Derniers essais de littérature et d'esthétique: août 1887-1890. Wilde Oscar
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СКАЧАТЬ un caractère passager et substituer, à l'esprit scientifique du véritable historien, le préjugé, le trompe-l'œil, la violence de l'homme de parti parlant sur le tréteau électoral.

      Au trompe-l'œil superficiel, on peut, il est vrai, trouver, dans les premiers ouvrages de M. Mahaffy, des précédents, mais le préjugé et la violence sont de sa part chose nouvelle, et leur apparition est des plus regrettables.

      Il y a toujours, dans la violence chez un homme de lettres, quelque chose de particulièrement impuissant.

      Elle semble manquer de proportion avec les faits, car elle n'est jamais réglée par l'action. Ce n'est qu'une question d'adjectifs et de rhétorique, d'exagération, d'outrance emphatique.

      M. Balfour tient beaucoup à ce que M. William O'Brien porte le costume de la prison, dorme sur un lit de planches, et soit soumis à d'autres traitements indignes. M. Mahaffy va beaucoup plus loin que ces mesures bénignes et commence son histoire en exprimant franchement son regret que Démosthène n'ait pas été exécuté sommairement pour sa tentative d'entretenir bien vivant l'esprit patriotique chez les citoyens d'Athènes!

      A vrai dire, il perd toute patience à l'égard de ce qu'il traite «d'opposition sotte, insensée à la Macédoine», regarde la révolte des Spartiates contre «le Lord-Lieutenant d'Alexandre en Grèce» comme un exemple de «politique de clocher», se laisse aller à des platitudes dignes de la Ligue Primrose contre un cens abaissé, contre l'iniquité de donner «au premier indigent venu» le droit de vote, et nous dit que les «démagogues» et les «soi-disant patriotes» perdirent toute vergogne au point de prêcher à la cohue de parasites d'Athènes la doctrine de l'autonomie, – «qui n'est pas encore morte», ajoute avec regret M. Mahaffy. Ils mirent en avant, dit-il encore, comme un principe d'économie politique, cette curieuse idée qu'il faut accorder aux gens le droit de s'occuper eux-mêmes de leurs affaires!

      Quant au caractère personnel des despotes, M. Mahaffy reconnaît que s'il fallait s'en tenir aux récits des historiens grecs, depuis Hérodote, «il aurait dit que l'inextinguible passion pour l'autonomie qui se manifeste à toutes les époques de l'histoire grecque, et dans tous les cantons contenus dans les frontières grecques, dut avoir sa source dans les excès commis par les gouverneurs qu'envoyaient des potentats étrangers ou par des tyrans locaux».

      Mais une étude attentive des dessins parus dans l'United Ireland l'a convaincu «qu'un gouvernant à beau être le plus modéré, le plus consciencieux, le plus prudent possible, sera toujours exposé à entendre dire sur son compte des choses terribles par de simples mécontents politiques.»

      Bref, depuis que M. Balfour a été caricaturé, il faut écrire à nouveau toute l'histoire grecque!

      Voilà à quel point en est venu le distingué professeur d'une Université distinguée.

      Et rien ne saurait égaler le préjugé de M. Mahaffy contre les patriotes grecs, à moins que ce ne soit son mépris pour certains de ces braves Romains qui, dans leur sympathie pour la civilisation et la culture helléniques, reconnurent la valeur politique de l'autonomie et l'importance intellectuelle d'une saine vie nationale.

      Il raille ce qu'il appelle leur «vulgaire sensiblerie au sujet des libertés grecques, leur préoccupation de redresser des torts historiques», et il félicite ses lecteurs de ce que ce sentiment n'a point été accru, à l'extrême, par le remords de savoir que leurs propres ancêtres ont été les oppresseurs.

      Heureusement, dit M. Mahaffy, les anciens Grecs avaient pris Troie.

      Aussi les tourments de conscience, qui aujourd'hui causent de si profonds remords, à un Gladstone, à un Morley, pour les péchés de leurs aïeux, n'étaient guère susceptibles d'agir sur un Marcius ou un Quinctius!

      Il est parfaitement inutile de s'étendre sur la sottise et le mauvais goût de passages pareils, mais il est intéressant de constater que les faits historiques sont trop forts même pour M. Mahaffy.

      En dépit de ses propos narquois sur ce qu'a de provincial le sentiment national, de ses vagues panégyriques en faveur d'une culture cosmopolite, il est forcé de reconnaître que s'il est vrai que le patriotisme puisse être remplacé chez certains individus par une solidarité plus vaste, les sociétés humaines n'y renonceront que pour leur substituer des motifs plus bas.

      Et il ne peut s'empêcher d'exprimer son regret que les classes supérieures des états grecs fussent dépourvues d'esprit public au point «de gaspiller en un paresseux absentéisme, en une résidence plus négligente encore, le temps et les ressources qui lui avaient été donnés pour que leur pays en profitât» et qu'elles n'eussent aucune conscience de la possibilité pour elles de fonder un Empire hellénique fédéral.

      Lors même qu'il en vient à parler de l'art, il ne peut faire autrement que d'avouer que l'œuvre la plus noble de la sculpture datant de cette époque fut celle qui exprimait l'esprit de la première grande lutte nationale, l'expulsion des hordes gauloises qui inondèrent la Grèce en 278 avant J.C. et que c'est au sentiment patriotique éveillé par cette crise, que nous devons l'Apollon du Belvédère, l'Artémis du Vatican, le Gaulois mourant, et les plus beaux chefs-d'œuvre de l'École de Pergame.

      Quand il s'agit de littérature, M. Mahaffy se répand de nouveau en bruyantes lamentations sur ce qu'il regarde comme des tendances sociales superficielles de la Comédie Nouvelle. Il regrette la belle liberté d'Aristophane, avec son intense patriotisme, l'intérêt vital qu'il prend à la politique, ses larges tableaux, et le plaisir que lui donne une vigoureuse vie nationale.

      Il avoue la décadence de l'éloquence sous l'action desséchante du régime impérial et la stérilité de ces recherches pédantes de style, qui sont l'inévitable résultat de l'absence de sujets vitaux.

      A vrai dire, M. Mahaffy, dans la dernière page de son histoire, rétracte formellement la plupart de ses préjugés politiques.

      Il persiste à penser que Démosthène aurait dû être mis à mort pour sa résistance à l'invasion macédonienne, mais il admet que le gouvernement impérial de Rome, qui suivit le gouvernement impérial d'Alexandre, produisit des maux sans nombre, et tout d'abord la décadence intellectuelle, pour finir par la ruine financière.

      «Le contact de Rome, dit-il, engourdit la Grèce et l'Égypte, la Syrie et l'Asie-Mineure, et s'il existe de grands édifices qui attestent la grandeur de l'Empire, où sont les indices de vigueur intellectuelle et morale, si nous en exceptons cette citadelle de la nationalité, le petit pays de Palestine?»

      Cette palinodie a, sans contredit, pour but de donner à l'ouvrage une apparence plausible de sincérité, mais un tel repentir de la dernière heure vient trop tard et inflige à toute la partie historique qui le précède un air de sottise et non de loyauté.

      C'est avec soulagement qu'on passe aux quelques chapitres où M. Mahaffy traite expressément de la vie sociale et de la pensée des Grecs.

      Ici la lecture de M. Mahaffy est vraiment fort agréable.

      Sa description des Écoles d'Athènes et d'Alexandrie, par exemple, est extrêmement intéressante.

      Il en est de même de son appréciation des écoles de Zénon, d'Épicure et de Pyrrhon.

      Excellent aussi, à bien des points de vue, le tableau de la littérature et de l'art de cette période.

      Nous ne sommes pas d'accord avec M. Mahaffy dans son panégyrique du Laocoon, et nous sommes surpris de trouver un écrivain, qui après s'être indigné vivement de ce qu'il appelle l'indifférence des modernes à l'égard de la poésie alexandrine, СКАЧАТЬ