Название: Jane Austen: Oeuvres Majeures
Автор: Джейн ОÑтин
Издательство: Bookwire
Жанр: Языкознание
isbn: 9788027302383
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— Eh ! mais sans doute, et je parie qu’il aura beaucoup d’enfans, ce cher petit.
— Peut-être bien ! Ainsi, chère amie, il vaudrait mieux en effet diminuer la somme de moitié, qu’en dites-vous ? Cinq cents pièces à chacune ce serait encore une prodigieuse augmentation à leur fortune.
— Prodigieuse, immense, incroyable ! Quel frère dans le monde ferait cela pour ses sœurs, même pour des sœurs réelles ? et des demi-sœurs ! mais vous avez toujours été trop généreux, mon cher John.
— Il vaut mieux dans de telles occasions faire trop que trop peu, dit John en se rengorgeant ; personne au moins ne dira que je n’ai pas fait assez. Elles-mêmes ne s’attendent sûrement pas que je leur donne autant.
— Elles n’ont rien du tout à attendre, reprit aigrement Fanny ; ainsi il n’est pas question de leurs espérances, mais de ce que vous pouvez leur donner, et je trouve…
— Certainement je trouve aussi que cinq cents pièces sont bien suffisantes, interrompit John, sans que j’y ajoute rien. Elles auront chacune à la mort de leur mère trois mille trois cent trente-trois pièces ; fortune très-considérable pour toute jeune femme.
— Oui vraiment trois mille trois cent trente-trois ; je n’avais pas fait ce calcul, et c’est vraiment immense ! trois mille trois cent trente-trois pièces ! c’est énorme.
— Et même quelque chose de plus, dit John en calculant sur ses doigts. Dix mille pièces, divisées en trois. Oui c’est bien cela. Trois mille trois cent trente-trois et quelque chose en sus.
— Alors, mon cher, je ne conçois pas, je vous l’avoue, que vous vous croyiez obligé d’y ajouter la moindre chose. Dix mille pièces à partager entr’elles, c’est plus que suffisant. Si elles se marient, c’est une très-belle dot, et elles épouseront sûrement des hommes riches ; si elles ne se marient pas elles vivront très-comfortablement ensemble avec dix mille livres.
— Cela est vrai, très-vrai, dit John en se promenant avec l’air de réfléchir ; ainsi dites-moi, ma chère, s’il ne vaudrait pas mieux faire quelque chose pour la mère, pendant qu’elle vit, une rente annuelle ? Mes sœurs en profiteront autant que si c’était à elles. Cent pièces par année par exemple ; il me semble que pour une vieille femme qui vit dans la retraite, c’est bien honnête : qu’en pensez-vous, Fanny ?
— Il est sûr, dit-elle, que cela vaut beaucoup mieux que de se séparer de quinze cents livres tout à-la-fois… Mais je réfléchis que si madame Dashwood allait vivre vingt ans, alors nous serions en perte.
— Vingt ans, chère Fanny ! vous plaisantez ; elle ne vivra pas la moitié de ce temps-là ; elle est trop sensible, trop nerveuse.
— J’en conviens ; mais n’avez-vous pas observé que rien ne prolonge la vie comme une rente viagère ! C’est une affaire très-sérieuse que de s’engager à payer une rente annuelle. Vous ne savez pas quel ennui vous allez vous donner, et comme on est malheureux quand le moment de l’échéance arrive. C’est précisément alors qu’on aurait une dépense indispensable à faire pour soi-même, et que cet argent qui se trouve là ferait plaisir, et il faut le donner à d’autres ; c’est vraiment insupportable ! Ma mère devait payer de petites rentes à trois vieux domestiques par le testament de mon père ; j’ai souvent été témoin du chagrin, de l’ennui que cela lui donnait. Ses revenus n’étaient plus à elle, disait-elle. Et ces bonnes gens qui n’avaient garde de mourir ! elle en était tout-à-fait impatientée. Aussi j’ai pris une telle horreur des rentes viagères, que pour rien dans le monde je ne voudrais m’engager à en payer, quelle que petite qu’elle fût. Pensez y bien, mon cher.
— Il est sûr qu’il n’est pas du tout agréable que quelqu’un ait des droits sur notre revenu ; être obligé à un paiement régulier, tel mois, tel jour, cela blesse l’indépendance.
— Ajoutez, mon cher, qu’après tout, on ne vous en sait aucun gré. Cette rente est assurée ; vous ne faites en la donnant que ce que vous devez, et on n’en a nulle reconnaissance. Si j’étais de vous, je voudrais n’être lié par rien et pouvoir donner ce qu’il me plairait, et quand il me plairait. Vous serez charmé peut-être de pouvoir mettre de côté, cent ou cinquante pièces pour quelque dépense de fantaisie que vous ne pouvez prévoir.
— Je crois que vous parlez très-sensément, ma chère Fanny, et je suivrai vos bons conseils ; ce sera beaucoup mieux en effet que de leur donner une rente fixe. Ayant un revenu plus considérable, elles augmenteraient leur train, leurs dépenses, et au bout de l’année, elles n’en seraient pas plus riches. Oui, oui, cela sera beaucoup mieux ; un petit présent de vingt, de trente pièces de temps en temps, préviendra tout embarras d’argent, et j’aurai rempli la promesse que j’ai faite à mon père.
— Parfaitement bien, et je vous le répète, mon cher, je suis convaincue qu’il n’a jamais eu dans la pensée que vous dussiez leur donner de l’argent. L’assistance, les secours qu’il demandait pour elles, étaient seulement ce qu’on peut attendre d’un bon frère : comme par exemple de leur aider à trouver une petite maison jolie et commode ; de leur prêter vos chevaux pour transporter leurs effets ; de leur envoyer quelquefois du poisson, du gibier, des fruits dans leur saison. Je parie ma vie que c’est là seulement ce qu’il entendait, et il ne pouvait vouloir autre chose. Pensez comme votre belle-mère sera bien avec l’intérêt de sept mille pièces, et vos sœurs avec celui de trois mille ; elles auront par an cinq cents pièces de revenu, et qu’ont-elles besoin d’en avoir davantage ? Elles ne dépenseront pas cela ; leur ménage sera si peu de chose. Elles n’auront ni carosse, ni chevaux, tout au plus une fille pour les servir ; elles ne recevront point de compagnie, et n’auront presque aucune dépense à faire. Ainsi vous voyez qu’elles seront à merveille, et qu’il ne leur manquera rien. Cinq cents pièces par an ! je ne peux imaginer à quoi elles en emploieront la moitié ; et leur donner quelque chose de plus serait tout-à-fait absurde. Vous verrez que ce sont elles plutôt qui pourront vous donner quelque chose et faire souvent quelque joli présent à leur petit neveu.
— Sur ma parole, dit M. John Dashwood en se frottant les mains, vous avez parfaitement raison. Mon père ne prétendait rien de plus, je le comprends à présent, et je veux strictement remplir mes engagemens par toutes les preuves de tendresse et de bonté fraternelles que vous m’indiquez ; car votre cœur est excellent, chère Fanny, et je vous rends bien justice. Il est charmant à vous d’être aussi bonne pour mes sœurs et ma belle-mère. Quand elles iront s’établir ailleurs, je leur rendrai, et vous aussi, tous les petits services qui pourront leur être utiles : quelques présens de meubles par exemple, de porcelaines. Enfin je puis m’en rapporter à vous.
— Oh ! bien certainement tout ce qui pourra leur convenir… Mais cependant, réfléchissez à une chose. Quand votre vieux oncle fit venir ici votre père et votre belle-mère, il les établit chez lui. Tout le mobilier de Stanhill, la porcelaine, la vaisselle, le linge, tout fut soigneusement enfermé, et votre père, comme vous le savez, a légué ces objets à sa femme. Leur maison sera donc meublée et garnie au-delà de ce qu’elle pourra contenir ; ainsi elles n’auront besoin de rien.
— De rien du tout ; je n’y pensais pas. C’est un très-beau legs qu’elles ont eu là, en vérité ! et la vaisselle, par exemple, nous aurait bien fort convenu pour augmenter la nôtre, à présent que nous aurons souvent du monde à demeure.
— Et СКАЧАТЬ