Название: Les Néo-Ruraux Tome 1: Le Berger
Автор: Wolfgang Bendick
Издательство: Bookwire
Жанр: Сделай Сам
Серия: Les Néo-Ruraux
isbn: 9783750218888
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Quand je fus assuré qu’aucun foyer caché ne somnolait dans les feuilles, je m’assis à l’ombre d’un bouleau, adossé contre son tronc lisse. L’air sentait la fumée. Et soudain j’aperçus notre vallée sous mes pieds avec une telle clarté ! Je n’en avais connue de semblable auparavant qu’en plongeant sous l’eau ! La forêt s’était parée de sa robe de début d’été, les vertes collines s’alignaient les unes derrière les autres, le ciel bleu englobait tout comme une demi-sphère. Depuis mon point de vue, tout ressemblait à un monde miniature. Et d’en bas, où j’apercevais le toit de notre maison légèrement courbée, des rires d’enfants et des aboiements arrivait jusqu’à moi. Je caressai la terre, laissai glisser ma main sur l’écorce de l’arbre, j’étais heureux ! Je remerciai le ciel et la terre de m’avoir engendré et de m’avoir permis d’être ici ! Et je savais : le travail était le prix qu’ils demandaient en retour. Car dans cet univers tout est un échange permanent : donner et recevoir !
Pour faciliter notre travail nous avions acquis à petits prix, parfois en travaillant, divers outils de fenaison. Le premier étant une faucheuse, entièrement en fonte, normalement tractée par deux bêtes. Mais nous n’en avions qu’une. Le mécanisme de fauche était actionné par les roues crantées. Cette machine faisait un tel poids qu’on avait du mal à la monter en haut de la côte. Il fallut nous atteler avec la jument ! Quand finalement nous fûmes arrivés en haut, la jument s’écroula par terre, couverte de mousse, et nous aussi. Nous nous aperçûmes que jamais nous ne pourrions faucher nos prés avec ! Nous rangeâmes l’engin dans un coin pour ne plus le toucher.
Une autre machine, pareillement actionnée par les roues, était une faneuse. Celle-là déjà, était plus légère ! Son ancien propriétaire l’avait transformée pour l’atteler derrière son tracteur. Nous montâmes deux tubes métalliques à la place du timon pourri et y conduisîmes Calina en reculant. Cela lui plaisait déjà mieux ! A travers le châssis, une sorte de vilebrequin était posé dans des roulements, actionné par la rotation des roues. Celui-ci faisait bouger plusieurs fourches à l’arrière. Celles-ci retournaient le foin en le jetant dans l’air. Les enfants baptisèrent l’engin « pattes de Frodo » parce qu’il travaillait de la même manière que le chien. Celui-ci aimait courir derrière la machine pour happer le foin tourbillonnant dans l’air. Le terrain étant trop en pente, je préférais ne pas monter sur le siège mais plutôt courir à côté et guider le cheval.
Dans un hameau, nous avions découvert un râteau-andaineur. Il mesurait dans les 2 mètres 50 et était équipé sur toute sa largeur de dents en demi-cercle qui, en avançant, glissaient sur le sol et ramassaient le foin en forme de grosses saucisses. Les enfants l’appelèrent la « machine à saucisses de foin ». Quand assez de foin s’était accumulé devant les dents, en appuyant sur un levier celles-ci se levaient en l’air par la rotation des roues, laissant derrière elles une « saucisse » de foin de la hauteur des hanches. Tout l’art consistait à déposer les bouts de « saucisses » de manière à ce qu’elles forment des rangées que nous pouvions charger sur le traîneau. Souvent nous préférions le travail manuel, car par un ratissage intelligent nous arrivions à raccourcir ou à sauter certaines étapes.
Le fauchage se faisait à la motofaucheuse. En altitude l’herbe poussait si clair, qu’elle ne pouvait pas bourrer la barre de coupe. Et au lieu de la retourner, il suffisait de procéder à un ratissage par étapes. A l’aide de deux troncs de frêne légèrement courbés et quelques planches je bricolais un traîneau assez long, muni d'une sorte de large échelle en bois à l’avant et à l’arrière, légèrement inclinée vers l’extérieur. Entre ces deux supports nous posions le foin, et, une fois que c’était plein, nous le serrions et le fixions à l’aide d’une corde. Pour faciliter le chargement, nous le ratissions d’abord en gros tas. Mais notre poulain prenait trop de plaisir à se rouler dans ces tas et à les éparpiller de nouveau. Nous n’avions pas d’autre choix que de l’enfermer momentanément. Notre Calina semblait fière de nous montrer de quoi elle était capable ! Elle se laissait tomber dans son harnais et traînait les charges vers la grange. Grâce à une fourche plus longue nous montions le foin au grenier.
Combien de fois le soir nous pensions « maintenant tout est plein » ! Et le lendemain le foin s’était tassé et nous désespérions presque. Nous nous sentions comme Sisyphe. Eh bien, pas tout à fait. Car nous le faisions volontiers et à un moment donné notre corvée pris fin. Le dernier foin était dedans !
*
Les journées étaient longues. Pas seulement parce qu’on était en été. C’était le travail qui réglait la longueur de la journée. Le coq nous réveillait le matin. Puis nous mangions du muesli avec du lait et du miel de Roger. Puis nous trayions les vaches. Chacun de nous s’était créé son domaine, même si souvent il devait donner un coup de main à l’autre. Le domaine de Doris était grosso modo les enfants, la cuisine, la maison et le jardin. Je m’occupais des travaux de la ferme : soigner les animaux, poser les clôtures, défricher et en même temps faire le bois de chauffage, continuer la rénovation de la maison et plein d’autre choses comme des chantiers à l’extérieur, afin de gagner un peu d’argent, ou aider quelqu’un au village. De ce fait j’étais parfois absent au moins la demi-journée.
Le soir il y avait la traite commune. Très souvent les vaches nous attendaient déjà au lieu de la traite, deux arbres auxquels nous les attachions. Il suffisait de leur poser une corde sur la nuque. Quand elles n’étaient pas là, ça dégénérait parfois en une partie de cache-cache dont souvent le chien sortait vainqueur. Malgré leurs cloches, elles se tenaient silencieuses. Quand c’était possible, je courais avec le chien à la recherche des vaches, répétais fort les ordres, les encerclais, afin qu’il apprenne. Souvent, arrivé près des vaches, celles-ci montaient de quelques mètres pour repartir dans l’autre direction. Mais en montant je ne courais pas bien longtemps. Je m’essoufflais rapidement. Le chien était avantagé à cause de ses quatre jambes ! Mais quand les vaches s’obstinaient il arrivait que nous nous trouvions tous deux côte à côte, allongés dans les fougères, nos respirations sifflant à qui mieux mieux.
Quand les animaux étaient soignés, c’était le tour des enfants. En général nous dînions ensemble avant qu’ils aillent au lit. Doris leur lisait des histoires ou chantait doucement des chansons qui se posaient, avec le ciel étoilé, comme une couverture de paix sur nos terres. Quand elle ne s’était pas endormie avec eux, elle s’asseyait ensuite à côté de moi contre le mur encore tiède de la maison, nos mains se rejoignaient et ensemble nous regardions la silhouette des montagnes encadrées par le ciel scintillant en nous réjouissant de notre journée accomplie. Doucement le murmure du ruisseau montait vers nous, de loin on entendait l’aboiement d’un chien, et un chevreuil bêla en face dans les bois, faisant sursauter le chien. Son poil se hérissa sous ma main СКАЧАТЬ