dernière; laissons marcher le temps, qui passe bien vite, et nous nous retrouverons. Dors, mon petit Jean: il faudra se lever de bonne heure demain.»
La petite fille dormait déjà, Jeannot s'endormait; Jean fut endormi peu d'instants après; la mère seule veilla, pleura et pria.
II
LA RENCONTRE
Le lendemain au petit jour, Hélène se leva, fit deux petits paquets de provisions, les enveloppa avec le linge et les vêtements des enfants, et s'occupa de leur déjeuner; au lieu du pain sec, qui était leur déjeuner accoutumé, elle y ajouta une tasse de lait chaud. Aussi, quand ils furent éveillés, lavés et habillés, ce repas splendide dissipa la tristesse de Jean et les inquiétudes de Jeannot. La petite СКАЧАТЬ